Chroniques de l’ordinaire bordelais. Épisode 324

Publié le 06 octobre 2019 par Antropologia

Mutation

Elle rentre chez elle la voiture ravagée de salissures écœurantes, elle-même a une drôle de tête et les cheveux mouillés. Voisins yeux écarquillés. Elle explique : « C’est au travail, les collègues ont marqué mon dernier jour dans le service ». Elle est mutée.

Alors cela a été la folie déchaînée, elle a été coincée, on lui a enfilé de force une couche, un babygros, elle a dû monter en voiture avec, on lui a fait mille misères, (j’imagine les coups et attouchements l’air de rien) et on a arrangé sa voiture.

Les vitres latérales, la carrosserie, ont été barbouillées de vaseline, marquées d’inscriptions, les essuie-glace et le pare-brise arrière enduits de Danette marron qui dessine en séchant de gros étrons réalistes, l’intérieur même de la voiture est sali. Le mari s’étonne : ils ont eu tes clés ? Réponse : oui, le sac, au vestiaire. Elle veut aller au lave-voiture automatique avec les brosses, mais ce sera pire, il y en aura encore plus partout avec le gras qui poisse.

Ces séances de sadisme, il paraît que cela se fait maintenant, le management féroce qui descend.

Bizutage de départ.

Elle a subi cette journée de méchanceté, de rancœur et de bêtise car elle échappe à un service très difficile de l’hôpital pour en intégrer un autre théoriquement meilleur et convoité. Jalousie immense donc. Et puis il a fallu solder aussi tous les petits règlements de comptes entre collègues qui se sont supportés tant bien que mal des années dans une ambiance où les conditions de travail essorent le personnel. Or, on le sait, quand il n’y a plus de foin à l’écurie les chevaux se battent.

Demain il faudra faire connaissance avec le nouveau service.

Bizutage d’arrivée à prévoir ?

Thérèse Marsan