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Mes citations littéraires préférées #7

Publié le 23 septembre 2019 par The Cosmic Sam @thecosmicsam

Comme vous le savez si vous avez lu mes précédents articles sur le sujet (ici), je prends de plus en plus l’habitude de marquer les citations ou extraits qui me touchent au cours de mes lectures. J’ai toujours autant de plaisir à relire encore et encore les mots convoqués par les auteurs/autrices, lesquels sont, le plus souvent, révélateurs de l’atmosphère du roman duquel ils sont issus.

Cet exercice développe mon amour des mots et me permet également de relever certaines similitudes dans mes passages de livre favoris.

Cet article est un peu particulier car les extraits choisis sont nettement plus longs que dans mes précédents articles et surtout, pour la plupart, tirés du même roman « La Horde du Contrevent » d’Alain Damasio, un livre pépite qui m’a surprise, éblouie et laissée perplexe tout à la fois. Un roman-univers qui va me coller à la peau un certain temps, je pense, et dont je vous parlerai plus en détails très prochainement. (Je vous conseille d’ailleurs de lire les extraits d’Alain Damasio à voix haute pour prendre la teneur et la puissance de sa plume.)

Mes citations littéraires préférées #7

« C’est un temps d’équinoxe chargé d’orages que nous vivons » 

Henrik Ibsen – « Rosmersholm » (cité dans « Blanc Mortel » de Robert Galbraith – mon avis ici)

« Peux-tu me céder un idéal ou deux ? »

Henrik Ibsen – « Rosmersholm » (cité dans « Blanc Mortel » de Robert Galbraith)

Mes citations littéraires préférées #7

« Notre vie ressemblait à un rêve étrange et flou, parfois joyeux, ludique, toujours bordélique, qui ne tarderait pas à s’assombrir, mais bien un rêve, tant la vérité et la réalité en étaient absentes. Là encore, et malgré la sensation apparente de liberté, il fallait jouer au mieux l’histoire, accepter les rôles qu’on nous attribuait, fermer les yeux et croire aux contes. » 

Isabelle Carré – « Les rêveurs » (mon avis ici)

« Certains adultes s’inquiètent de voir les enfants rêver. Mon père, lui, nous assure régulièrement du contraire : « On ne réussit jamais mieux que ses rêves… » « 

Isabelle Carré – « Les rêveurs »

« Cette pluie dans la lumière du soir lui donne la sensation d’une journée en sépia, qui n’existerait vraiment ni pour elle ni pour personne, une parenthèse décourageante, nécessitant d’attendre avec patience que le ciel s’entrouvre pour que les coeurs soient de nouveau moins lourds. » 

Isabelle Carré – « Les rêveurs »

« J’écris pour qu’on me rencontre » 

Isabelle Carré – « Les rêveurs »

« Le chalet est minuscule mais il y a la montage, qui s’incurve comme une caresse, l’herbe est douce, les étoiles innombrables, si proches, je n’en ai jamais vu d’aussi brillantes, elles scintillent sans faiblir dans le ciel, des milliers de broches précieuses piquées sur le manteau de la nuit. La nuit est une reine très riche, je ne me lasse pas de la regarder. » 

Isabelle Carré – « Les rêveurs »

« Je suis en mauvaise compagnie avec moi-même » 

Isabelle Carré – « Les rêveurs »

Mes citations littéraires préférées #7

« Depuis que j’étais petite, souvent le même rêve idiot : j’aurais voulu devenir, à ces moments, une haie de buis, pas cette voile de peau en travers du flux, ce tronc à plat sans même de racines aux pieds pour s’associer à la terre. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« Ce lien nul (…) n’en comprendra jamais la force. Il est ce qui nous lève chaque jour que Vent fait. Il est ce qui nous tient debout dans la grêle, dans la pluie racleuse, face aux stries de la stèche, sans tituber, sans rompre. Il est ce qui ne nous fera jamais renoncer, à aucun prix, puisque derrière nous se tiennent confiants, ces morts altiers, que nous honorerons jusqu’au bout, non parce qu’ils sont morts, fut-ce en héros, mais parce que vivait en eux ce don, cette confiance furieuse qu’ils nous ont faite sans même imaginer quels seraient nos visages ou nos corps, notre propre quête. »  

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« Le hasard est un allié aussi fugitif que mortel. Il te tue avec la même facilité qu’il te sauve. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« Comme souvent avec Carac, nul ne sait où commence la farce, si seulement elle a commencé, et quand elle s’achèvera. Le sérieux reste chez lui indémêlable du jeu, cousu dans la même étoffe gestuelle et verbale, la même malice filante. Du troubadour, il offre l’incarnation la plus éclatée, le pur brio quotidien, infatigable… et fatiguant. La scène où il se produit a la dimension de la Terre et son rideau de ciel ne ferme depuis longtemps plus. Plus grave est l’évènement, plus fantasques ses écarts – et plus frivole l’attitude. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« J’adorais cette vaste étendue de ruines d’après la vague – ces villages ouverts à vau vent désormais, ces forteresses en vrac, dérisoires, comme vieillies dans la nuit, avec leurs pierres bradées sur un tapis de sable, autant de bijoux, épars à ramasser. J’adorais cette sensation d’homme debout, de lame de chair, encore droite sur ce monde horizontalisé, devant ce champ de bataille sans riposte ni ennemi, où rien n’avait été vaincu mais tout lavé à grandes eaux de bourrasques, tout renouvelé et redonné à nos pas, à notre simple trace. Ce rêve têtu, de la plus haute crétinerie, cette chimère d’atteindre un beau jour le bout de la Terre, tout là-haut, l’Extrême-Amont, à boire le vent à sa source – la fin de notre quête, le début de quoi ? J’adorais. Peut-être ressentions nous le miracle de vivre sous une lueur moins diffuse soudain, plus précise et liquide un matin comme celui-ci ? Le ciel était d’une transparence à crier et la plaine, fumante, encore, scintillait de vapeurs dissipées, de poudre fraîche où enfoncer ses pas était comme inventer le sol à la mesure de son contre. »   

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« Le cosmos est mon campement. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« La monotonie n’existe pas. Elle n’est qu’un symptôme de la fatigue. Le divers, n’importe qui peut le rencontrer à chacun de ses pas, pour peu qu’il en ait la force et l’acuité. »

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« Leur tempérance, lorsqu’elle éclatait, était encore un masque : un masque souriant, un masque nonchalant et racé. Mais un masque, pas un visage de peau. Moi je me battais contre moi pour gagner pas à pas un visage. Un visage qui soit mon âme faite nez et bouche, mon âme faite joue, mâchoire et menton, mon âme faite regard et front. Ni plus – ni moins. Mais ce visage là était tout sauf donné par avance. Personne n’en héritait de ses parents. Il devait être conquis tout au bout du contre, à travers le contre et par lui. Lorsqu’on me demandait ce que j’espérais trouver en Extrême-Amont, cette question banale posée mille fois, je répondais maintenant : « J’espère trouver mon visage. Quelqu’un là-haut le sculpte à coup de salves dures. Chaque acte que je fais le modifie et l’affine. Mes fautes le balafrent. Mais peu importe : il se fait, il m’attend, posé sur un socle. Et je le verrai, comme je vous vois devant moi, comme on se regarde dans un miroir enfin exact. Je verrai ce visage que je me suis fait tout au long de ma vie, juste avant de mourir. Ce sera ma récompense. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« Caracole laissa le silence se suspendre quelques secondes à l’aplomb des mâts. En tant que conteur, il avait du contrepoint une science unique. Un conte de Caracole ce n’était pas une voix, plus un récit, c’était un cosmos local, enfanté sur un feu. Il y avait certes une ligne, celle de l’histoire, qui partait d’un début pour aller vers une fin. Mais les contrepoints, qu’entre chaque laisse il faisait jaillir, brisaient à ce point cette ligne, lui imposaient une cadence si particulière, comme un galop tronqué, la doublaient de tant de claps, de tapes, mates, de bruits et de cris, de gestes, de tours et de tambours, l’habitaient de tant de dessins esquissés dans la cendre, de couleurs jetées sur une nappe, d’architecture de petites pierres, d’objets animés, amenés puis masqués, y ajoutaient une telle variété d’interprètes pris à la volée dans le public, de choristes complices, de musiciens alliés que le conte initial – cette voix chantante dont se contentaient tant de troubadours, même parmi les plus illustres – Caracole en éclatait princièrement le cristal, pour un résultat inouï. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« La folie n’est plus folle dès qu’elle est collective. Je crois que j’aurais pu faire n’importe quoi, le plus absurde, tant que nous le ferions ensemble ; ensemble, je sentais la puissance de chacun, physique et mentale, j’avais confiance en nous, et j’éprouvais cette profondeur du lien qui nous cousait à même la vague. Ensemble, les vingt ridicules mètres carrés de peau blanche que nous occupions sur la surface immense de cette flaque délimitaient une poche de résistance, d’un grain hermétique à la dilution générale… » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« Personne ne naît noble (…) Et dans le peu qui le deviennent, la plupart le font contre leur origine. Ce que tu n’as pas conquis avec ton âme, n’espère pas le recevoir de quiconque, fût-ce tes parents. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« Caracole était un homme du pur présent et de l’extrême oubli. L’intérêt qu’il portait aux autres dépendait non pas de l’amitié tissée ou de l’ancienneté du lien, plutôt de la capacité que vous aviez de déjouer l’image qu’il avait de vous et de dérouter, sans cesse, les attitudes et réactions que son intuition, admirable, anticipait. Devenir son ami d’un jour ne demandait aucun effort ; mais le rester impliquait cette exigence de le surprendre ; qu’il suscitait malgré lui. En un sens et pour paradoxal que ce fût, Caracole disciplinait ceux qui le côtoyaient, fût-ce d’une discipline étrange qui était celle du décalage érigé comme art de vivre – j’avais envie de dire : comme art d’être en vie. Ne jamais se contenter d’être soi, puisqu’alors il vous devinait et vous le lassiez. Devenir autre, et autre que cet autre, perpétuellement : condition expresse de son éveil et intérêt pour vous. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

« La solitude n’existe pas. Nul n’a jamais été seul pour naître. La solitude est cette ombre que projette la fatigue du lien chez qui ne parvient plus à avancer peuplé de ceux qu’il a aimés, qu’importe ce qui lui a été rendu. » 

Alain Damasio – La Horde du Contrevent

Mes citations littéraires préférées #7

Est-ce que certains de ces extraits vous ont donné envie de découvrir les livres ? Avez-vous également relevé des citations qui vous ont plu dernièrement ?  

Crédit photo de couverture : L&T


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