On sait que l’utilisation d’opioïdes à long terme est associée à une plus faible concentration de testostérone, pourtant aujourd’hui peu d’hommes sont dépistés et traités. Cette étude de l’Université de Texas (Galveston- UTMB) précise cette insuffisance de dépistage et nous apporte, dans les Mayo Clinic Proceedings, de nouveaux repères sur cet effet délétère, supplémentaire, des opioïdes.
Car de précédentes études ont montré qu'un faible taux de testostérone, corrélé généralement à une perte musculaire, à un gain de poids, à l'ostéoporose, à une baisse de libido et à une infertilité, était associé à la consommation d'opioïdes dans 35 à 90% des cas. Ces chiffres suggèrent un lien étroit entre la prise d’opioïdes et cette baisse de testostérone, sans totalement l’expliquer, même si l’on sait que les opiacés inhibent la libération des substances chimiques dans le cerveau qui déclenchent la production de testostérone dans les testicules.
L’hypogonadisme semble associé à la consommation d’opioïdes chez 10% des utilisateurs à long terme
Les chercheurs texans mènent ici la première enquête à grande échelle, représentative au niveau national (US), auprès de 53.888 hommes âgés de 20 ans ou plus ayant suivi des prescriptions d'opioïdes prolongées soit ayant pris le traitement durant au moins 90 jours au cours d'une période de 12 mois. Ce groupe de patients a fait l'objet d'un dépistage et, les participants si nécessaire, ont été traités pour une faible teneur en testostérone. Les chercheurs ont comparé ce groupe d'hommes avec 53.888 autres participants ayant reçu une prescription d'opioïdes de 14 jours ou moins. L’analyse montre à 1, 3 et 5 ans de suivi :
- une incidence du dépistage sérique de testostérone aux 3 points de contrôle respectivement de 3,73%, 8,94% et 11,55% chez les utilisateurs à court terme vs 5,76%, 13,60% et 17,15% chez les utilisateurs à long terme ;
- une incidence de l’hypogonadisme aux 3 points de contrôle respectivement de 1,42%, 3,59% et 4,85% chez les utilisateurs à court terme vs 2,62%, 7,18% et 9,44% chez les utilisateurs à long terme ;
- une prescription de thérapie de remplacement de la testostérone a concerné, aux 3 points de contrôle respectivement, 0,61%, 1,65% et 2,21% des utilisateurs à court terme vs 1,50%, 4,55% et 5,76% des utilisateurs à long terme.
Un très faible taux de dépistage : peu d'hommes prenant des opioïdes sont examinés, dépistés ou traités pour cette faible concentration de testostérone. Ce taux atteint en effet, dans le meilleur des cas 17% des utilisateurs à long terme. Si ce résultat peut sembler surprenant compte tenu du fait que l’effet est mieux connu, du moins par les prescripteurs, il peut néanmoins s’expliquer par un manque de sensibilisation de la part de certains médecins ou une réticence à dépister cette affection supplémentaire chez des patients présentant déjà des affections complexes et suivant déjà des traitements. Et, du côté du patient, atteint déjà de douleur chronique et des affections qui la causent, il est probable que de faibles niveaux de testostérone ne soient pas sa principale préoccupation.
Des effets croissants et inquiétants sur la fertilité : cette association dans un contexte d’augmentation spectaculaire de la consommation d'opioïdes suggère une incidence qui ne fera que croître de niveaux insuffisants de testostérone et d’hypogonadisme, avec des effets profonds sur la santé et la qualité de vie des hommes, relève l’auteur principal, Jacques Baillargeon, professeur au département de médecine préventive et de santé communautaire à l'UTMB.
Bien que le taux de dépistage, de diagnostic et de traitement d’un faible taux de testostérone soit plus élevé chez les hommes soumis à une prescription prolongée d'opioïdes, ces chiffres engagent donc à un dépistage élargi dans l’objectif de préserver chez ces patients, à la fois fertilité et qualité de vie.
Source: Mayo Clinic Proceedings September 2019 DOI : 10.1016/j.mayocpiqo.2019.06.007 Opioid-Induced Hypogonadism in the United States
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Équipe de rédaction Santélog Sep 7, 2019Rédaction Santé log