Critique de J’ai envie de toi, de Sébastien Castro, vu le 31 août 2019 au Théâtre Fontaine
Avec Sébastien Castro, Maud Le Guénédal, Guillaume Clérice, Anne-Sophie Germanaz, Astrid Roos, et Alexandre Jérôme, dans une mise en scène de José Paul
On ne va pas se mentir : j’aurais clairement snobé cette affiche et ce spectacle au titre digne d’une production du Palace à Avignon, si le nom de Sébastien Castro n’y avait pas été accolé. J’ai hésité un temps : je n’avais aucune envie de prendre des places pour un spectacle qui me laisserait de glace, et de commencer ma saison théâtrale du mauvais pied par-dessus le marché, mais je n’avais pas non plus envie d’être trop influencée en lisant la trame et en en découvrant trop sur le spectacle. Je me suis finalement décidée à faire confiance à Sébastien Castro et à donner sa chance à son premier spectacle. C’était la bonne décision.
J’ai envie de toi, c’est une comédie de boulevard qui choisit le voisinage comme environnement. Il fallait que Youssouf choisisse justement ce soir-là pour décider de casser le mur donnant sur le placard de son voisin ! Ce dernier attendait justement un rendez-vous galant rencontré sur internet ! Préoccupé, la tête ailleurs, il envoie le SMS initialement destiné à sa charmante… à son ex, un brin harceleuse sur les bords. Toute prête à débarquer chez lui, il confie alors à son voisin la mission de l’occuper et surtout, surtout, de ne pas le mentionner. Evidemment, rien ne va se passer comme prévu…
Avec un titre pareil, je dois reconnaître que j’avais peur de la grosse comédie qui tache, avec ses blagues lourdes et ses situations attendues. Il n’en fut rien. L’écriture est plutôt fine, et le tout très bien ficelé : on sent que Sébastien Castro connaît son domaine, qu’il a navigué longtemps dans des comédies boulevards et qu’il y a puisé le meilleur avant de pondre le sien. J’ai même été impressionnée par l’écriture de sa pièce : les situations sont très bien trouvées et, sans jamais alourdir son propos par des explications trop soulignées, tout est toujours très clair pour le spectateur malgré les nombreux quiproquos qui règnent en maître sur le plateau.
En réalité, c’est même un travail peut-être un peu trop soigné, et la première partie de la pièce met un peu de temps à s’installer : les rires y sont plus éparses. Certaines répliques, qui ne font pas directement avancer l’action, pourraient être supprimées pour resserrer encore le propos et arriver plus rapidement au rythme délirant qui accompagne toute la fin du spectacle. On sent une volonté de bien faire et de donner à chaque comédien son moment sur scène, mais la pièce gagnerait à s’autoriser quelques coupes au service d’une vision d’ensemble.
Ce qui est un peu étrange dans ce spectacle, c’est que si j’ai trouvé l’intrigue plutôt originale et bien ficelée, j’ai eu l’impression que le rire ne venait pas directement des situations mais davantage d’ajouts comiques saupoudrés ça et là dans la pièce. Je m’explique. Les quiproquos sont certes brillants, mais ils m’ont fait sourire là où des répliques bien trouvées, une bonne dose d’humour noir ou des effets de comiques de langage venus de nulle part ont davantage provoqué l’hilarité. A mon sens, Sébastien Castro et José Paul n’ont pas suffisamment puisé dans le comique des situations : la pièce pourrait n’être qu’un grand rire général.
Il faut dire aussi que la grande arme de Sébastien Castro est dans la lenteur, ce qui a pu déteindre sur son ériture. C’est la quatrième fois que je le vois sur scène, et il réendosse le costume que je l’ai vu si souvent enfiler : celui du personnage a l’esprit pas bien rapide à qui il faut répéter les choses trois ou quatre fois et même là, on n’est pas sûr qu’il a bien compris. Quand il entre en scène et que je comprends qu’il va nous rejouer son numéro, j’en éprouve une certaine lassitude. Et puis la magie Castro prend : deux minutes après, je ne peux plus le quitter des yeux. Un sacré numéro !
Un chouette premier spectacle.