Un jour
ma barque s’est détachée
s’est éloignée du port
et sans que je m’en sois
rendu compte
poussé par le vent
j’ai dérivé
longuement dérivé
A me découvrir seul
loin de mes semblables
j’étais dévoré d’angoisse
Mon unique désir
était de revenir parmi eux
là où était ma place
D’autant que mon embarcation
prenait l’eau
ou bien était-ce moi
qui déjà me fissurais
me délabrais
Je n’avais plus la force de ramer
de diriger ma barque
N’allais-je pas sombrer
Je ne me sentais pas de taille
à affronter les tempêtes
que j’aurais à essuyer
Je me rebellais…voulais retrouver
la quiétude de ma vie d’avant
mais il ne m’était pas possible
de maîtriser ma dérive
et j’ai dû abandonner
A plusieurs reprises
ma frêle embarcation
a chaviré
Tout ce qu’elle contenait
livres
savoir
possessions diverses
tout est passé par le fond
Je ne pouvais intervenir
ne pouvais que me laisser
emporter par cette navigation
aveugle
Je suis parfois resté encalminé
mais le plus souvent j’ai été
pris dans d’âpres bourrasques
Un jour
mon esquif s’est disloqué
et force m’a été
de lâcher prise
de consentir à disparaître
Alors des courants
m’ont poussé porté
puis déposé sur une plage
Une lumière d’aurore
inondait l’oasis
où j’allais maintenant
vivre
Charles Juliet
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