Mosquée à ZARA
Nous avons offert un CD de Gnawa à notre ami suisse Roméo (« le boss »). Très content. Puis nous avons quitté la Géorgie pour la Turquie. Le douanier turc : - vous êtes d’où ? - France - d’où ? - Marseille - d’où ? Katar, Kazakhstan, Iran… ? - Ah… origine ? Algéria ! Puis je précise devant sa tête en forme de point d’interrogation : « africa », puis « football african cup champion »
Le douanier, hoche la tête et j’entends « no turc ? » et il prononce mon nom. Il pointe son index sur moi. Je lui dis alors en bluffant « oh, yes ! Among my ancestors there are Ottomans… » et le laisse à sa satisfaction (ou non).
Une queue immense de camions, semi… garés sont en attente soit de passer la frontière, soit, ce que nous pensons, en attente que dimanche passe et reprendre la route le lundi vers la Géorgie. Ils n’ont probablement pas le droit de circuler le dimanche (comme dans certains pays européens). Sans exagérer, 45 minutes après la frontière - nous n’étions pas loin de Hopa – et à raison de trois camions comptabilisés tous les 50 mètres, c’est plusieurs milliers de semi-remorques immobilisés les uns derrière les autres, à hauteur de la ville de Arhavi. Depuis la frontière la circulation est très faible. Tous les Turcs sont à la mer. Le ciel est laiteux, 30°. Légère brise proposée par la Mer noire. Le voyage (les nouvelles contrées) reprend de plus belle à partir de Trabzon avec l’entrée dans les terres en direction de Gümüshame. Grands et beaux tunnels jusqu’à Barzarkoy. Villages perchés, on se croirait en Kabylie. Le soleil disparaît derrière les montagnes puis réapparaît entre deux autres, une fois, deux fois, et le jour décline lentement à la vitesse autorisée par les routes sinueuses et pentues. La chaleur cède à la fraîcheur qui s’installe insidieusement. Nous faisons une halte (plus ou moins forcée – « l’eau chauffe ! ») 25 kms avant Torul, à 2000 m d’altitude. Les chiens, très nombreux, des hôtels et restaurants de l’espace n’ont pas cessé d’aboyer (ou de garder l’endroit). Il a plu une bonne partie de la nuit qui fut d’ailleurs très fraîche. Le lendemain tout était rentré dans l’ordre. Une petite mosquée (« mesjit ») au toit vert en forme de polygone, est restée silencieuse la nuit. Et son minaret, formé de huit grands barils d’huile, vides, juxtaposés, nous fait sourire. À Gümüshane, à l’entrée de la banque Türkiye Bankasi on vous délivre un ticket de rang (selon que vous souhaitez tel ou tel type d’opération, un ticket commençant par un unité de chiffres donnée, suivi de votre nombre (numéro). Nous, nous avions le 5.18, d’autres le 8.43, le 0.23 ou 3.17. Les appels lumineux demandent à telle personne portant tel numéro de se présenter au guichet. Et ainsi de suite. Sauf que les appels concernant les « 5 » (nous) pour échange de devises sont rares. Les gens entrés bien après nous ont été servis. Pour des raisons qui la regarde, la banque n’appelle pas selon l’ordre d’arrivée, mais selon le type d’opération privilégiant ainsi les séries « 3 », « 2 » au détriment du « 5 »… Arrive enfin notre tour et nous marquons notre mécontentement, comme nous l’avons fait à Safranbolu de manière plus marquée, car alors l’attente avait été très longue et nous n’en voyons plus la fin (nous avons omis d’en parler). Il a fallu l’intervention d’un client, manifestement important pour qu’on daigne enfin nous appeler.
Revenons à Torul. Au matin, le temps était couvert et frais. Les nuages moutonneux étaient accrochés aux montagnes longtemps sans crever. Nous passons devant Kallbit où une jolie rivière du même nom, coule dans la vallée, formant de belles gorges. Non loin, le sommet Sariçiçek Dagi culmine à 2368m. Un camion de travaux chargé de rénover les signalisations horizontales avance à très faible allure, à son arrière un employé pose des plots régulièrement sur la fraîche bande blanche pour l’indiquer ou pour je ne sais quoi d’autre. Le dernier tronçon qui nous ramenait à Golova est dans un très mauvais état et sinueux. Par endroit, des employés de la chaussée repeignent les piquets d’hiver, blanc, orange, noir, orange, noir, en prévision de l’hiver, et mesurer la hauteur de la neige, particulièrement dans la partie qui traverse les villages d’Aksatas et Bozat. Mais nous ne sommes pas en hiver. Sur la nationale 865, entre Susehri et Zara, de nouveau nous avons affaire à la montagne et de nouveau, à hauteur de 2000 mètres, près de Kamoglu, l’eau fait des siennes. Nous nous sommes arrêtés, près d’une source plutôt animée par les villageois et voyageurs, nombreux. C’est à Zara, près de la mosquée et du terrain de football, que nous nous sommes arrêtés pour la nuit. Ce ne sont plus de hautes montagnes avec leur sommet plus ou moins enneigés, mais depuis plusieurs centaines de kilomètres, ce sont des montagnes nues, rocailleuses, avec peu de végétation qui essaie tant bien que mal de survivre, mais malgré tout, elles forment un très beau paysage avec des couleurs étonnantes, tirant vers le mauve et le marron clair. Les moissonneuses sont en fonction et leur résultat, or, imprime une couleur vive particulière qui s’ajoute aux précédentes. Nous traversons depuis plusieurs jours des villages sans intérêt, dans cette région écrasée de soleil et vallonnée.
Sur la route de Nevsehir- jeudi 20190808
Ceux-ci sont particulièrement peu nombreux, encore moins que les aires de repos ou assimilés. Entre Budakli et Hanli, en direction de Kayseri, sur des dizaines de kilomètres, les espaces sont protégés par des hauts panneaux en forme de herse, peut-être ce sont des terrains militaires, leur faisant face, de l’autre côté de la route, un champ de grands panneaux solaires dont une partie est en cours d’installation. La nationale à quatre voies avec un grand terre-plein, traverse la ville de Sivas très étendues avec de nombreux bâtiments aux couleurs sobres ne dépassant pas cinq ou six étages. Nous nous sommes arrêtés au village de Sarkisla,_ Mosquée de Sarkisla- date de 1901_ 20190806
pris en photo une mosquée datant de 1901. En fait, seul le minaret est intact. Le reste de la mosquée a été reconstruit. Nous n’avons pu visiter le Caravansérail du Sultan Hani. Nous nous y sommes pourtant préparés, avons bien ralenti à l’entrée du village (nous étions au km 9961), mais hélas, aucune indication sur le caravansérail et ne pouvions rejoindre le village à l’intérieur des terres. Une flopée de panneaux publicitaires nous accueille de part et d’autre de la chaussée, à l’entrée de la ville de Kayseri. À l’opposée, c’est la montagne avec le mont Argée, haut de ses 3916 m (deux stations de ski) qui domine la ville. Il est l’un des deux volcans qui donnèrent naissance à la Cappadoce. Kayseri est une belle ville, très en mouvement. Si vous vous y rendez, ne ratez pas le bazar,
maison de Ataturk
maison de Ataturk
Eglise arménienne à Kayseri
Quartier pauvre à Kayseri
la maison du « dictateur lumineux » Mustafa Kamel Ataturk, la grande Mosquée Ulu Cami, le Complexe Hunat-Hatun (il comprend une mosquée du 13° s construite pour l’épouse d’un sultan seljoukide), la Citadelle (19 tours de guet construites au 6° et 13° s, reliées par un chemin de ronde), l’église arménienne St Grégoire, qui semble abandonnée au cœur d’un quartier extrêmement pauvre dont plusieurs maisons sont en démolition. Devant le tombeau de Seyyid Zeyneelabbidin (1349_1414) ou Imam Soltan « une des figures marquantes de l’ordre Rufaï », trois femmes le louent.Nous avons fait une halte au Harmani Pub. C’est mon anniversaire. Je pense à elle. C’est mon anniversaire, elle avait 17 ans ou un peu plus, lorsque je me suis présenté, hagard, dans un monde nouveau et combien cruel. C’est mon anniversaire. Elle nous a quittés il y a quelques mois. C’est à elle que j’ai pensé (et pense) longtemps. Nous avons quitté Kayseri au matin du 8 août.
AVANOS
AVANOS
En début d’après-midi, nous étions à Avanos : ateliers de poteries dans le vieux village et ses anciennes maisons grecques au fronton blanchi à la chaux, sculptures d’hommes de culture en allant vers le cimetière… Nazim Hikmet, Can Yucel, Atilla Ilhan… Panorama avec le volcan éteint Erciyes qui culmine à 3916 m. À Gorème, village inscrit au patrimoine mondial, (hormis les difficultés pour se garer), nous nous sommes promenés sur les hauteurs, prenant des prises des cheminées de fées, toutes creusées de cavités. Site hélas, abîmé par les centaines de quads qui sillonnent ses routes et chemins à longueur de journée. Nous avons poursuivi notre route vers Çavusin. L’ancien village, victime de l’érosion, a été abandonné en 1960. Aujourd’hui on peut accéder librement aux maisons abandonnées, creusées dans la roche. On peut accéder à l’église St-Jean Baptiste (6° s), une des plus anciennes de l’Acappadoce.GOREME
GOREME
Le soir, à Avanos, devant le fleuve rouge (ouKizlirmak, le plus long de Turquie avec ses 1151 km) nous avons campé. Sur notre route de nombreux campements de nomades.
Aujourd’hui nous sommes à Sultan Hani où nous avons visité le magnifique caravansérail du même nom (hier nous avions raté la visite d’un autre caravansérail portant le même nom, mais se trouvant à 45 km au nord-est de Kayseri). Celui-ci est posé depuis le 13° siècle sur l’ancienne route de la soie, c’est un des plus beaux caravansérails du pays. Environ 4500 M2, c’est « joyau d'architecture seldjoukide anatolienne ». « Les caravanes y trouvaient refuge lors de leurs longs périples. On y priait, on y négociait, on y parlait toutes les langues, on se soignait puis ont repartait pour la halte suivante. Il en reste encore quelques vestiges en Turquie, dont le caravansérail de Sultanhani, le plus grand et le mieux conservé de tous. » (www.le-voyage-autrement.com) Depuis une dizaine de jours je ne cesse d’écouter une chanson magnifique. Elle est de Dünya Tekin et s’intitule « Bugün Günlerden Cumadır Cuma ». Les paroles de cette jeune femme me sont inaccessibles, mais les modulations de sa voix sont saisissantes d’émotion. (https://www.youtube.com/watch?v=PmfFtgttK84&list=RDEwbNzEWR2fM&index=2)
« Bugün Günlerden Cumadır Cuma / Yar hamama gitme kınanı yuma / Ben seni sevmişem ellere deme… »
À SULTAN HANI
--------- Un dernier mot : Entre le temps de la conduite (très long), des découvertes (plus ou moins court, plus ou moins long), de l’écriture du compte-rendu, que reste-t-il à l’esthétique ? Encore une fois, tous ces posts (blogs et FB…) sont écrits avec plus ou moins de spontanéité, soyez donc indulgents…Kayseri