de Laurine Roux
Roman - 110 pages
Editions du Sonneur - mars 2018
Prix SGDL (Société des Gens De Lettres) - Révélation 2018
C'est une jeune fille des terres âpres de la Taïga. Sans famille, elle trouve refuge au sein de la maison des frères Illiakov, où elle rencontre Igor, un homme comme sorti d'une légende fantastique, un animal magnétique, qui la subjugue immédiatement et totalement. Ensemble ils vont vivre, à toujours livrer du poisson séché aux vieilles femmes qui vivent dans les lointaines montagnes. Au péril de leur vie, par tous les temps, elle le suivra.
Comme cette femme est aimantée et envoûtée par Igor dès les premières pages, je suis immédiatement happée par cette écriture totalement féérique et sensuelle. A la fois très poétique, métaphorique, et également charnelle, tactile presque. On s'imagine un univers rude, froid, vaste, brumeux. On s'invente une habitation faite de bric et de broc autour d'un âtre avec des barriques où reposent des feuilles pour décoctions remèdes et des stocks de poissons séchés. Avec calme les années passent, mais la violence de la nature n'est jamais loin, comme celle du passé.
Extrait :"Lorsqu'il descend de la falaise, Igor s'approche de moi. Tout près. Il me regarde sans un mot. Le bleu délavé de ses yeux a l'acuité du métal, mais il est surtout immense, comme si un bout du ciel s'était détaché pour tomber là en deux petites taches rondes et azurées. Je ne comprends pas vraiment ce qui se passe, si cet homme me regarde ou voit au-delà, je sens juste mon pouls battre à tout rompre et ma tête se remplir d'un liquide bleuté noyant, au delà de mes pensées, toute ma personne.Cela dur un instant ou de longues minutes, je ne saurais le dire car le temps vient de s'abstraire du monde. Le regard d'Igor abolit mon être. Il m'absorbe et arase tout autre réaction qu'un immense afflux de sans. Partout dans mon corps mille particules soulèvent mes membres, et c'est à la fois de la peur et de la glace, du miel et de la lavande." La fin du roman fut pour moi un peu plus délicate, brouillée que j'étais avec les autres personnages, ceux du présent et du passé, les destinées de tout ce petit monde rendu invisible étant moins linéaires à suivre.En peu de pages, Laurine Roux aura réussi avec talent à faire naître beaucoup de poésie par ces mots, beaucoup d'images et de sensation, et pas simplement une immense sensation de calme. Ce petit roman est bien plus. L'avis de Nicole Grundlinger - Mots pour motsAvis d'internautes - OnLaLu