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663_ Périple 2019_11_Pyatigorsk_ Russie_ Lundi 29 juillet 2019
Publié le 29 juillet 2019 par Ahmed HanifiNous voici à Pyatigorsk. Jolie ville avec son lac, ses petites échoppes en hauteur, ses allées ombragées et ses trams trolley usés, verts, bleus, rouges, « Y bac doma ! ».
Une pensée à I… (Marseille) que j’ai eue en apprentissage linguistique il y a une quinzaine d’années. Elle résidait dans cette belle ville.
Nous avons quitté Astrakhan pour la frontière du Kazakhstan. Les petits transporteurs de voyageurs sont très nombreux. Nous en voyons depuis la Turquie. Ils contiennent une vingtaine de places. Grâce à l’un d’eux nous sommes allés à Yar Market, un grand centre commercial et ainsi découvrir les environs du centre ville.
Le matin le temps était très lourd. Après avoir traversé une rivière à Krasny yar sur une espèce de pont toboggan nous avons subi une trombe d’eau de pluie. Nous sommes arrivés à la frontière du Kazakstan. Nous avons attendu plus d’une heure côté russe, bureaucratie crade oblige (fouille etc.) On a passé la frontière Kazaque sans problème après un long no man’s land de 10 km. La frontière kazaque passée, la route a été bonne sur environ un kilomètre. Ensuite sont apparus des panneaux indicateurs de travaux sur 6 km. En fait de 6 km se furent une cinquantaine, de route absolument impraticable, malgré les véhicules locaux (y compris les semi remorques) qui l’empruntent sans sourciller, à 80, voire 100 km à l’heure. Nous, nous roulions entre 11 et 13 km/h. Rouler plus vite aurait endommagé tout ou partie de la cellule du véhicule (et cela a commencé avec l’arrêt de la fourniture en énergie solaire, puis avec l’affaiblissement de la deuxième batterie)… Une route, plutôt une piste, caillouteuse, pleine de nids de poule et de dos d’âne (grosse poule et gros mulet). De temps à autre nous avons croisé des cimetières kazaques, musulmans, tout à fait typiques. Sur cette route, nos amortisseurs n’auraient pas tenu au terme des 200 ou 300 km. Sur le conseil d’une charmante automobiliste kazaque – parfaitement anglophone – nous avons abandonné la route. Selon cette jeune dame, la route est ainsi abîmée sur la totalité du trajet, jusqu’en Ouzbekistan. Elle nous a conseillé, vu l’heure, 18 h, de nous arrêter au prochain village pour la nuit. Ce que nous avons fait. Nous nous sommes arrêtés au village de Xuyaz (peu avant, des policiers nous ont dit qu’il n’y avait pas de problème et que nous pouvions même profiter de la rivière et pêcher). C’est un tout petit village fait d’une vingtaine de maisons, très calme, traversé par une rivière, elle même occupée ainsi que ses berges par des animaux en parfaite liberté tels que des chevaux, des vaches, moutons, brebis etc. Nous avons passé la nuit – fraîche – parmi eux. Et non loin d’un vieux cimetière. La nuit fut complètement noire et silencieuse hors le bruit des animaux. Le lendemain il a fait, dès les premières heures, extrêmement chaud, avec un vent (tel un sirocco) insupportable. Nous avons découvert les environs, un village accessible par route goudronnée… son nom est « Akkel » et sa mosquée est sans minaret (dans le village où nous avons passé la nuit, il n’y a pas de mosquée). Nous avons, compte tenu de tout cela, pris la douloureuse décision de ne pas poursuivre la route vers l’Ouzbékistan, vers Samarcande… notre véritable objectif, u risque d’endommager le Nomadeur. Le rêve de visiter l’illustre ville de Tamerland tombe à l’eau. La route vers le Sud-Est à la recherche de ma Pierre Philosophale et de Ibn Hayyam s’arrête ici. Tombe à l’eau également le projet d’animer un ou plusieurs ateliers d’écriture (tel que nous l’avions enregistré avec le directeur de l’Alliance française à Tashkent) liant l’Ouzbekistan, la France et l’Algérie à travers des textes littéraires, non sans oublierle célèbre texte Djamilia de Tchinghiz Aïtmatov le Khirghize…Mais ce n’est que partie remise. Nous nous y rendrons par d’autres moyens, dès que possible, juré. Cet échec (c’en est un) me renvoie à un précédent, c’était en 2011, nous avions pour objectif d’atteindre le nord du cercle arctique, à Tuktoyaktuk (grand nord canadien), et nous ne l’atteignîmes pas à cause d’une sottise… Aussi, les yeux dans les poches et la gorge nouée, nous avons pris la même route pour le retour vers la frontière russe, aidés à la sortie de Xuyaz par deux jeunes qui nous ont fait gagner près d’une heure en empruntant une piste impossible (sablonneuse, difficile… que seuls les locaux connaissent et empruntent) avant de rejoindre la route principale (elle même et nous l’avons dit, extrêmement impraticable. En fin d’après-midi nous avons retrouvé Astrakhan. Une ville qui donne la sensation d’être au bout du monde, la même sensation que nous avons éprouvée à Narvik, Hammerfest, Yellowknife… Le matin du vendredi nous nous sommes rendus à la Banque Cbepbahk à hauteur du « Kremlin » pour échanger quelques billets d’euros en monnaie locale. Cela nous a été refusé au prétexte que nos billets étaient « troués » (il s’agit en fait de deux trous d’agrafeuse) et que par conséquent ces billets seraient refusés par la Banque Centrale de Russie !… Le personnel de cette banque nous a carrément orienté vers Western Union (dans le même bâtiment) qui a procédé au change en moins de trois minutes. Nous avons quitté ensuite la ville pour Élista où nous arrivons en fin de journée. Des travailleurs, le long de la route, de part et d’autres ramassent les détritus que les gens jettent de leur véhicule. Sur plus de 300 km le paysage est triste. De la steppe parfois tr ès clairsemée avec des espaces sablonneux. Est-ce un désert ? peu de villages, tous espacés de plusieurs centaines de kilomètres entre eux. La steppe passe du vert au jaune. Les broussailles sont rabougries. Les vallons sont nombreux. La route est sans fin. Des troupeaux de vaches, moutons, chèvres… paissent alors qu’à l’horizon il n’y a ni ferme, ni village. Un vent très fort et frais balaie la région depuis le départ jusqu’à Élista. Des parcelles de champ sont entièrement brûlées.
À Elista nous nous sommes installés en plein centre-ville dans un parc.Nous avons constaté la présence de populations très typée « asiatique ». Les temples et statues de bouddha sont nombreux. Ceci sera confirmé par un jeune, « Cyrille », qui a tenu à nous exprimer sa fierté d’être, non pas musulman, mais bouddhiste, il insista « w’re not muslim ». S’en est suivi une discussion sur l’islam, les fanatismes… Le lendemain nous nous réveillons la tête enfarinée. Nous n’avons quasiment pas dormi à cause des fêtards. La publicité, dans les pays que nous avons visités (Serbie, Turquie, Russie…) mettant en avant le corps de la femme pour la vente d’un produit est quasiment inexistante. Et cela met d’autant plus en relief le caractère pornographique de la quasi totalité des publicités en Occident, notamment en France. Il a plu depuis le matin, depuis Elista, de fortes pluies tout au long de la route. À la limite de la République Kalmykia, à un contrôle routier fixe, l’agent présent nous a fait signe de continuer. La route est bonne dans l’ensemble, hormis un court tronçon difficile à cause de la pluie. Les champs ont été entièrement labourés, sur des dizaines de km2, auxquels succèdent d’autres espaces aussi grands, comme ceux de tournesols, la fleur pointant le sol et non le soleil, et auxquels succèdent d’autres champs labourés. Un chien, sorti de nulle part, nous regarde, aussi surpris que nous, passe à vive allure pour disparaître aussitôt. Les premiers rayons de soleil, timides, sont apparu alors que nous approchions de la ville de Stavropol (en région de Stravopol’skiy) à 720 km au sud de Elista, et que la circulation plutôt léthargique jusque-là, se réveilla. Il était 14 heures. Il faut dire que nous avons l’impression que les Russes conduisent leurs automobiles aussi intrépidement et en masse, de jour comme de nuit sans discontinuer. De la folie, en prenant un malin plaisir à faire crisser leurs pneus sur le macadam en grande souffrance. Nous avons fait une courte halte dans la ville de Nevinnomyssk, manifestement ouvrière. Une petite fête s’y déroule à laquelle nous assistons. Des enfants chahutent tandis que leurs parents apprécient, discutent…
Nous voici donc à Pyatigorsk. Non loin de son lac. Nous prenons un café dans la grande avenue du centre, près du Kongume pekaa à l’angle de la dite avenue.