Yvon Deschamps disait, avec beaucoup de justesse, qu'il avait ses limites, comme tout le monde, sauf que les siennes sont plus rapides à l'atteindre.
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Dans une vie de couple, deux êtres de race humaine ont chacun des limites dans leur construction. Madame n'aime pas quand c'est sale. Monsieur non plus. Mais chacun à un niveau de tolérance différent. Si madame trouve sale plus vite que monsieur (souvent) elle lavera et vous serez toute votre vie, celui qui ne fait pas le ménage. Ce qui lui servira toute sa vie dans la victimisation de sa personne.C'est très souvent la dynamique d'un couple.
Chez nous, c'est un peu comme ça. Pas toujours. Mais souvent. Et la tondeuse, depuis qu'on a déménagé, je dois la passer plus souvent. Chaque fucking semaine en fait. Et c'est deux fois plus long que notre ancien chez nous. On a beaucoup plus de bouts gazonnés. Dont des bouts inaccessibles pour une tondeuse. Qui ont forcé le passage dans un magasin de Monsieur (que je ne suis pas) pour acheter une ostie de gogosse longue qui taille les bouts gazonnés inaccessibles. Quand nous sommes allés au magasin de monsieur de garage, je n'avais que la première ligne de la chanson d'Ed Sheeran et de Justin Bieber en tête.
J'aime si peu ce gugusse que je l'ai passé deux fois sur le gazon inaccessible et l'étiquette pend encore sur le manche. Comme si j'allais le retourner assez rapidement.
Je deviens l'épouse des deux voisins. Que je ne connais pas encore.
Mes deux anciens voisins étaient biens. Adorables mêmes. Sur la gauche, Un vieil homme amer avait cédé sa place à un jeune couple qui avait fait deux bébés depuis, et dont le gars du couple avait la gentillesse de venir pelleter la neige que son abri tempo faisait tomber chez nous l'hiver. Faut dire que son abri était illégal. Nos entrées étant trop proches l'une de l'autre, la loi dit clairement qu'un espace de trois pieds doit exister entre un abri tempo et l'entrée voisine. Ce qui n'était pas le cas. Je pelletais mon entrée à sueur de bras et le vieux monsieur amer, avant ce jeune couple, passait ensuite et vidait son toit d'abri. Tout retombait chez nous. Et c'était à recommencer. Malgré les diplomatiques explications/supplications avec l'amer monsieur de ma part. Ce vieux monsieur était devenu amer quand sa femme, extraordinairement discrète, était décédée. Elle était si discrète que lorsqu'elle est décédée, on l'a appris 4 mois plus tard.
Sur la droite, un couple de boomer ressemblait beaucoup au nôtre (de X). Je crois même que c'est ce qui nous as si facilement rapprochés. Lui, c'est un ancien gardien de but des Remparts de Québec qui avait joué avec Jacques Richard, un ancien joueur des Nordiques, dont l'épouse avait été la meilleure amie de ma mère. À sa retraite de hockeyeur, il était devenu directeur d'école. Parce que pour les boomers, les jobs, ça tombait du ciel. Elle, elle était des premières vagues d'hôtesses de l'air et a suivi la série avec Karine Vanasse avec passion puisque c'était exactement sa vie. Elle travaille maintenant en pharmacie et joue de la basse avec des amis dans un band. Ils ont fait le coup du roi eux aussi: un gars et une fille. Sauf que chez eux, c'est la fille (superbe) qui est la plus vieille et le fils qui est le plus jeune. Leur fille a suivi les inspirations de maman, elle a étudié en musique et en vit.
On ne connait pas nos voisins actuels encore. J'ai vu que sur la droite, ils avaient un chien. J'ai aimé. Ma fille adore les chiens, elle sera contentée un tantinet. Mais ils me faisaient dos, je ne saurais les reconnaître. Notre chat fouineur ne sera pas tenté de trop s'y aventurer.
Sur la gauche, je ne les ai jamais vus. Par choix. À notre arrivée, ils étaient peut-être à l'extérieur depuis longtemps, leur terrain était affreusement négligé. La piscine hors terre derrière, verte. La gazon très très long. On aurait dit une maison abandonnée. Peu à peu, il y a eu vie. et on a parti la piscine et entretenu le terrain. Mais les deux fois où j'aurais pu vraiment les voir, c'était lui qui faisait le lézard sur un matelas de piscine, je le voyais du coin de l'oeil en sortant par ma porte patio qui offre, en hauteur, quelques secondes de vision chez le voisin de gauche. J'ai refusé de planter mon regard sur monsieur se faisant griller. Par pudeur.
Je deviens l'épouse des deux voisins car je passe la tondeuse plus souvent qu'eux. Celui de droite, je l'ai forcé à tondre dimanche dernier en tondant samedi, avant l'orage. Celui de gauche n'a toujours pas tondu depuis.
Je suis maintenant très gêné de les voir l'un et l'autre.
Pas envie de jouer aux "monsieur" ni au voisin gonflable.
Quand j'ai voulu passer par le côté de la maison pour me rendre au garage devant (ou ma voiture ne je ne sais plus), là où notre terrain se fond au terrain du voisin de droite, il s'y trouvait et ne m'a pas vu. J'ai rebroussé chemin et fui la possible rencontre.
Idéalement je ne voudrais jamais vraiment les rencontrer, je crois.
Je tiens plus de ma mère que de mon père là-dessus.
C'est ma mère la sauvage.
So am I.
Je suis l'épouse si discrète des deux voisins que je mourrai et vous ne vous en rendrez compte que 4 mois plus tard.