Tout en contraste

Publié le 21 juillet 2019 par Réverbères

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Sortie à Bruxelles hier soir : concert en prélude de la Fête nationale par l’Orchestre symphonique de Belgique. Beethoven et Kodály, musiques envoûtantes, tout en contraste. La suite le fut plus encore grâce à deux membres de la police dans l’exercice de leurs fonctions. L’une avenante, l’autre agressif.
En sortant de Bozar, petit attroupement : le Roi et la Reine allaient sortir et monter dans leur voiture. Nous décidons de les attendre en nous installant près d’une barrière juste devant une jeune policière. Nous entamons une conversation bien agréable. Elle nous explique qu’elle est de corvée tout le week-end et que ça commence à être un peu fatiguant : les missions n’arrêtent pas depuis début juillet avec le Tour de France et autres joyeusetés. On la sent fatiguée, mais bien dans sa peau et sa fonction. Contente de pouvoir parler un peu, simplement.
Les souverains étant partis, nous nous dirigeons vers la Grand’Place où nous n’étions plus allés depuis longtemps. Il fait beau, le coucher de soleil est splendide, l’ambiance est partout à la fête, on se croit un peu en vacances. Nous décidons de prendre un verre sur une terrasse bien remplie.
En cours de conversation, Brigitte me demande discrètement si j’ai reconnu sa voisine. Oui, bien sûr, une (excellente) journaliste de la RTBF. C’est à ce moment qu’entrent sur la terrasse un policier accompagné d’un « touriste en bermuda ». Ils s’affairent auprès de deux personnes assises à trois mètres de nous. Enfin, c’est surtout le gars en bermuda qui s’affaire. Ma voisine lui lance : « Pouvez-vous aussi vous occuper de cet objet qui traîne par terre ? ». Mal lui en prit ! Le bermuda s’approche de ma voisine, lui montre rapidement une carte et débite très agressivement : « Je suis policier. Donnez-moi votre carte d’identité ».
Interloquée, ma voisine n’obtempère pas et demande pourquoi. Le bermuda policier s’énerve, avec un fort accent belge : « Écoutez, moi, je suis policier. Je viens de prendre en flagrant délit un voleur qui a visité le sac que vous avez à vos pieds…
- Mais il n’y a rien dans ce sac à part un mauvais magazine. Je m’en fous s’il me l’a pris !
- Madame, vous venez d’être victime d’un vol. Moi, je suis policier, j’ai arrêté un voleur en flagrant délit, vous êtes victime. J’ai besoin de savoir qui est victime de mon voleur. Montrez-moi votre carte d’identité.
- Mais je ne comprends pas pourquoi. Je ne suis victime de rien du tout et je ne porte pas plainte !
- Écoutez (de plus en plus énervé), moi, je fais mon métier et je sais ce que je dois faire. Il ne faut pas croire tout ce qu’on raconte partout. Notamment à la télévision où ils n’arrêtent pas de dire n’importe quoi ! (Mon regard croise celui de la journaliste et nous pouffons tous les deux de rire !)
- Mais c’est une caméra cachée ?
- Non Madame, maintenant arrêtez de vous plaindre et donnez-moi votre carte d’identité ».
Ça ne servait sans doute à rien de s’opposer encore. Ce policier était visiblement de très mauvaise humeur et sûr de son droit autoritaire. Interpellé du regard, son collègue en uniforme nous a fait comprendre qu’il n’y pouvait rien. Bref, notre « victime » a montré sa carte que le bermuda a photographiée, non sans sortir encore quelques diatribes.
Le chat parti, les souris ont dansé. J’ai dit à la journaliste : « Visiblement, il ne vous a pas reconnue » ! Quoique, c’est peut-être pour cela qu’il a déblatéré de vils propos sur la télévision ?
Allez savoir. Cet homme faisait sans doute son travail. En filant et en arrêtant les pickpockets qui pullulent sans doute, il rend service à tous les citadins et à tous les touristes qui prennent du bon temps dans ces lieux splendides. Doit-il pour autant exiger de connaître et d’encoder l’identité de supposées victimes qui n’ont rien demandé ? Doit-il surtout faire preuve d’une agressivité sans borne et d’un mépris évident pour ceux ou celles qui ne pensent pas comme lui ?
Nous en avons bien ri. D’un rire jaune en réalité. Un tel sbire déforce et injurie sa confrérie. La fonction d’un policier est d’être au service de la population, pas de l’agresser ni de la menacer. Certains l’ont compris, d’autres s’enferment dans leur illusion d’autorité toute puissante. Tout en contraste.