Quelquefois la nuit, singulièrement après l'amour, je deviens insecte. Si l'homme de ses deux mains étrangle doucement la taille, elle s'étire et fond jusqu'à devenir un pivot excessivement grêle, mais solide comme un filin d'acier, exactement de la hauteur des mains.
Alors commencent à jouer avec une parfaite indépendance les muscles et les joints du bassin et du torse. Les seins se dressent, interrogent l'horizon, se tournent lentement : avec un peu d'habitude on arrive à les placer face à la cambrure des reins. En dessous les hanches glissent peu à peu, dans un mouvement plutôt ondulatoire. La masse heureuse se déplace avec une souplesse lente, prisonnière de la pression des dents. Et puis les jambes se disjoignent, chaque orteil se dédouble, gratte le drap comme une argile. A chaque articulation jaillissent des contacts, d'agiles ramifications. Les bras deviennent légers et nageurs : il tombe mollement des pluies de bras dans l'espace.
Quant aux antennes elles me montent de droite et de gauche, impalpables, pêchant dans l'air, inlassablement sensibles aux odeurs du sexe et de la nuit.
Claudine Chonez, Les verrous ambigus
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