Partager la publication "[Critique] YESTERDAY"
Titre original : Yesterday
Note:Origine : Grande-Bretagne
Réalisateur : Danny Boyle
Distribution : Himesh Patel, Lily James, Joel Fry, Akte McKinnon, Ed Sheeran, Lamorne Morris, James Corden, Alexander Arnold…
Genre : Comédie/Drame
Date de sortie : 3 juillet 2019
Le Pitch :
Jack, un musicien doué mais ignoré de tous, enchaîne les concerts où il ne joue que devant quelques personnes. Un jour, après s’être fait renversé par un bus durant une mystérieuse coupure d’électricité générale, Jack se réveille dans un monde qui semble avoir totalement oublié l’existence des Beatles. Au départ incrédule, il s’aperçoit rapidement que dans sa nouvelle réalité, le groupe n’a carrément jamais existé. Il décide alors de s’approprier ses chansons…
La Critique de Yesterday :
Si en dehors de la France personne ne fera probablement jamais le rapprochement, il nous est impossible de ne pas penser à Jean-Philippe devant Yesterday. Dans Jean-Philippe, Fabrice Luchini se réveillait dans un monde sans Johnny Hallyday alors que dans le film de Danny Boyle, ce sont les Beatles qui ont disparu du paysage. Là où les deux œuvres se différencient, c’est dans le traitement de leur pitch similaire : quand dans Jean-Philippe, le personnage principal fait tout pour retrouver Johnny pour l’extraire de son anonymat et le faire devenir l’icône qu’il a toujours connue et appréciée, dans Yesterday, Himesh Patel décide de lui-même devenir une sorte de Beatles 4 en 1 afin peut-être de voir sa carrière de musicien décoller. Difficile de savoir si le scénariste Richard Curtis a vu Jean-Philippe pour ensuite s’en inspirer. Une chose est sûre : celui auquel on doit Love Actually ou encore Good Morning England a parfaitement su exploiter ce pitch délirant pour lui imprimer sa sensibilité. Quitte à peut-être se heurter avec Danny Boyle, qui pour sa part réalise. Car au fond, si Yesterday a un soucis, c’est sans aucun doute celui-là : il s’agit davantage d’un film de Richard Curtis mais la présence de Danny Boyle l’empêche totalement de s’épanouir en tant que tel. Quoi qu’il en soit, on est en face d’un petit bijou du cinéma britannique et c’est bien cela qu’il faut retenir…
Let it be…
Richard Curtis utilise ici l’élément fantastique discret au centre du film de le même façon que dans son chef-d’œuvre Il était temps. L’absence des Beatles dans le nouvel univers de Jack servant de catalyseur à une foule de thèmes relatifs à l’accomplissement de soi, au désir de s’affirmer, d’être reconnu mais surtout peut-être de trouver sa place. Dans le paysage musical de son époque mais aussi et tout spécialement dans le cœur d’une fille sans laquelle la vie n’aurait pas la même saveur. De son côté, Danny Boyle insuffle du rythme à l’entreprise mais a quand même un peu de mal à s’imposer. Ce qui dérangera probablement les fans du cinéaste mais pas vraiment ceux qui vont se laisser porter par cette formidable histoire littéralement habitée par les chansons des Quatre Garçons dans le vent. Car il y a bien une chose qui ressort de Yesterday, c’est cet amour inconditionnel des Beatles. Tout du long, Yesterday traite en filigrane de l’impact qu’on pu avoir et qu’ont toujours les chansons du groupe britannique. Leur pouvoir sur les gens et leur capacité à fédérer au-delà des frontières, des classes sociales et des époques. Conte de fée moderne rock and roll et enlevé, Yesterday est ainsi une remarquable déclaration d’amour à ces chansons universelles qui servent de bande-sonore à tant de personnes à travers le globe.
All my troubles seemed so far away…
Dans le rôle principal, l’excellent Himesh Patel parvient à incarner toute la sensibilité du long-métrage. Sa performance répondant à celle de la toujours impeccable Lily James, elle aussi parfaitement à sa place. Et c’est alors que les choses s’emballent pour ce galérien de la musique embarqué dans la spirale de gloire que le film dévoile ses véritables atouts et parvient à provoquer l’émergence d’une émotion indissociable de celle contenue dans les paroles et la musique des Beatles. Farci de savoureux clins d’œil et autres petits détails amusants, le film de Danny Boyle et Richard Curtis fait aussi preuve d’une véritable bienveillance, allant à l’encontre des productions trop cyniques en retrouvant une sorte d’essence propice à l’installation d’une atmosphère dans laquelle on se sent bien. Autrement dit, il est aisé et agréable de se laisser transporter. On ne voit pas passer le temps devant ce spectacle aussi enthousiasmant formellement parlant que sur un plan purement narratif, prenant pied entre la grisaille d’une petite station balnéaire de l’Angleterre, et le faste chatoyant et artificiel des luxueuses demeures et autres onéreux studios de Los Angeles. Parcouru de véritables morceaux de bravoure, enchanteur et attachant au possible, Yesterday, s’il saura avant tout toucher en plein cœur les fans des Beatles (le passage à Liverpool est en cela formidable) fait aussi le maximum pour aller au-delà. Avec beaucoup de bienveillance, malgré sa condition d’œuvre un peu tiraillée et quelques menus travers (le rôle caricatural de Kate McKinnon par exemple), Yesterday arrive à s’élever, propulsé par sa sincérité et sa bande-son. Réorchestrant brillamment les chansons qu’il exploite, il adopte également une structure parfois un peu prévisible mais le fait bien .Rudement bien même. Avec générosité et sans perdre de vue l’essentiel.
En Bref…
Yesterday est plus un film de Richard Curtis que l’œuvre de Danny Boyle. Ce qui n’est pas vraiment un problème tant le film fonctionne à plein régime du début à la fin, habité par les merveilleuses chansons et cet amour de la musique qu’il utilise pour donner de l’ampleur à son discours et construire une émotion tangible. Une véritable parenthèse enchantée rock and roll de laquelle on ressort avec un grand sourire figé sur le visage.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Universal Pictures International France