Magazine Humeur
D AUTRES PHOTOS, PLUS TARD _ MERCI
Le soir du lundi 24 juin, à Zagreb, nous avons tenté vainement de nous installer sur les rives du réputé lac de Jarun, mais il était réservé ce soir-là à une fête. Le lendemain nous avons pris la route en direction de Vukovar. Les autoroutes semblent être gratuites, mais nous ne les empruntons pas pour autant. Nous avons traversé beaucoup de villages aux maisons nombreuses abandonnées ou mal entretenues. Nous sommes au nord de la Croatie. Nous sommes passés à 16 km du village frontalier avec la Hongrie, Terezino Polji, où sont probablement installés les gigantesques barbelés-murs hongrois de la honte qui font office de frontière. La route est droite comme dans le grand sud algérien. Sur la gauche, tous les champs sont cultivés, sur la droite, ils sont en jachère. Elle alterne avec la culture du maïs, blé, tournesols. La chaleur était étouffante accompagnant un soleil de plomb. Dans les villages nous n’avons rencontré nulle âme. Nous avons traversé Donji Maljani, village frontalier, où plusieurs maisons arboraient des drapeaux croates, grands, larges, petits… Peut-être que leurs propriétaires sont contaminés par le nationalisme hongrois voisin, à moins que cela ne soit une revendication en réaction contre ces derniers et en lien avec l’histoire régionale récente. Nous sommes arrivés à Vukovar où nous nous sommes installés près d’un étang infesté de moustiques, mais agréablement enveloppé par un parfum fort prégnant dégagé par toutes sortes de plantes. On se croirait chez un parfumeur de Grasse. Nous nous sommes en fait installés près d’un aérodrome où nous avons eu droit à un festival de voltige sympathique.
Le lendemain, mercredi, nous avons commencé par le centre d’information de la ville, l’international et fameux « i », où l’accueil a été formidable.Ses bureaux sont logés dans une maison à un étage dont la façade est demeurée volontairement telle qu’elle était au lendemain d’une attaque à l’arme lourde serbe : complètement criblée. Nous avons visité le musée municipal (Gradski muzej), intégré au palais Vokaeltz, lui aussi ravagé par les bombardements. Les différentes salles racontent le passé de la ville, de la préhistoire jusqu’à la guerre de la décennie 90. Nous sommes ensuite allés à la grande croix posée au confluent de la rivière Rijeka Vuka et du Danube, pas très bleu. Cette croix blanche, une dizaine de mètres de haut, est dédiée à tous les martyrs de la Croatie. Un petit tour à la Biblioteka nous a permis de mettre à jour nos infos. L’après-midi nous nous sommes rendus au mémorial du cimetière. Il se situe au sud-est de la ville, sur la route d’Ilok. Un millier de croix blanches sont érigées à la mémoire des Croates (civils et combattants) de Vukovar. Nous y avons renconté deux charmantes québécoises, Zian et Micheline, qui sont ici depuis quelques jours. Elles ont traversé la Roumanie, la Bosnie et là elles continueront vers Zagreb et la Slovénie. Elles aiment bien la France, mais elles s’interrogent sur Marseille : « Il y a des gangs ? » À notre tour nous leur avons dit tout le bien que l’on pense des Canadiens en général, notamment ceux que nous avons rencontrés il y a quelques années à Québec, à Montréal, Ottawa et surtout ceux des Territoires du nord Ouest (Yellowknife, bonjour Marie, Marc et Carrie…) et du Yukon ! L’hôpital dont nous souhaitions visiter l’exposition en hommage aux blessés de guerre achevés à Ovcara, était fermé. En fin de journée, une voiture officielle est passée dans les rues du quartier où nous étions stationnés en aspergeant allègrement l’environnement d’un produit dont nous osons espérer que du bien – nous osons seulement, mais n’en sommes pas si sûrs. Peut-être est-ce un anti nuisibles comme les moustiques ?
Le jeudi 27 au matin, nous sommes allés au Mémorial d’Ovcara, cité plus haut, à cinq km au sud-est de Vukovar. « Là, au beau milieu des champs on exhuma 200 cadavres, des blessés de l’hôpital de Vukovar, abattu par les Serbes en 1991 » (Géoguide Croatie). La grande simplicité des lieux les charge d’une forte émotion. Les employés du site nous ont dit que cette tragédie fait partie du passé, mais il ne faut pas l’oublier. Les relations avec les Serbes sont globalement correctes. 500 mètres plus loin, nous avons observé le silence devant le lieu où des officiers et paramilitaires serbes ont exécuté sous la torture des dizaines de Croates qu’ils ont ensevelis dans une fosse commune. Aujourd’hui, une stèle y est érigée.
Peu avant Ilok, des champs infinis de tournesols, maïs et vignes saturent le paysage. La ville d’Ilok elle même est une petite bourgade sympathique. Nous avons visité ce qui reste de la forteresse médiévale « qui surveille le Danube ». Sur les remparts qui enserrent la ville, un mausolée ottoman datant du 16° ou 17° siècle côtoie des bains turcs. Plus loin, il y a aussi un parc, une église, et une belle vue sur le Danube.
La frontière serbo-croate est matérialisée par un pont sur le fleuve (qui fut) majestueux, peu avant la ville Serbe de Backa Palanka. Sur ce pont, des dizaines de camions attendaient pour franchir la douane. Nous l’avons passée sans encombre. Nos premiers constats : les panneaux routiers et autres (publicité…) sont écrits en deux types de caractères, Cyrilliques serbes (Azbuka) et latins. Nous sommes arrivés à Novi Sad, dans un bel endroit avec de nombreux et fort agréables cabanons, les pieds dans l’eau (bleue ?) du fleuve. Nous avons dû renoncer à nous y installer, faute d’espace aménagé. Nous optons pour Sremski Karlovci à huit km au nord du centre-ville, dans un espace verdoyant de cinq hectares, boisé, avec jeux pour enfants… Les propriétaires nous invitent à y demeurer sans contrepartie. Avec l’une d’eux, Birgit, une Allemande, parlant même le français, nous avons beaucoup échangé…
Le vendredi 28 nous sommes allés au très beau centre-ville de Novi Sad et Petrovaradin qui la jouxte, avec sa forteresse qui domine Novi Sad et le Danube. Des ouvriers démontent ce qui reste des estrades où a eu lieu un festival de musique. Des jeunes de l’Isère qui remontent vers la France, venant de la Grèce, l’Adriatique… nous ont communiqué le nom d’une application qui permet de prendre connaissance des lieux possibles « d’hébergement » gratuits (aires…) Nous sommes partis vers Belgrade (70 km) où nous arrivons en milieu d’après-midi.
Hier, samedi nous avons visité la blanche (Béo) ville (Grad). La ville n’est pas blanche, mais fort agréable, comme ses habitants (je dirais même un peu plus que les Croates, au vu de notre court séjour qui ne vaut que par cela). Dans les cafés et bars on s’y exprime en dinars… comme en Algérie, comme en Tunisie, comme en Jordanie etc. Mais son change est de 115 pour un € (le double en Algérie ). Son histoire est lourde de plus de 7 000 ans ! « Pleure ville blanche, le noir de tes deuils » (Cyrille ou Constantin le Philosophe). Belgrade a été romaine, byzantine, hongroise, ottomane puis capitale de la Serbie (et de l’ex Yougoslavie). Une ville carrefour entre l’orient et l’Occident, « chantée » par Hugo et Lamartine…
Nous avons visité le centre ville, la rue piétonne et l’Institut français qui s’y trouve. Nous n’avons pu y passer que très peu de temps, car normalement il est fermé et puis… on n’y parle pas le français ! (enfin si, une prof qui passait par là…)
Nous sommes également allés à la forteresse avec la statue de Victor, la statue hommage à la France (et emblème de Belgrade, le mausolée ottoman de Damat Ali Pasha(1667- 1716), le Parlement sur la façade duquel il est écrit sur une immense banderole, accompagnée de nombreuses photos :
« kidnapped and murdered serbians civilians by the Albanian UCK Terrorists », ainsi que le temple orthodoxe Saint Marc (Crkva Svetog Marka)… En face, sur le boulevard mitoyen, se déroulait une manifestation religieuse, bon enfant.
Un bon jus et puis … à bientôt.