Les biopsies liquides, des échantillons de fluides ou liquides des patients, provenant du sang, de l'urine, de la salive ou du LCR offrent le moyen de détecter ou surveiller la maladie de manière moins invasive que les biopsies tissulaires. Leur potentiel considérable trouve un nouvel écho avec ces travaux de la Michigan Medicine qui, grâce à une nouvelle approche, parviennent à rendre l'invisible visible.
Cette nouvelle technique de séquençage de l'ARN révèle des milliers de fragments d'ARN auparavant inaccessibles dans le plasma sanguin, qui vont servir de biomarqueurs spécifiques à une maladie ou à un organe.
Des milliers de biomarqueurs en puissance pour de multiples applications cliniques possibles
L’équipe de l’Université du Michigan, menée par le Dr Muneesh Tewari (visuels) a mis au point cette nouvelle méthode permettant de « lever » les empreintes génétiques de minuscules fragments d’ARN trouvés dans le plasma sanguin- qui ne sont pas détectés avec les méthodes traditionnelles de séquençage d’ARN. Ces ARN messagers et ces longs ARN non codants peuvent fournir des indices importants sur l'activité des gènes dans tout le corps, y compris sur des gènes actifs dans certains organes ou associés à certaines maladies, comme le cancer. Ce sont donc des biomarqueurs en puissance, et pour une multitude de conditions.
Par exemple, dans le cancer, cette approche pourra détecter les premiers signes d'effets secondaires auto-immunes en réponse aux immunothérapies, explique le Dr Muneesh Tewari : « Il existe également un potentiel considérable de détection précoce du cancer, avec cette nouvelle technique, car elle permet d’identifier de longs ARN non codants assez spécifiques à certains types de cancer ».
Rendre visible l’invisible : la véritable innovation est d’être en mesure de reconnaître ces autres types d'ARN jusque-là « oubliés » car ils présentent des spécificités critiques les empêchant de figurer dans les résultats du séquençage du plasma sanguin. Mais les chercheurs ont eu l’idée d’utiliser une enzyme qui se lie aux extrémités de ces fragments d’ARN et leur permet ainsi d’apparaître dans le séquençage. Une idée décrite comme « relativement simple » mais qui a permis de révéler des milliers de transcriptions de gènes supplémentaires dans le sang. L’approche décrite est en réalité l'aboutissement de plus de 10 années de recherche sur la détection des microARNs de tumeurs dans le plasma sanguin. Jusque-là, cette forme de biopsie liquide n'était pas capable de détecter des types d'ARN plus répandus et spécifiques à un organe, souvent trouvés sous forme fragmentaire.
Supprimer les faux positifs : la seconde innovation consiste à pouvoir trier de manière fiable le flot de données de séquençage afin de filtrer les faux positifs et d’assurer un résultat précis. Car lorsque les séquences sont vraiment courtes, elles peuvent correspondre par hasard à plusieurs endroits du génome humain et il est difficile de dire de quel gène elles proviennent vraiment.
La méthode testée sur des échantillons de plasma prélevés chaque semaine sur 2 patients ayant subi une greffe de moelle osseuse à l’Université du Michigan a permis aux chercheurs de suivre pas à pas la reconstitution de la moelle osseuse après la greffe, ainsi que les modifications de l'ARN plasmatique sanguin indiquant une lésion du foie.
Au-delà de cette lecture désormais possible de milliers de nouveaux biomarqueurs jusque-là invisibles, ces travaux soulèvent une nouvelle question scientifique : « maintenant que nous savons que des milliers de ces ARN circulent dans le sang, nous devons nous interroger sur la raison de leur présence et leur fonction éventuelle ».
Source: EMBO Journal 3 May, 2019 DOI 10.15252/embj.2019101695 Phospho‐RNA‐seq: a modified small RNA‐seq method that reveals circulating mRNA and lncRNA fragments as potential biomarkers in human plasma (Visuel “Dr. Muneesh Tewari, M.D., Ph.D., in his lab” @Joseph Xu, U-M College of Engineering)
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Équipe de rédaction Santélog Juin 28, 2019Rédaction Santé log