Parce que le texte a disparu
dans la nuit de son blues
Parce que la porte a disparu
son espace comblé par un mur
Parce que Patti Smith
entre à sa place dans ma tête de l’Enfant-
Crâne par la porte des éléphants
passé le jardin zoologique qui pachyderme
dans ma cage à l’aire thoracique
mon sol se dresse armé de ma seule solide structure
Patti Smith me structure en soufflant sa clarinette dos à terre
après avoir secoué goulot sec ma boîte pleine
de métaphores allongées
—Ah son Howl d’Allen Ginsberg !
Le rythme beat me vertige sur la route mon stylographe
gratte le son riff sur la plage
d’insomnie de mes piétinements graphomanes
Émerge du brouillard américain
des totems, des bisons d’Europe déboulés de Berlin
J’ai irrésistiblement faim d’un texte magique
J’ai irrésistiblement envie d’un tournedos sauce morilles,
d’un Jésus lyonnais ou d’une entrecôte sauce saint-Marcellin
Ma plume Plumix gratte la pollution
dans une extinction
de voix qui se transcende
sur son chemin d’encre
Ma plume Plumix gratte la pollution
qui nous taxe qui nous entrave
sa danse du scalp gratte jusqu’à ce que la porte ait disparu
jusqu’à ce que le texte ait disparu
La pollution du nord-est se met à chanter
un air germanique dans un ciel de charbon
hydrophile le monde est un coton noir
dehors, poumons de cendre côté cour
intérieure, le monde tourne
ma peau le retourne, je tournoie dans un déraillement sans fin
serrant ses éclisses en éclats de soleil
comme ma bouche d’ombre serre
les fesses pour ne pas lâcher prise
« Alibi » on chien bleu
de Picardie mange dans la paume de mes larmes
les restes de gourmandise d’une mauvaise conscience
../..
allumée le soir quand les francs contours
de la blanche lumière déclinent
Ma fatigue s’évalue au visage fripé
de ma pomme. Le texte renaît après l’amour
je le sens, le hume, je le renifle
ne m’en pourlèche pas les babines
mais le prends à pleine tête
Je suis une sorte de chienne peut-être
me lèche les blessures
comme pour retrousser mes manches
libre aux entournures
Parce que le texte a disparu
dans la nuit de son blues,
la porte,
son espace comblé par un mur
je décide de reconquérir l’aventure
mon stylo grattant le son d’une guitare dans mon jus
le sang d’encre de mes tripes
Quelque chose de la folie
guette où s’ajustent les élytres
du Cerveau-Cigale de l’Enfant-
Crâne l’univers gratte un fresh air
le soleil une légère brise
caresse ma nuque
Le rêve a l’air marin
il amorce sa tournée
un train en avance sur l’été prochain
Dévotion en main Devotion en flammes
Patti Smith m’entraîne sous son manteau noir
un cadeau d’anniversaire
Le monde bruit d’une cascade de prières
Une frise de wagons liseré de ma boîte noire
m’embarque m’enroule m’enveloppe
La « cent-tonnes » de Cendrars cette fois m’emporte
Paris-Bâle-Tambouctou Paris-Bâle-Tambouctou Paris-Bâle-Tambouc…………..
***
Murielle Compère-Demarcy (née en 1968 à Villiers-le-Bel) – Poème inédit
Son blog : Poésie en relectures
Parutions récentes (2018-2019) :
– « L’Oiseau invisible du Temps » aux éditions Henry, coll. « La Main aux poètes »
– « Alchimiste du soleil pulvérisé – Poème pour Antonin Artaud » aux éditions Z4, coll. « La diagonale de l’écrivain »
– « Fenêtre ouverte sur la poésie de Luc Vidal » aux éditions du Petit Véhicule, coll. « La Galerie de l’Or du Temps »
– « Dans les landes de Hurle-Lyre » (à paraître en novembre 2019) aux éditions Tarmac