Être heureux est l'objectif premier du plus grand nombre. Choisir la bonne personne, le bon travail, la bonne maison, la bonne ville de résidence, avoir une situation financière confortable, des enfants beaux, intelligents et en bonne santé, une famille attentionnée et bienveillante, des amis sur qui compter, etc. Quelle pression !
Pourtant, le bonheur a tendance à faire peur. À me faire peur. Pas que ma vie soit parfaitement idyllique, loin de là. Mais force est de constater qu'elle se rapproche de plus en plus de mes envies. Il faut dire que je partais de loin. Le bonheur et moi avons longtemps été fâchés. Jusqu'à une bonne vingtaine d'années, j'avais la conviction de ne pas être faite pour ça. Je rangeais les gens dans deux groupes : ceux faits pour le bonheur et les autres. Forcément, je me classais dans la seconde catégorie.
J'ai longtemps été triste. Profondément triste. À 10 ans, à 15 ans, à 20 ans. Triste au point de me demander quel était le sens de tout cela. Et puis, j'ai grandi, j'ai rencontré mon premier mari ( ça fait la nana dans Dynastie qui aurait été mariée 5 fois ^^), eu mon premier enfant... Une véritable révélation. Un électrochoc. Mais la vie n'a pas été spécialement tendre. Un peu comme tout le monde, on vit tous des moments difficiles, des épreuves, à se répéter que "ce qui ne te tue pas te rend plus fort", mais te fragilise quand même sérieusement.
Alors que j'étais jeune mariée et maman, j'aurais pu vivre un bonheur intense... Mais les choses ne se sont pas passées comme prévu. Une spirale de merde ( oui il n'y a pas d'autres mots) a pointé le bout de son nez. Mon couple a commencé à sentir le roussi, une des personnes que j'aime le plus au monde est tombée gravement malade, j'ai arrêté mon emploi, goûté aux joies du chômage et de Pôle Emploi... Puis la séparation s'est révélée inéluctable, j'ai vécu un licenciement économique (décidément !), connu des ennuis de santé, je me suis retrouvée seule avec mon fils de moins de 3 ans, etc. On pourrait se dire "ah oui quand même !". Mais loin de moi l'idée de vous jouer un remake de Cosette, je ne suis pas à plaindre.
Mais de toute cette merde, sont nées de si belles choses. Toujours se répéter que rien n'arrive par hasard. J'ai rencontré Mathieu qui est un homme au-delà de mes espérances. Un comme je rêvais. Un en qui j'ai confiance, sur qui je peux compter et qui me soutiens. J'ai eu la chance d'avoir un deuxième enfant... Et je mesure à chaque instant l'immense privilège d'avoir pu donner la vie une seconde fois. Je suis devenue freelance, j'ai créé mon agence de communication spécialisée en littérature, j'ai vendu mon appartement, j'ai acheté une maison près de Nantes. Comment ne pas être heureuse ?
Alors oui le bonheur me fait peur... Peut-être que je ne suis pas habituée.... Peut-être que j'ai l'impression de ne pas mériter autant... Peut-être est-ce nos croyances limitantes qui nous donnent l'impression qu'on ne peut pas tout avoir... Comme si on ne pouvait pas être heureux en couple, dans son job, dans son quotidien. Comme s'il fallait toujours qu'un domaine soit merdique.
Tout n'est pas parfait. Il y a des hauts et des bas, des moments de doutes, des disputes, des remises en question, des mauvaises nouvelles qui font chier... Mais l'essentiel est ailleurs. L'essentiel est d'avoir ses proches près de soi, en bonne santé, de faire ce qu'on aime, de prendre nos propres décisions, de ne pas subir un quotidien qui nous déplaît.
Quant "tout va bien", je ne peux pas m'empêcher d'avoir peur et de me demander ce qui va me tomber sur le coin de la gueule. Difficile de profiter à fond du moment présent.
Quand des choses moins sympathiques se profilent, je ne peux pas m'empêcher d'être rassurée. "Ouf tout ne va pas bien !"
Le paradoxe d'un esprit complexe et compliqué ^^