Ce fut long, ce fut rude, mais nous y sommes à peu près parvenu : l’imprévisible a été courageusement repoussé hors de France et depuis, tout se déroule exactement comme prévu. C’est-à-dire mal.
Il y a de cela quelques années, on voyait déjà monter, comme une mayonnaise aussi onctueuse qu’épaisse, la nécessité d’une grosse loi joufflue pour insérer un peu plus l’État, ses normes, obligations, contraintes et autres taxations dans le domaine de l’alimentation, pourtant déjà bien investi par lui auparavant : l’interventionnisme étatique a ceci de particulier qu’il se croit autorisé à intervenir d’autant plus qu’il est déjà dans la place.
À l’époque, je notais dans un billet facepalmogène les efforts consternants du petit Guillaume Garot, alors sous-fifre d’un pitoyable gouvernement hollandiste, pour pousser le marché alimentaire dans ses derniers retranchements. L’empilement d’âneries qu’il proposait fut globalement dilué par les années et les détours parlementaires habituels, mais petit-à-petit, des effets pervers pointaient le bout du nez et la lutte contre le gaspillage, l’objectif d’affichage initial, aboutissait à un échec parfaitement calculable.
Dans la foulée, et sans doute pour célébrer ce merdoiement tranquille avec un faste ostentatoire et passer à la vitesse supérieure, le gouvernement suivant, macroniste cette fois (différence cosmétique), se lança dans l’écriture, le vote puis la mise en application d’une Loi Alimentation dont tout indiquait, dès le départ, qu’elle serait bien évidemment une catastrophe pour le secteur agro-alimentaire, pour les enseignes de distribution et les agriculteurs.
Devant les soucis qu’elle posait dès le départ, il fut rapidement décidé de la jouer à quitte ou double en remettant une épaisse couche d’âneries aux strates déjà nombreuses empilées jusqu’alors.
De façon assez peu stupéfiante, quelques mois plus tard, des effets pervers furent rapidement constatés : grâce à l’effort conjugués des imbéciles législateurs et des abrutis administratifs, des milliers de produits virent leur prix augmenter de 1 à 10% en grande surface.
Pour l’observateur extérieur, tout se passe exactement comme si le peuple français, trop joyeux de vivre dans une opulence relative, s’infligeait régulièrement pénitence en se coltinant la plus belle brochette d’idiots destructeurs à leur tête, dont le but quasi-avoué lors des campagnes électorales consiste à diminuer le pouvoir d’achat de tout le monde et d’en appauvrir le maximum.
Force est de constater que pour le moment, carton plein, c’est une réussite !
Quelques mois se sont écoulés depuis ces constats de merdoiement intense. C’est le moment que choisit le Sénat pour aboutir à ses conclusions : ahurissement total, la Loi Alimentation serait bourrée d’effets pervers !
Eh oui : comme prévu, l’encadrement des promotions (rappelez-vous, le vilain Nutella vendu trop peu cher) se révèle catastrophique pour tout le secteur. Certains élus, les yeux humides devant le constat, expliquent leur désarroi dans une voix chevrotante d’émotion :
« Il faut de toute urgence assouplir l’ordonnance sur ce point car certaines PME ne passeront pas le cap des deux années d’expérimentation prévues par la loi »
La promotion, c’est mal, mais quand une entreprise réalise 50% de son chiffre d’affaires grâce à elle, l’interdire revient à signer son arrêt de mort. Bien joué les gars et merci pour votre coup de pelle derrière la nuque. Pour certaines entreprises vendant des fruits et légumes, les promotions sont vitales au moment des surproductions. Sucrez les promotions, vous tuez ces entreprises. Merci la députaillerie, vous nous avez bien aidé !
Mieux encore (et toujours comme prévu), il apparaît que l’autre mesure phare de cette loi ridicule, à savoir la hausse de 10 % du seuil de revente à perte (SRP), obtient des résultats … maigrichons : en lieu et place des 650 millions d’euros que la mesure auraient dû permettre de récolter suite à cette hausse des prix, on se retrouve avec un petit 300 millions très sujet à débat. Les sommes récoltées, au départ destinées aux entreprises et aux agriculteurs concernés, semblent bizarrement n’être jamais arrivées à destination.
C’est ballot.
Enfin, pas pour tout le monde puisqu’il semble que le grand gagnant de ces hausses soit… l’État (oh, mais quelle surprise !) au travers des hausses conséquentes de TVA que ces nouveaux prix ont entraînées.
L’idée de départ, qui consistait à lutter contre les guerres des prix et autres opérations commerciales agressives entre enseignes, peut bien évidemment passer complètement à la trappe puisque les guerres et les opérations se poursuivent exactement comme avant.
Autrement dit, dès le départ, on savait que ces empilements législatifs aboutiraient, tous, à accroître la misère globale au lieu d’augmenter le bien-être des agriculteurs, créer de l’emploi ou calmer les ardeurs malsaines des consommateurs. On savait qu’aucune des « solutions » apportées ne résoudrait les « problèmes » analysés. On savait que ce serait un fiasco. En somme, cette initiative destinée à apporter la misère et les emmerdements massifs à une part croissante de la population se retrouve magnifiquement couronnée de succès !
Ces exercices législatifs affligeants sont maintenant une habitude en République Socialiste du Bisounoursland Démocratique Populaire. Plus rien ne semble pouvoir arrêter l’appareil législatif devenu complètement fou : on sait dès le départ que le problème a été analysé de travers (si tant est qu’il existe en premier lieu), on sait que les solutions proposées n’en sont pas, qu’elles vont provoquer des effets pervers. On le comprend dès les discussions parlementaires, dans les amendements, puis au moment du vote, puis de la mise en application.
Lors du bilan, ça ne rate pas : avec une ponctualité de coucou suisse, exactement comme prévu, le résultat est catastrophique.
Et que fait-on ? Mais on continue comme si de rien n’était, pardi ! La République est en marche, à fond les ballons, comme une locomotive folle sans freins ni chauffeur, et rien ne pourra plus l’arrêter !
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