L'homme et la paternité évoluent-ils de nos jours et de quelle manière ? S'agit-il d'une petite révolution ou d'une progression lente ? Petit tour d'horizon de chiffres et de tendances.
L'homme et la paternité, ou comment le masculin redresse la barre après des millénaires de désengagement. Car, c'est sûr, l'homme a du temps à rattraper ! En effet, depuis la préhistoire, jusqu'à il y a tout juste une cinquantaine d'années, l'homme vivait sa paternité dans un tout autre objectif que celui d'aujourd'hui.
L'ancien patriarcheAvant le raz de marée des revendications féministes dans les années 1970, qui rendent enfin possible l'égalité homme/femme, il y a eu la société patriarcale.
Un temps, pas si lointain, où l'homme exerçait une autorité exclusive dans le foyer conjugal, soumettant la femme à son pouvoir de décision, et lui imposant des rôles qu'elle n'était pas censée remettre en cause. Ainsi, en plus des nombreuses obligations ménagères, c'est à l'épouse que revenait entièrement la tâche de s'occuper des enfants.
Une ombre, au tableau de la relation amoureuse entre l'homme et la femme, que beaucoup d'hommes tentent de faire oublier, à travers de nouveaux comportements, de nouvelles manières de penser et de voir leur rôle, mais également leur place de père, au sein de la famille.
78% des parents interrogés considèrent que les pères sont plus affectueux. 81% des mères ressentent intensément ce changement.
Une enquête Ipsos pour Enfant Magazine en 2004, parlait d'une véritable " révolution " dans le comportement et les attitudes des hommes. Sans complexe, Ils s'affichent en public avec leur bébé qu'ils portent en kangourou, n'hésitent plus à changer les couches ou à donner le biberon.
Une image toute nouvelle de l'homme, amorçée par les " papa poule " des années 1980 et qui continue d'évoluer, montrant un changement important dans l'espace d'une génération. L'enquête révèle en effet que 78% des parents interrogés considèrent que les pères sont plus affectueux. 81% des mères ressentent intensément ce changement.
L'homme devient tendreUne transformation qui se traduit aussi par une baisse de sévérité : 54% des parents questionnés constatent que les papas sont moins autoritaires que ne l'étaient leurs propres pères. Les résultats de l'étude mettent également en évidence une belle évolution des hommes dans leur disponibilité et le partage des tâches quotidiennes. Un sentiment toutefois ressenti plus majoritairement par les hommes (90%) que par les femmes (81%).
Les hommes auraient donc appris à remplir des missions autrefois essentiellement réservées aux femmes. Accompagner son enfant à l'école, le consoler lorsqu'il est triste ou qu'il ne va pas bien, le câliner, le promener, le soigner...lui donner du temps et de la tendresse.
Une réalité dissonanteUne véritable progression donc avec toutefois ce léger bémol. Il y aurait comme un décalage entre les ressentis homme/femme. En effet, quand 65% des pères interrogés déclarent s'occuper de leur progéniture, se lever la nuit, quitter leur travail en cas d'imprévu pour leur enfant, seulement 37% des mères le confirment.
Et maintenant ?En 2017 une nouvelle enquête Ipsos révèle qu'être un bon parent est au cœur des préoccupations des hommes et des femmes. 93% des parents déclarent qu'être un bon parent représente le plus grand succès de leur vie.
Les pères et les mères partagent donc ensemble le même objectif. Mais partagent-ils pour autant la même énergie et le même investissement pour le réaliser ?
Dans une autre étude faite par Ipsos en 2018 " Les Français et le partage des tâches ménagères ", les résultats montrent que les hommes auraient tendance à surévaluer leurs efforts.
Pour 63% des hommes interrogés, les inégalités hommes/femmes concernant la répartition des tâches quotidiennes, appartiennent à un passé révolu ! Voyons concrètement comment cela se passe :
- Quand 32% des hommes déclarent faire les courses, seulement 14% des femmes le confirment.
- Quand 29% des hommes déclarent préparer les repas, seulement 18% des femmes le confirment.
- Quand 13% des hommes déclarent s'occuper des enfants, seulement 4% des femmes le confirment
Beaucoup de flou dans lequel il va falloir faire le ménage ! Des questions sur lesquelles les hommes et les femmes vont devoir être clairs.
Que se passe-t-il ? La révolution des nouveaux pères aurait-elle des freins invisibles ? Serait-elle plus une apparence qu'une réalité ? D'après l'enquête Ipsos, les hommes ont envie de transmettre à leurs enfants un modèle de répartition des tâches équilibré au sein du foyer. Ce modèle se concrétiserait-il plus par un discours que par des actes ?
Comment expliquer cette différence de ressentis entre les hommes et les femmes ?
L'homme et la paternité se chercheraient-ils ? Les pères ne seraient-ils pas encore vraiment sortis du schéma patriarcal traditionnel ? Les femmes demanderaient-elles toujours plus, occultant de ce fait les véritables progrès des hommes ? Les hommes, bien conscients de leur nouveau rôle ne seraient-ils pas encore dans l'incapacité de le mettre réellement en pratique ? Ont-ils besoin encore de temps pour apprendre ? Pour répondre aux demandes des femmes se donneraient-ils bonne conscience en se déclarant d'accord pour les aider ? Des paroles plus que des faits. Les femmes ne sauraient-elles pas encore suffisamment déléguer aux hommes, et donc pas encore prêtes à leur faire confiance pour ces tâches qu'elles réalisent si " naturellement " selon 43% des français ?
Pour quand la révolution des tâches ménagères ?Beaucoup de flou dans lequel il va falloir faire le ménage ! Des questions sur lesquelles les hommes et les femmes vont devoir être clairs. De son côté, le sociologue tranche la question en déclarant " Il y a 50 ans c'était mai 68, et la révolution des tâches ménagères n'a pas eu lieu. "
50 ans, c'est beaucoup à l'échelle de l'individu et très peu à l'échelle de l'humanité. Même si on aimerait que les choses aillent plus vite, reconnaissons que l'homme et la paternité ont vraiment avancé en quelques décennies.
Les hommes ont pris conscience de l'importance de s'impliquer dans la vie familiale, de se rapprocher de leurs enfants et de leur compagne. Ils assistent de plus en plus étroitement la grossesse de leur femme, jouent et parlent avec leur bébé quand il est encore dans le ventre de la mère, participent à l'accouchement, coupent le cordon ombilical (hautement symbolique pour le défusionnement mère/enfant), prennent leur bébé dans leurs bras, les cajolent, les sécurisent. Ils osent de plus en plus prendre leur place et sont partie prenante dans le développement de leur enfant, de sa santé et de son bien-être...
Partager la vie dans sa totalitéIl leur reste toutefois un progrès majeur à réaliser : sortir de leur ambiguïté définitivement, en acceptant et en pratiquant pleinement la notion de partage et d'égalité avec la femme. Devenir père n'est pas anodin, c'est partager son patrimoine génétique avec celui de sa partenaire. En toute logique il devrait pouvoir aussi partager équitablement la vie quotidienne avec elle.
Devenir père c'est apprendre à partager