Daniel Rondeau à l'Académie française

Par Pmalgachie @pmalgachie
Resserrons les rangs - les disparitions de François Weyergans et de Michel Serres, ces derniers jours, ont élargi les vides à l'Académie française où il faudra aussi remplacer Jean d'Ormesson, Simone Veil et Max Gallo. Au fauteuil de Michel Déon, ce sera donc Daniel Rondeau, que j'ai au fond peu lu (deux ou trois livres, pas davantage) mais que j'avais rencontré trente ans avant son élection d'aujourd'hui. Bien que cela ne nous rajeunisse pas, exhumons... Et, pour croiser un parcours qui ne fut pas seulement littéraire, j'y ajoute une note brève que un livre que lui a inspiré son poste d'ambassadeur à Malte, Malta Hanina.
Les tambours du monde (1989)
Un des romans les plus controversés de la rentrée, Les tambours du monde, n’est ni l’horreur à laquelle certains critiques ont voulu faire croire ni le chef-d’œuvre espéré. Mais un ouvrage ambitieux qui pose quelques questions fondamentales pour l’individu dans le monde actuel, sans aller tout à fait au bout de cette ambition. Quand Daniel Rondeau en parle, il commence par dire simplement : « Mon intention première était toute simple : je voulais raconter une histoire. » Oui, mais laquelle ? C’est là qu’apparaît l’enjeu réel de ce roman. « Je voulais mettre en scène la difficulté que peuvent éprouver certains jeunes hommes, certaines jeunes femmes à vivre dans une époque qui, à mon avis, ne leur donne ni possibilité d’engagement vrai ni convictions profondes. Le personnage principal, sur lequel pèse le poids de son père qui était un héros de l’aviation, va choisir la première opportunité. Elle lui vient par une femme, et c’est le terrorisme. Naturellement, le terrorisme, c’est le mensonge, la caricature de l’aventure… » Jean Lhomme est donc d’abord tombé amoureux d’une femme, Clawdia, qui l’a entraîné insensiblement vers le terrorisme. De la falsification de pièces d’identité à la mise sur pied d’un énorme attentat à Milan, l’évolution est rapide et amène Jean Lhomme à tremper dans le crime. Avec quelques réticences, cependant. Elles ne sont pas idéologiques mais tiennent davantage au rôle joué, dans l’organisation à laquelle il appartient, par Marco, un ancien amant de Clawdia. Et celle-ci semble avoir gardé avec lui des rapports trop intimes au goût de Jean Lhomme. La tranquille amoralité du personnage est, si l’on ose dire, exemplaire. « Il fait tout ça sans aucune idéologie. C’est simplement par goût de l’aventure, du danger, de la gloire, peut-être même de la gloire militaire, qu’il va partir dans cette histoire. » Puis, plus soudainement encore qu’il avait basculé d’un côté, il devient Louis Bonaventure, personnage tranquille pour qui le terrorisme n’est plus, sur son téléviseur, qu’un sujet d’actualité parmi d’autres. D’une certaine manière, sa vie se solde par un échec, d’une autre… « Il va payer pour ses crimes en traversant la vie quotidienne la plus banale, mais, en même temps, il le fait avec un certain orgueil. Il va s’accorder au monde, d’une façon générale. C’est naturellement une harmonie en mineur, une harmonie simple, mais qui, à mon avis, n’est pas sans vertus. » Œuvre de moraliste, par conséquent, ce roman que Daniel Rondeau a pris tranquillement le temps d’écrire, à un rythme très différent de ses articles de journaliste. Par ailleurs éditeur (Quai Voltaire), Daniel Rondeau n’a cependant pas compris le tir de barrage qui l’a accueilli en septembre. « On me prête un pouvoir immense, mais on s’est trompé. J’essaie d’écrire, j’ai l’intention de continuer. Les chiens aboient, la caravane passe… » Et, sur ces mots, Daniel Rondeau est parti en reportage à Beyrouth, histoire d’y avoir la paix…
Malta Hanina (2012)
Daniel Rondeau a été ambassadeur à Malte. Dans la grande tradition des diplomates écrivains, à moins que ce soit le contraire, il a fait de son séjour une mine d’informations. Au cœur de la Méditerranée, de l’Histoire passée et présente, l’île devient « l’aimée, la généreuse » (hanina). Rondeau se sert allègrement des rencontres et des anecdotes pour tisser un récit auquel une touche personnelle donne un ton à la fois érudit et léger. Plus besoin d’aller à Malte, nous y sommes avec lui.