Son activité l’amène à livrer épisodiquement des marchandises au Royaume-Uni. Dans le jargon, ces trajets sont appelés "voyages". "En un mois, nous pouvons effectuer sept ou huit transports vers l’Angleterre et ensuite, ne pas avoir de voyages pendant deux ou trois mois", confie Raphaël Paitier, le directeur de Blueroad. Les chargements contiennent du matériel industriel spécialisé, comme des groupes électrogènes ou des pièces d’aéronautique. "Rolls-Royce fait partie de nos clients", se félicite M. Paitier.
Les camions bleus et blancs aux couleurs de la société traversent la Manche à bord de ferries. Dans la réalité, ces voyages n’ont rien d’une partie de plaisir. "Sans le Brexit, le transport de marchandises vers la Grande Bretagne est déjà très particulier, explique le directeur. Notamment à cause des difficultés liées aux passagers clandestins." Lorsqu’un migrant est repéré agrippé à une semi-remorque par les autorités britanniques, la note est salée: "900 euros d’amende pour le transporteur et 900 euros pour le conducteur", poursuit Raphaël Paitier.
Pour les biens comme pour les personnes, l’épouvantail d’un Brexit sans accord sonnera le rétablissement des contrôles douaniers à la frontière. Immanquablement, ce contrôle renforcé des marchandises se traduira par d’interminables files d’attente et un temps allongé pour rallier le Royaume-Uni. En outre, il faudra prévoir des démarches administratives et douanières complémentaires avec, à la clé, une augmentation du tarif des prestations.
Mais M. Paitier préfère relativiser: "Concernant les difficultés liées au temps et aux coûts supplémentaires de transport, nous trouverons les solutions en négociant avec le client. Je crains plutôt qu’un Brexit brutal n’entraîne une chute de la livre sterling". Depuis le référendum de juin 2016, la monnaie britannique a déjà perdu 15% de sa valeur.
Selon le Fonds monétaire international (FMI), un Brexit sans accord provoquerait un "sévère choc économique". Le PIB britannique reculerait de 1,4% la première année. Celui de l’UE serait amputé de 0,2%. Raphaël Paitier pressent également cette contraction de l’économie: "La chute de la livre sterling va entraîner une baisse des flux de marchandises vers le territoire britannique. Inévitablement, les entreprises qui commercent avec le Royaume-Uni vont souffrir".
Pour l’instant, malgré les reports successifs, la perspective du Brexit n’a pas d’impact sur l’activité de Blueroad. "Je crois que tout le monde est dans l’expectative. Cette situation paraît irréelle", observe le dirigeant. De toute manière, les conséquences du Brexit pour le transporteur resteront marginales. "Si demain nos campagnes pour l’Angleterre cessaient, ce serait regrettable. Mais cet arrêt ne mettrait pas la société en péril, précise M. Paitier. Par contre, le marché britannique constitue 30 à 40% du chiffre d’affaires de certains confrères. Forcément, ils seront directement affectés".
En attendant, voici le sort de ces entreprises suspendu aux négociations qui se tiennent dans la sphère politique outre-Manche. Les députés de Westminster vont œuvrer pour aboutir à une sortie négociée de l’UE. Date limite des tractations: le 31 octobre… à moins d’un nouveau report.
Elle n’est pas forcément là où l’attendaient certains. Les premiers résultats des élections européennes tombent peu à peu pour ceux qui ont évidemment commencé à voter dès ce vendredi... ...Et les vainqueurs sont… les Travaillistes! Enfin, les...