New-York Trilogie, l'intégrale - la chronique urbaine

Publié le 29 mai 2019 par 7bd @7BD

Titre: New-York Trilogie Auteur : Will Eisner (scénario et dessin) Éditeur : Delcourt Collection : Comics Année : 2018 Page : 424

Résumé :

New-York. La grande ville. Avec ses fenêtres, ses murs, ses rues, ses grilles d'aération, son métro, ses immeubles... et ses habitants ! Au travers de la grande pomme, ce sont ses hommes et ses femmes que l'on suit le temps d'une minute ou d'une vie.

Mon avis :


Le scénario :

Will Eisner nous offre une plongée vertigineuse dans la grande ville au travers de trois BD, "la Ville", "L'immeuble" et "Les gens" réunies ici en une seule, baptisée "New-York Trilogie". Trois BD sur trois tons différents mais recoupant la même thématique.
La première partie, "La Ville", part de thèmes communs aux grandes villes: son métro, ses perrons, ses fenêtres et de nombreux autres. Pour chaque thème, Will Eisner explore au travers d'une courte saynète la vie qui gravite autour. Avec humour, tendresse, dureté, émotion, ce sont toute une galerie de situations, de portraits, d'être humains que l'on découvre. Et au travers eux, on perçoit aussi comment la ville influence les gens. Un carnet de croquis, bien plus poussé qu'un simple carnet de croquis d'ailleurs, puisque l'auteur s'y met en scène en train de représenter les caractéristiques de la grande ville, à savoir selon lui le temps, l'espace, le rythme, conclut cette première partie.
La deuxième partie, "L'immeuble", met en scène la construction d'un nouvel immeuble. Et au travers lui, le destin de quatre vies qui lui sont liées. Là aussi, drame de la grande ville, autant chez des gens de petite condition que chez des gens riches, quatre parcours pour expliquer comment quatre fantômes attendent devant cet immeuble rutilant. Et un final tout en émotion.
La troisième partie, "Les gens", nous fait découvrir le parcours de différents personnages. Là aussi, parcours de vie ou bien moment fort. Aboutissant parfois à des situations tragiques, kafkaïennes, ces petits drames partant de faits insignifiants prennent des proportions dramatiques. Quand le quotidien ronge petit à petit jusqu'à aboutir à des conséquences incroyables.
Au travers de cette trilogie, c'est le talent de conteur de Will Eisner qui ressort. Certaines de ces histoires sont muettes et tout ressort juste avec le graphisme. D'autres sont parlantes et les dialogues font mouche au détour d'une phrase. Je ne peux que vous recommander de prendre votre temps, car la lecture ce l'ensemble de ces trois BD est assez conséquente. Savourer chaque tranche de vie, chaque récit, s'arrêter sur un dessin le temps de voir comment Will Eisner met en scène ses histoires, les poses qu'il choisit pour ses personnages, se révèle tout aussi passionnant que l'histoire en elle-même. Car il est bon de rappeler que Will est à l'origine de ce que l'on a appelé aux Etats-Unis "Graphic Novel", la BD qui n'est plus réservée uniquement aux enfants, mais qui touche les grandes personnes, au travers d'histoires fortes.
Comment l'auteur utilise et applique ses recommandations et conseils exposés dans les trois tomes de "l'Art séquentiel" est aussi un vrai régal. Un régal narratif et visuel...

Le dessin :

Car Will Eisner raconte autant par le récit que par l'image. Il déstructure les pages, joue sur la répétition, s'affranchit des cases, se permet toutes les libertés, tout en nous offrant des planches facilement lisibles et graphiquement fortes. Ayant passé des années à croquer ses contemporains, ses galeries de personnages sont touchantes. Regarder en trois dessins comment un homme emporté par le flot de la foule finit par en épouser le rythme et s'adapter est vraiment bien pensé.

Les techniques de dessin de Will sont aussi différentes d'un tome à l'autre de cette trilogie. D'abord lavis de gris, travail au pinceau puis fond hachuré avec un travail de trames manuelles. Discrètement, sans s'en rendre compte, on passe d'une technique à l'autre au travers des histoires. Et malgré ces modifications, on ne ressent jamais le sentiment de rupture.

Les différentes parties de ce recueil sont séparées par de beaux croquis crayonnés qui montrent déjà l'énorme précision du travail de Will Eisner. La seule trace de couleur réside dans la couverture. Mais quand on la regarde, on regrette presque que certaines histoires ne nous soient pas présentées en couleur. Force du noir et blanc dedans et magie d'un jour de soleil sur la couverture. Un ciel bleu vert et la vie de la grande ville au travers de cette foule bigarrée qui la composent. Leçon narrative autant que graphique.

Conclusion :

Ce recueil est indispensable pour tout amateur de BD, il vous fera découvrir le travail d'un des grands du neuvième art. Et en même temps, il vous fera ressentir la vision de Will Eisner de la grande ville mais surtout de sa ville, New-York. Une grande ville et ses habitants, peureux, lâches, amoureux, égoïstes, heureux, pinailleurs mais si touchants parce que tellement humains. Zéda le long de l'Immeuble.

David
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