ESPAGNE
Editions Tristram, 2008
Julian Rios est l'un des plus grands écrivains espagnols du siècle. A la fois salué par Octavio Paz ou Carlos Fuentes, l'Encyclopedia Britannica
le cite comme " étant sans doute la prose espagnole la plus tumultueusement originale du
siècle".
Il se pose comme l'héritier de Rabelais, Cervantès ou encore Laurence Sterne ou d'auteurs plus contemporains comme Joyce, Calvino ou Perec. Son écriture se construit à base de jeux de mots
et d'histoire à tiroirs. Ses derniers romans s'inspirent de textes littéraires mythiques tels Alice au pays des merveilles. Ainsi, dans Nouveaux chapeaux pour Alice, il imagine
que le lapin donne à chaque fois à Alice un chapeau différent, qui l'emmène dans les univers de Kafka, Melville, Tanizaki, Borgès....
Ici, avec Chez Ulysse, il nous fait revisiter le chef d'oeuvre des chefs d'oeuvre de Joyce, Ulysse; nous avons ainsi un livre sur un livre, qui s'inspire lui-même d'un livre
mythique L'odyssée d'Homère. On sait que les différents chapitres d'Ulysse, sont une parodie des chapitres de l'Odyssée. Rios reprend chaque chapitre en
imaginant une histoire lui permettant le commentaire du livre : nous voyageons dans le musée d'Ulysse en compagnie d'un guide et de trois visiteurs, une jeune étudiante, un vieux critique et un
homme au macintosh", surnommés A, B et C. Chacun va donner son point de vue sur tous les chapitres. A chaque fois, l'homme au macintoch nous fait un power point de son écran schématisant
l'interprétation du chapitre ! Car, nous apprenons qu'à chaque chapitre, correspond un organe, un art, un symbole, un décor, une couleur. Puis vient ensuite les commentaires personnels,
complémentaires ou contradictoires des trois personnages. Des commentaires sur l'Irlande, les liens homériques bien sûr, mais aussi les détails de la vie privée de Joyce lui-même. Car on sait que
pour Rios, Ecrire est "escrivivir" : la vie et l'écriture ne font qu'un.
Erudition mais aussi humour nous font rentrer admirablement et simplement dans un roman jugé très hermétique. On parle nourriture, urine et érection. Eh oui, qui taxe Joyce d'intellectualisme
profond se trompe !
Rios joue bien sûr sur les correspondance avec Homère mais aussi avec Hamlet et Faust. Un voyage original et réjouissant au pays de la littérature et des mots.
Moi qui avait stoppé il y a un an la lecture du roman de Joyce, je n'ai qu'une envie , m'y remettre ! L'idéal serait d'alterner les deux lectures pour ne pas de perdre dans l'univers joycien
!
En lien, la critique du Matricule des
anges.