Une cuisine propre sur elle mais relativement aseptisée.
Hors saison, comme souvent, le charme discret d’un village ou d’un port apparait sous un autre jour. Leucate et Port-Leucate sont un bon exemple. L’un, discret, paisible et agréable, l’autre plus venteux et plus sauvage, surtout sur la lande autour du phare dominant le village. Le restaurant, posé sur le promontoire telle une vigie, offre une vue sans pareille sur la mer et les méandres de la côte alentour. Le Grand Cap porte bien son nom.
A l’intérieur, protégé du vent pratiquement incessant dans ces régions, le décor est sobre, clair et lumineux avec ses grandes baies vitrées sur l’horizon. Inutile de gâcher un tel spectacle avec une décoration tapageuse.
Dans cet étoilé depuis quelques années, on vient de tout le département pour découvrir une cuisine de la mer affichée et revendiquée. Ils sont deux, Erwan Houssin au salé, Pamela, sa femme, au sucré. Il a démarré chez Franck Putelat à Carcassonne, puis au Meurice époque Alléno, et ont ouvert à Avignon une table rapidement étoilée.
La carte est courte avec trois choix dans chaque catégorie. Par contre, la carte des vins est particulièrement riche et pointue avec un choix des meilleurs vignerons, ou réputés tels, dans chaque appellation, associé à une importante sélection locale dans les grandes et petites appellations. Les prix sont à la hauteur de l’ambition…
Le Menu Déjeuner fait pratiquement l’unanimité parmi la nombreuse clientèle. Il faut dire qu’à 34 € les trois plats et les nombreux à-côtés c’est une aubaine pour découvrir la cuisine des deux chefs.
Dès l’amuse-bouche, on repassera pour les produits locaux et la pêche du coin. L’oursin, présenté en gelée, vient de Galice qui n’est pas la porte à côté. Il parait que ce sont les meilleurs. Dont acte.
Le thon rouge est de Méditerranée (ouf !), il est servi en tartare dit « retour d’Asie », yuzu et pomme granny, avocat crémeux, pamplemousse rose, jeunes pousses, et croustillant à l’encre de seiche. Ca se bouscule dans l’assiette et chacun veut tirer la couverture à lui. L’assiette est très mignonne vue de l’extérieur mais très froide à l’intérieur ce qui annihile les saveurs même si l’ensemble est de toute façon un peu neutre, sans tranchant.
La première assiette de cabillaud fut renvoyée car servie à peine tiède. Le plat est séduisant, bien construit mais très « pomadé ». On retrouve la tendance du chef vers le mou avec le poisson cuit à basse température au beurre fumé, premières asperges vertes, et la sauce envahissante qui finit par tourner à un léger écœurement, aidée par le choix du curcuma pour la parfumer. Une épice plus marquée (curry, safran) aurait peut-être rehaussé l’ensemble.
Amusant, enfantin, les fraises guariguettes, fin mars ce qui montre une absence de respect des saisons étonnante, sont avec un finger au Macademia et fève tonka, sorbet fraise, et champagne rosé. Kitsch à souhait.
La Poire Comice est très construite et une énième fois dans un ensemble mou et douceâtre.
Par contre, la Pana cotta au chocolat Glaucomalie est superbement parfumée et associée intelligemment à un granité cèleri/pommes vertes. Un beau choc de douceur et d’acidité.
En prime, d’excellentes mignardises.
Une cuisine finalement un peu décevante tant elle est imbriquée dans les modes et tics du moment. Des plats certes construits, parfois trop, mais qui pêchent par un manque de saveurs marquées qui se retrouvent tout au long du repas. Une cuisine propre sur elle mais relativement aseptisée.
11370 Leucate
Tél : 04 68 48 13 73
www.restaurant-grand-cap.fr
Fermé mardi, mercredi & dimanche soir
Menu Déjeuner (sauf samedi et dimanche) : 34 € (3 plats)
Menu L’Ecume : 55 € ( plats)
Menu Brise Marine : 75 € (4 plats)
Menu Embrun : 90 € (6 plats)
Carte : 79 € (minimum) – 122 € (maximum)