En 2016, le dictionnaire Oxford élisait le mot de "post-vérité", que beaucoup donnent pour synonyme de "fake news" ou d'"infox", mot de l'année, en raison de la résonance particulière qu'il trouvait dans la campagne électorale de Donald Trump aux États-Unis.
Historiquement, politique et propagande ont toujours marché main dans la main, de façon plus ou moins manifeste, selon les époques, et les objectifs des différentes formes de gouvernement. A l'heure des réseaux sociaux et de la diffusion continue d'informations, les acteurs politiques semblent parfois dépassés par la rapidité de transmission des faits, et la multiplication de fuites embarrassantes (affaire François Fillon, affaire Benalla, affaires des emplois présumés fictifs du Front national, etc.) déformées, amplifiées, ou parfois parfaitement inventées.
Il est donc important de ne pas abriter sous la même ombrelle le mot "fake news", et d’anciens usages de manipulation de masse, comme la propagande institutionnalisée et organisée de régimes totalitaires ou dictatoriaux.
La philosophe Myriam Revault d'Allonnes souligne une composante sociale propre à l'avènement de la post-vérité, à savoir « le régime d’indifférence à la vérité » dans lequel grenouilleraient nos sociétés, « une ère où au fond la vérité est devenue inessentielle, une zone grise où peu importe que l’on dise la vérité, ou que l’on mente. »
Par conséquent, l'infobésité et la prise de parole rendue possible par tout un chacun aurait favorisé en démocratie « le relativisme des opinions » qui « n'ont même plus besoin d'être étayées par des faits », valables uniquement parce qu'elles ont été formulées.
Ce phénomène est-il observable chez l'ensemble de la population ?
Pas exactement, non, parce que nous traversons époque de crise des partis politiques et de la représentativité citoyenne ainsi que de mutation des systèmes d'information et d'éducation.
Or certaines catégories sociales sortent davantage fragilisées de l'effondrement des grands repères traditionnels qu'étaient la gauche et la droite, par exemple. Ceci fait prospérer les idées populistes et les informations simplistes, erronées, en faveur des partis nationalistes.
Les classes populaires et moyennes seraient les plus perméables à l'infox, poussées par le sentiment d'être les grandes laissées-pour-compte de ces dernières décennies, aussi bien en France (crise des gilets jaunes) qu'au Royaume-Uni (divisé par le Brexit) et aux États-Unis (élections présidentielles sous haute tension en 2016.) Inquiètes, menacées de chute sociale, ces personnes voient vivre les élites de la City ou de Washington dans l'opulence et le business international, s'enfermant dans le ressentiment et la haine du système.
Michel Wieviorka, sociologue, propose l'analyse suivante : « le phénomène d’oubli ou d’indifférence vis à vis de ces classes populaire a une certaine épaisseur en France, qui remonte aux années 60-70. (...) Il a construit des logiques inquiétantes d‘entre-soi où les gens ont parfaitement confiance dans ce que dit leur propre milieu et ont une méfiance totale pour tout ce qui vient du côté adverse. » Il souligne par ailleurs que le partage de fake news au sein de communautés d'opinions pré-faites n'a jamais été aussi tangible que pendant les campagnes américaine de 2016 et du Brexit.
A l’œuvre derrière ces entreprises de désinformation, de puissants réseaux, aux motivations variables, se dessinent en filigrane. Elles surfent toutes sur l'explosion des plateformes de diffusion d'informations que son devenues Facebook, Twitter, Reddit, Quora, Whatsapp, Vero, etc., mais également sur la défiance rampante des citoyens vis-à-vis des médias.
En d'autres termes, les faits bruts n’existent pas, contrairement au récit qu'en fera la personne témoin du fait, lui donnant ainsi corps sous la forme d'une information.
On ne peut ici s'empêcher ici de penser à la responsabilité qui incombe aux médias de transmettre, mais surtout, d'analyser l'information. Ces 20 dernières années ont vu la privatisation de l'appareil médiatique public ainsi que l'apparition de chaînes diffusant des images sans interruption, désormais assimilées à de l'information, selon le procédé des "breakings news" et des "flashs infos" anglo-saxonnes.
Ce procédé sape le temps de réflexion nécessaire au traitement des faits et renforce le scepticisme des citoyens à l'égard des canaux de diffusion traditionnels. Les médias, privés comme publics en viennent à être assimilés à un prolongement servile et vendu aux hommes politiques.
En réalité, il a été prouvé au cours de plusieurs enquêtes judiciaires que des ingérences étrangères œuvraient à l'ombre de réseaux internet peu recommandables. C'est la conclusion que tire Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, lors de la conférence internationale dédiée aux médias et aux pouvoirs publics : g[ Animés par une vision cynique de l’espace numérique, ceux qui se livrent à ces manœuvres tentent de retourner contre nos démocraties les principes mêmes qui les fondent - l’ouverture, la liberté d’expression et d’information - à des fins d’ingérence et de déstabilisation. Le débat public s’est cristallisé autour de la notion de fausses nouvelles ou "fake news", (...) des phénomènes de nature différente, des motivations et des conséquences sans commune mesure les unes avec les autres. Une fausse nouvelle peut l’être pour différentes raisons : par accident, par inattention, par déformation progressive à mesure de sa diffusion et de sa reprise multiple qui la constitue en rumeur numérique. (..) Une fausse nouvelle peut aussi être émise à des fins malveillantes. Mais le cas le plus grave, c’est lorsque une fausse nouvelle entre comme partie d’une stratégie globale, une action à portée stratégique, visant à déstabiliser des institutions elles-mêmes, à travers le ciblage d’une population. g
Il est donc plus que nécessaire de s'assurer d'où provient l'info que l'on s'apprête à assimiler, partager et de se demander pourquoi elle nous est délivrée.
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