A La Coupole, rue Ste-Anne à Dijon exposent jusqu’au 18 mai Claire Vanvosthuyse, plasticienne photographe, et Eric Schenker, plasticien céramiste. 14-19h.
Pas facile d' »habiter » la Coupole avec une exposition d’art! Grand volume, large espace central, hauteur de plafond, verrière géante, murs éloignés…..Et pourtant, Claire Vanvosthuyse a réussi magnifiquement! Six séries d’oeuvres photographiques occupent les murs, chacune à leur façon (alignement, compositions en carré ou rectangle, stèles appuyées au mur…). Et, pour faire vivre le milieu de cette immense salle, elle a invité les céramiques d’Eric Schenker. Et ça marche à merveille!
Travail photographique, certes. Mais qui franchit allègrement une frontière. Car, à force, de manipulation manuelle et numérique, la photographie originelle quitte la mission de représentation du réel et entre dans le monde de l’expression de l’indicible.
Les photos de Claire Vanvosthuyse sont griffées, blessées, voilées, floutées, fragmentées…Elles sont coupées, prélevées de leur environnement, extraites d’un ensemble, exilées et replacées ailleurs… Et pourtant ce sont de vraies images. Contrairement à ces images trafiquées que nous livrent les réseaux sociaux, à toutes ces fausses images. Ici, l’image traduit quelque chose de vrai. Même si c’est indéfinissable !!
Ma série préférée dans cette expo, s’intitule « Serendip », ancien nom du Sri Lanka. (Mais « Fragments d’âme » que l’artiste peut enfin montrer dans sa totalité, est extraordinaire aussi. Quant au Carnet de Route, « Ce que le jour doit à la nuit », je l’ai feuilleté, une boule d’émotion coincée au fond de la gorge! )
Dans « Serendip », ce sont des images fuyantes, comme des bouts de mémoire qui se fixent mal, qui glissent. Le passé ne se laisse pas attraper facilement. C’est une brume fragile, un voile déchirable. Il nous échappe. Cette série est une sorte d’album souvenirs. Du moins ce qu’il reste des souvenirs. Des images qui défilent, qui passent. Des traces de voyage.
Claire Vanvosthuyse semble effeuiller le réel. Lui enlever délicatement, une à une, ses peaux. Jusqu’à la transparence. Jusqu’à la trame. Peut-être jusqu’à l’essentiel. Avec elle, la réalité devient comme ces manuscrits anciens, détruits par le feu ou le temps et dont il ne reste qu’une frêle pellicule. Réalité à conserver comme on peut, parce que devenue sacrée.
Eric Schenker a posé là quelques une de ses sculptures qui, elles aussi, ont des marques du passé. Des traces de mémoire. Ses pièces de céramique évoquent souvent une archéologie imaginée. J’ai vu un rapport au temps qui serait commun aux deux artistes. La fuite du temps est douloureuse… Comment y remédier? (Eric Schenker a même installé au sol une sorte de cadran solaire géant)
L’abstraction forte de Eric Schenker rejoint la figuration rêvée de Claire Vanvosthuyse: et ça fonctionne très bien!
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