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Déchirures, de Sylviane Chatelain

Publié le 04 mai 2019 par Francisrichard @francisrichard
Déchirures, de Sylviane Chatelain

Déchirures est un recueil de six nouvelles. La particularité de ce recueil est que la première d'entre elles représente plus des deux tiers du volume.

La Voisine aurait donc pu être un roman à part entière. Mais cela aurait été dommage, parce que cette disproportion ne nuit pas à l'unité de l'ouvrage.

Dans La voisine, une jeune femme, mère célibataire sans emploi, est obligée de déménager avec sa petite Coralie parce que son loyer est devenu trop élevé.

Sa fille ne supporte pas bien ce changement et en veut à sa mère. Une voisine de leur nouveau logis en profite pour s'attirer les bonnes grâces de l'enfant...

La mère de Coralie est déchirée. Elle ne sait trop que penser de cette voisine qui, tantôt douce tantôt dure avec elle, lui souffle au fond le chaud et le froid et l'obsède:

Même absente, elle est là, occupée à tisser autour d'elle et de sa fille une toile impatiente et impalpable dans laquelle elle a l'impression de se prendre davantage.

Sa voisine fait tant et si bien, en la tenant de plus en plus à sa merci qu'elle la soupçonne de vouloir lui enlever son enfant chérie, ce qui serait pour elle insupportable.

Dans La Bibliothèque, elle accepte d'aider son amie Annie à déménager ses livres, mais, surprise, cela ressemble comme deux gouttes d'eau au tonneau des Danaïdes:

Des étagères qui ne se vident pas. Des cartons qui ne se remplissent pas.

Dans Le Tableau, qu'elle ne connaît que par des reproductions, elle se rend au musée où il est exposé mais elle peine à le re-connaître et en est toute meurtrie:

Pour l'instant on dirait qu'il ne veut pas d'elle. Il se raidit, se ferme, se détourne. On dirait qu'il la repousse.

Dans La Brume, elle le perd de vue pendant une ascension. Elle ne sait s'il l'attend, si elle l'a dépassé, s'il l'appelle, si c'est bien lui, là-bas, et la gagne la peur:

De la solitude et du silence. Du froid qui se noue autour d'elle. De cette prison blanche, de ces murs inconsistants dans lesquels elle s'enfonce sans trouver d'issue.

Dans Le Chien, elle est au chevet de son mari malade qui lui raconte indéfiniment un rêve récurrent qu'il fait. Un chien (ou un loup) l'entraîne dans un village inhabité et tous deux se couchent à côté du feu qui brûle sur la place:

Les rêves naissent de souvenirs parfois complètement effacés de la mémoire. Ils ouvrent des portes fermées le jour, les ouvrent la nuit sur des évidences que le jour transforme en énigmes...

Dans La Rivière, elle est enceinte et s'est égarée dans une tempête de neige. Elle a frappé à une porte et on lui a ouvert. Pour retrouver les siens, elle doit absolument se réveiller et se délester de ses rêves:

Je ne les aime pas. Ils sont faits d'une étoffe usée, une étoffe si fragile, j'ai peur qu'ils se déchirent, peur des ombres sournoises, de la douleur sans remède qui s'y terrent.

Les protagonistes de ces six nouvelles sont donc bien des femmes toutes confrontées à des situations déchirantes et, ô combien, angoissantes. Et leurs déchirures, leurs angoisses, Sylviane Chatelain les rend communicatives...

Francis Richard

Déchirures, Sylviane Chatelain, 256 pages, Bernard Campiche Editeur

Livre précédent:

La Boisselière (2014)


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