Si Infinity War était parvenu, avec son écriture intelligente de Thanos et son inattendue ambition finale, à quelque peu redorer le blason d’un univers super-héroïque fade reprenant inlassablement la même formule (peu séduisante), Endgame retombe malheureusement dans les travers de la franchise. Non seulement le film manque cruellement d’ambition scénaristique (une constante pour Marvel), mais il se permet également d’annihiler toutes les bonnes idées distillées dans le volet précédent. A commencer par son méchant, qui passe d’un antagoniste aux motivations insoutenables, mais parfaitement compréhensibles, dans un film, à un vulgaire tyran souhaitant la destruction de la Terre dans l’autre. Malgré le caractère moralement insurmontable de sa démarche, Thanos faisait effectivement preuve, dans le précédent opus, d’une certaine noblesse et d’un sens du sacrifice louable, conséquence d’un parcours de vie tragique l’ayant amené à vivre l’effondrement de son peuple. Une profondeur palpable dont il est désormais totalement dépourvu. Or, l’intérêt de son affrontement avec les Avengers résidait justement dans ce dilemme moral qui les opposait, chacune des causes étant finalement aussi recevables l’une que l’autre.
En dénaturant ainsi l’antagoniste, les scénaristes n’ont pas seulement réduit à néant l’un des principaux enjeux du film, ils ont aussi lâchement expédié cette question morale pour retrouver une trajectoire manichéenne sans grand intérêt. Et avec elle son lot de ficelles, incohérences et autres blagues sans aucune finesse. A l’exception de l’une ou l’autre touche d’humour bien sentie, la plupart des gags sont d’ailleurs affligeants de nullité. En outre, à trop vouloir désamorcer les situations dramatiques par des drôleries de toutes sortes, le film échoue une fois encore, lors de ses nombreux moments destinés à émouvoir, à susciter la moindre émotion. Alors bien sûr, tout n’est pas à jeter, et certaines séquences se révèlent même particulièrement plaisantes, mais la déception prédomine tout de même au final compte tenu des espoirs qu’avait fait naître Infinity War. Au rayon des bons points, on notera néanmoins le rythme soutenu, qui permet aux 3 heures de passer sans trop de longueurs, et la qualité des acteurs, dont la réunification à l’écran procure toujours un plaisir sincère. En revanche, la mise en scène des frères Russo (Joe et Anthony) est toujours aussi plate, se montrant incapable de délivrer des plans réellement iconiques.A l’instar de son prédécesseur, Avengers – Endgame est donc un blockbuster généreux en spectacle, mais quelque peu indigeste. Si l’audace finale de Infinity War avait fait naître de réelles promesses pour cette conclusion, le film n’en tient au final pratiquement aucune. En revanche, il n’éprouve aucune difficulté à tenir celles habituelles dont on se passerait bien : mise en scène quelconque, humour sans finesse, scénario riche en ficelles/incohérences… Dommage !