La vie a paru - et la vie ne l'a pas connue. La vie marchait avec la vie. Et la vie ne le savait pas. La vie vivait sa vie, loin au fond dépeuplé de la vie. Et la vie l'a laissée mourir de froid. Un instant s'est déchiré l'épais brouillard de la confusion et je crois avoir vu son visage, son sourire long comme un banc de reflets, qui ne demandait que de vivre un peu, là-bas vivre d'un instant pour que vive la vie. Et quand la déchirure doucement s'est refermée - la vie a oublié la vie. Je guette aujourd'hui la blessure qui rouvrira la chair - pour entendre un cœur battre, partir, laissant tout, même les images, loin, avec la vie qui sait marcher sur les eaux. Et la vie toujours me déchire qui nous fuit et nous approche en s'éloignant, puisque chaque jour il faut que nous nous trompions éteignant ses grands ciels dans les mares de nos jeux sans joie. La vie me dédaigne, de confondre encore la morsure dans le fruit avec le parfum de la connaissance, la tendresse des feuilles, le souffle secret dans les jardins de la rencontre. Arbres solitaires - allées muettes - clartés offertes de tant de visages disparus - toujours appelle la voix du plus grand amour, qui ne se donne qu'aux libres murmures de la lumière, au babil sans fil ni raison des fleurs écloses. On ne sauve rien des apparences la peau s'entoure, le corps s'enveloppe et de quelle épaisseur de meuvent-elles la face brille et c'est la nuit à l'intérieur de la lumière on n'a jamais vraiment voulu voir ou on a toujours eu peur peur d'aller pieds nus avec la vie nue pieds nus sur la rive nue et maigre comme l'éclat au ras des sables, les vents à tout va l'ivresse qui d'un coup nous dépouille.in "Supplique du vivant"Ad Solem / Poésie / décembre 2018