Pour son deuxième passage derrière la caméra, après The Gift en 2015, l’acteur et scénariste australien Joel Edgerton s’empare du sujet fort des centres de réorientation sexuelle pour livrer un film empreint d’une belle sobriété, mais manquant malheureusement trop d’audace et d’intensité que pour véritablement marquer les esprits. Si la puissance et la gravité des thématiques abordées suffisent incontestablement à susciter l’intérêt, leur traitement bien trop académique ne permet en effet jamais de se sentir pleinement concerné par les événements. Ou de façon bien trop rare grâce, d’une part, aux performances touchantes des acteurs, et d’autre part, à l’indignation provoquée par certaines séquences. Extrêmement monocorde, le long-métrage peine en fin de compte à aller plus loin que la simple dénonciation des pratiques ignobles de ces établissements. Cela étant, il propose tout de même en filigrane une réflexion intéressante autour de l’utilisation déviante de la parole sacrée, faisant notamment de l’homosexualité un choix volontaire, un péché révoltant, une maladie – générée par les perversions de son entourage – dont il est nécessaire de se guérir rapidement.
Bien que trop peu développés à mon goût, les parents de Jared enrichissent également de belle façon la réflexion générale. Attentifs au bonheur/bien-être de leur fils, ils n’en demeurent pas moins dépassés par les événements, incapables de soutenir correctement leur enfant sans renier leurs propres croyances. Une dualité que symbolise à merveille le personnage de Russell Crowe. Même si l’acteur se montre plutôt discret, il exprime effectivement de manière fort convaincante ce tiraillement entre l’amour qu’il porte à son fils et celui qu’il porte à Dieu. Nicole Kidman, quant à elle, fait le boulot sans décevoir, mais aussi sans surprendre, pas aidée par un personnage à l’écriture trop ténue. Tout le contraire de Lucas Hedges, qui n’en finit plus d’impressionner par son talent film après film. Si le rôle de Jared n’est en définitive pas si éloigné de ce qu’il a déjà pu faire par le passé, il l’incarne à nouveau avec une sensibilité bouleversante. Enfin, à l’instar du traitement de fond, la mise en scène s’avère également beaucoup trop sage que pour vraiment séduire. A trop vouloir s’effacer derrière son sujet, Joel Edgerton en oublie en effet d’insuffler de l’intensité à son récit.Emmené par un solide casting, Boy Erased est donc un drame relativement inégal, interpellant par ses thématiques fortes mais décevant par son traitement bien trop sage. Malgré un sujet passionnant (la représentation des centres de réorientation sexuelle), le film manque malheureusement trop d’audace et d’intensité que pour se sentir réellement concerné par les événements. Reste néanmoins quelques séquences bouleversantes.