Poezibao a reçu, n°45 (dimanche 13 juillet 2008)

Par Florence Trocmé

Cette rubrique suit l'actualité éditoriale et présente les derniers ouvrages reçus par Poezibao. Il ne s'agit pas de fiches de lecture ou de notes critiques et les présentations font souvent appel aux informations fournies par les éditeurs. Certains points de vue ou remarques sont toutefois le fait de la rédaction et sont alors précédés de la mention ndlr.

Parmi les livres récemment reçus par Poezibao :
René Ghil, De la Poésie-Scientifique, Ellug
Françoise Ascal, Alexandre Hollan, Si Seulement, Calligrammes
Lionel Destremau, Soif et Surface de l'ombre, Tarabuste
William Carlos William, Al que quiere !, La Nerthe
Béatrice Bonhomme-Villani, Mutilation d'arbre, Collodion
François Cornilliat, Crédule, Belin
Antoine Dufeu, SEnsemble, Le Clou dans le fer
Christian Bouthemy, Contours du souterrain et À Quai, des Printemps, Obsidiane
Henri Scepi, Poésie vacante, Nerval, Mallarmé, Laforgue, ENS éditions
Jean Portante, En Réalité, éditions PHI
Luis Mizón, Voyages et Retours, Rhubarbe
Jean-Jacques Dorio, Une Minute d'éternité, Librairie-Galerie Racine

Poezibao a décidé de soutenir l'initiative de Place des Libraires et donne donc aussi souvent que possible, pour chaque livre, un lien vers le site de ce réseau de libraires indépendants qui tentent d'exister en face des géants de la distribution de livres en ligne.

* René Ghil
De la Poésie-Scientifique & autres écrits
Textes choisis, présentés et annotés par Jean-Pierre Bobillot
Collection Archives critiques, ellug, Université de Grenoble, 2008
296 p. - 27 €

" René Ghil fut autour de 1890 le plus soudainement célèbre, le plus admiré, le plus contesté, le plus violemment haï, puis le plus injustement oublié des auteurs de la première génération symboliste : précisément parce qu'il s'avéra l'adversaire le plus irréductible du Symbolisme. Il rompit très tôt avec Mallarmé sur la question de l'Idéalisme, auquel il opposait une vaste métaphysique de la Matière en évolution vers un " Mieux ", inspirée des cosmogonies orientales autant que de la science occidentale contemporaine (Darwin). Sa théorie de l'" instrumentation verbale ", basée sur un sensualisme linguistique inspiré des théories sur le langage de Rousseau et des recherches récentes en acoustique et en phonétique expérimentales (Helmholtz), eut un impact considérable : des futuristes russes et italiens à Breton ou Aragon, voire aux lettristes dissidents Jean-Louis Brau ou François Dufrêne, pionniers de la Poésie sonore.
Si les version successives de son précoce et effervescent Traité du Verbe (1886), devenu En Méthode à l'Œuvre (1904), ont fait l'objet d'innombrables commentaires, ses traités plus tardifs sont restés largement ignorés, et n'ont jamais été réédités ; ils représentent pourtant les états les plus aboutis, et les plus personnels, d'une pensée aussi intransigeante que singulière, parvenue à une ferme maturité, et méritent aujourd'hui d'être lus, voire de contribuer aux débats actuels sur la poésie, la connaissance et la chose publique. On trouvera dans ce volume le texte intégral de De la Poésie-Scientifique (1909) et De la Tradition de la Poésie-Scientifique (1920) auxquels s'ajoutent un ensemble de lettres de Ghil et d'articles qui lui furent consacrés. A signaler aussi, une copieuse préface, des éléments biographiques et une bibliographie détaillée. " (Dos du livre)
: je rappelle que Jean-Pierre Bobillot, le maître d'œuvre de cette importante édition, a présenté René Ghil sur Poezibao.
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* Françoise Ascal, Alexandre Hollan
Si seulement
Calligrammes, Bernard Guillemot, 2008

Qui viendra
à l'heure opportune
effleurer mon visage
et d'une main
libérer les sept orifices
de mon masque ?
quel dieu d'Egypte
se souvient encore
de la cérémonie
d' Ouverture de la bouche ?

Les dessins ont été choisis dans une série de " Têtes en méditation, réalisée par Alexandre Hollan entre 2003 et 2007. Recadrés pour cette édition, les originaux sont des fusains au format 32 x 24 cm.
A la suite d'une visite à l'atelier d'Alexandre Hollan où elle découvre cette série inédite, Françoise Ascal écrit, entre 2005 et 2007, les poèmes du présent recueil.
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* Lionel Destremau
Soif et Surface de l'ombre
Tarabuste, 2008
124 p. - 12 €

Aucune anagogie
simple et dur ce roc
de vocables présents
posé en silence liquide
on n'oublie ni les vagues ni
les flux de courant sous-marin
on se maintient juste à flots
on avance lent ça
se déploie
(96)

Certains des textes proposés dans ce livre ont paru précédemment en revues, notamment Moriturus, Le Nouveau recueil, Gare Maritime, Formes Poétiques contemporaines ou sur le site remue.net.
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* William Carlos Williams
Al que quiere !
La Nerthe, 2008
112 p. - 20 €


" À redécouvrir aujourd'hui Al que quiere ! ce qui frappe rétrospectivement c'est la lucidité du seul Wallace Stevens qui a vu dans ce recueil une œuvre déterminante pour l'avenir de la poésie américaine et les prémices de ce qui constituera toute l'œuvre de Williams, jusqu'à son chef d'œuvre, Paterson "(rabat de couverture).
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* Béatrice Bonhomme-Villani
Mutilation d'arbre
Avant-propos de Bernard Vargaftig
Collodion, 2008
32 p.

" Ces quelques pages ne sont qu'un seul geste, celui de tenir serré tout contre elle son père jusqu'à son cœur " dit Bernard Vargaftig en ouverture à cette ode funèbre, écrite par Béatrice Bonhomme à la mémoire de son père, mort en 2006 et dont elle dit " on aurait pu croire que tu étais âgé. Mais moi j'ai mis un jeune homme en terre. Tu avais toujours été dans la vie et dans le cœur des choses et tu étais mort jeune, plus vivant que tant de vivants " (p. 8)
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* François Cornilliat
Crédule
Belin, 2008
112 p. - 16, 50 €

mes timbres mes valeurs les trafalgars
du catalogue où je savoure l'envol
des cotes dans le passé des teintes
la bavure rare l'addition incertaine
au nuancier qui flatte tous les états
du monde même l'état français
[...] (p. 43)

On retrouve dans cet ouvrage l'interrogation sur l'enfance qui s'amorçait dans les livres précédents. Ce livre se présente comme une série d'esquisses autour de la mort ; non pas la mort en général, mais celle d'êtres précis, évoqués l'un après l'autre.
Crédule est le troisième livre de François Cornilliat après No Wonder (Belin, 1995) et Grotesques (Circé, 2001)
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* Antoine Dufeu
SEnsemble
Dessins de Valentina Traïnova et d'Antoine Dufeu
Le Clou dans le Fer, 2008
112 p. - 14 €

Le papier
Tu emportes qui te prend pour ce que tu n'es pas :
Un sens absolument caché des choses qui nous dépassent.
Monde, façonne-nous réciproquement
Au malaise de l'harmonie et
À l'aise des astres qui brillent d'ici à
Ce qu'une théorie nous propulse
Aux côtés d'assentiments multiples
finalement transformées en exceptions
(p. 37)

* Christian Bouthemy
A quai, des printemps
et
Contours du souterrain
Obsidiane et Par delà les mythes éditeur
Sans pagination, 10 € et 15 €

Deux livres récemment parus de Christian Bouthemy.
De premier, voici ce que dit Francis Wybrands : " La vie en vers. Et contre tout [...] Exercices de vie, pour vivre, donner à lire que la vie ne va pas sans son double écrit. L'écrire pour la mieux vivre plus intensément ". Et c'est François Boddaert qui parle du second, parlant des suites qui composent ce livre comme " autant de descentes daqns l'univers intime de ce poète rare, textes qui " semblent bien l'unique issue (cherchée et montrée) d'une existence sauvée par la quête d'un langage autonome ".
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* Henri Scepi
Poésie vacante
Nerval, Mallarmé, Laforgue
ENS Éditions, 2008
250 p. - 27 €

" La poésie moderne, telle qu'elle se dessine au tournant du xix e siècle, semble connaître un destin bien singulier et paradoxal : elle s'élabore en se défaisant, elle s'écrit en déconstruisant ses formes et ses valeurs dans l'espace critique du poème. Comment d'ailleurs est-elle possible ? C'est à une question aussi radicale que Nerval, Mallarmé et Laforgue ont tenté de répondre, chacun selon ses moyens et ses visées propres. Dans leurs pratiques respectives le poème s'applique à dénouer tout lien du discours avec le réel, vouant du même coup la poésie à penser ce suspens, à intégrer, dans ses modes de figuration et d'énonciation, la trace d'une coupure fondamentale. Réflexivité, autonomie, clôture : le poème devient le lieu d'un questionnement continu, qui met en déroute - non sans détours ni conflits - la Poésie et ses emblèmes chimériques ; il n'omet pas non plus d'évaluer la capacité du langage à représenter et à symboliser. Ainsi conçue et remise en jeu, la poésie révèle sa vacance : elle accentue le geste d'évidemment qui la creuse de l'intérieur, en mettant à nu les artifices d'un discours toujours enclin à dissimuler ses leurres et ses lacunes...(Dos du livre)
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* Jean Portante
En Réalité
Avec des illustrations de Robert Brandycollection g.r.a.p.h.i.t.i., éditions Phi, en coédition avec Les Écrits des Forges
142 p. ‑ 15 €

Quand s'entrouve la porte de la cuisine
et s'échappe le parfum du début
je reste à l'intérieur de moi-même
car c'est là que les éléments du devenir
se jouent leurs tours

* Luis Mizón
Voyages et Retours, précédé de Bibliothèques du Sud
Éditions Rhubarbe
76 p. - 9 €

" Il y a, dans la tradition espagnole, indienne, méditerranéenne, des poèmes habités d'apparitions, où la vie reflète des choses, des fruits, des idées, des fantômes, des êtres anonymes et fugaces, des traces populaires et secrètes. Des poèmes qui proclament la durée scandaleuse du minime face à l'usure du temps. Des paroles qui recueillent ces bribes d'incrédulité et de foi, de sentiments passionnés et de picaresques distances, dans lesquelles nous nous reconnaissons. Des échos contradictoires que je souhaiterais accueillir dans mes poèmes. " (Luis Mizón, incipit de Bibliothèques du Sud, p. 7).
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* Jean-Jacques Dorio
Une Minute d'éternité
Librairie-Galerie Racine, 2008

il me faudrait un dictionnaire
Pour l'épilobe ou l'oxalide
Et ces gouttes de phalaris*
qui essaiment sur la page
Il me faudrait un astrolabe
du grec astron pour les étoiles
et de lambadein qui saisit - mais je préfère rouler ces mots
Dans le ruisselet du jour naissant
choquant les pierres rondes
Qui les laissent ainsi couler
Vers leurs promesses

*Trois mots rares cueillis par Michel Butor -Illustration IV -
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