Dans la logique du programme « beta » du gouvernement français, le concept imaginé conjointement par l'URSSAF et la DIRECCTE (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) a d'abord commencé par une expérimentation, menée dans la région Bourgogne-Franche-Comté. Son objectif initial était de mettre en œuvre des techniques d'intelligence artificielle sur des données des deux partenaires afin d'évaluer le risque de fermeture d'une société à 18 mois.
Aujourd'hui, les résultats obtenus étant jugés concluants, le système va entamer sa phase d'industrialisation. Celle-ci comprend non seulement une extension géographique (vers Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie, Hauts de France et Pays de la Loire) mais également l'ouverture à de nouveaux participants (Direction Générale des Entreprises, Banque de France, DINSIC – c'est-à-dire la DSI de l'État…), dont les données vont permettre de renforcer la qualité et la fiabilité des prédictions réalisées.
Ainsi armées, les administrations disposeront d'une bien plus grande latitude dans le déclenchement des mesures de remédiation ou de prévention qu'elles peuvent proposer, en accompagnant les structures menacées avant que les difficultés sérieuses ne surviennent, plutôt que d'attendre, comme actuellement, les signaux d'alerte classiques (incidents de paiement des taxes, impôts et autres charges, retards de déclarations, licenciements…) qui souvent interviennent trop tard pour éviter le pire.
La démarche de Signaux Faibles est particulièrement exemplaire, pas tant par sa technologie (les algorithmes mis au point pour le calcul du risque de défaillance sont d'ailleurs publiés sous licence libre) que par sa démonstration de la valeur que peuvent produire les données détenues par différents établissements, historiquement isolés chacun dans son silo étanche, quand elles sont mises en commun. Voilà une idée qui devrait trouver un écho dans la plupart des grands groupes (financiers ou autres) !
Plus concrètement, les grandes banques devraient percevoir comme une humiliation la capacité acquise par des administrations, pourtant peu réputées pour leur dynamisme, d'anticiper les risques encourus par les entreprises si elles-mêmes, avec les gisements d'information considérables et les armées de spécialistes informatiques dont elles disposent, ne parviennent pas à faire aussi bien… et à aider leurs clients les plus fragiles à surmonter les moments difficiles. Ne serait ce pas dans leur intérêt de s'y atteler ?