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Avril à la Bibliothèque malgache : Rwanda, 1995

Par Pmalgachie @pmalgachie


Pierre Maury. Rwanda, 1995
Avril à la Bibliothèque malgache : Rwanda, 1995 Cet ouvrage date de plus de vingt ans. Mais, basé sur des séjours effectués dans les derniers mois de 1995, il était épuisé. Au vingt-cinquième anniversaire du génocide rwandais, il n’a pas semblé inutile de le rééditer.
Ce petit livre ne prétend pas offrir LA vérité sur le Rwanda d’aujourd’hui. La réalité est complexe, elle ne se dévoile souvent qu’en étant envisagée de points de vues différents, voire contradictoires. Prétendre l’appréhender supposerait une longue enquête, bien plus longue en tout cas que ne l’a permis un séjour d’un mois, en deux parties, en octobre et en décembre 1995. Pourquoi, alors, ajouter encore à la masse des publications qui, depuis la fin de la guerre en juillet 1994, se sont succédé dans les librairies, sans parler des milliers d’articles publiés dans la presse ? Pour dire autre chose, ou au moins essayer de dire autre chose, pour proposer, du Rwanda dans sa deuxième année de renaissance après un génocide inqualifiable, qui dépasse dans l’horreur les capacités d’une imagination humaine normalement constituée, une image qui ne s’arrête pas aux événements de 1994, sans pour autant les oublier. Au point de départ, un hasard qui devient une chance : arrivé au Rwanda sans but précis, sans article à écrire, avec pour seule motivation de rencontrer des gens qui vivent là – pas des Européens, des Rwandais –, je n’ai vécu à aucun moment l’existence « normale » du journaliste en reportage. Celui-ci a rarement le temps de se mêler à la population locale sans objectif immédiat, sans rentabiliser très vite son séjour par des articles. Alors, il pare au plus pressé, vit à l’hôtel et fait de rapides incursions dans les endroits qu’on veut bien lui montrer. Parfois il interviewe des personnalités officielles. S’il est assez lucide pour décoder les discours qu’on lui assène à longueur de journée, tout cela lui donne, souvent, une idée assez précise des grandes orientations qui sont celles d’un pays. Mais il est loin de rendre compte de ce qu’est la vie quotidienne de ce pays. Et pour cause : il ne la partage pas. Mon expérience, par la force des choses, a été très différente. Accueilli dans une famille, puis dans une autre, puis dans une troisième encore, j’ai partagé la vie quotidienne de Rwandais appartenant à des classes sociales diverses, mais qui avaient pour point commun de n’être pas directement liés à la vie politique du pays. C’étaient des citoyens comme les autres, ou presque. Presque : le hasard a voulu que je rencontre surtout des Tutsis – pas tout à fait le hasard, les circonstances historiques ont fait d’eux la plus grande partie des exilés avant 1994 et m’ont fourni, au départ de la Belgique, les premiers contacts, prolongés sur place. Ce n’est évidemment pas indifférent… Néanmoins, il m’a paru utile de rapporter les choses vues dans ce contexte limité. L’écart est grand, en effet, avec les reportages habituellement effectués dans la région. Une fois encore, c’est peut-être en partant sans idée de reportage qu’on est capable de rendre compte au plus près de la vie d’une population. Il ne s’agit pas non plus, du point de vue d’un spécialiste de l’Afrique noire. Je suis arrivé là doté d’une certaine naïveté, sans rien connaître des habitudes locales, ou pas grand-chose : ce qu’on m’en avait dit en Belgique, et qui avait quand même tempéré un peu ma naïveté d’Européen, de Blanc débarquant dans un monde totalement étranger. Ces notes paraîtront, pour quelques-unes en tout cas, trop évidentes aux yeux de ceux qui ont déjà voyagé là-bas et pour lesquels le contraste dans les modes de vie entre l’Europe et l’Afrique noire n’est plus depuis longtemps un sujet d’étonnement. Il n’empêche que, je l’ai constaté autour de moi, ce continent reste encore si méconnu que même les évidences sont parfois bonnes à dire. Ouvrir les yeux et les oreilles. Je n’aurai rien fait d’autre, transcrivant les images et les propos avec une honnêteté aussi scrupuleuse que possible, sans rien cacher ni des contradictions visibles ni des sentiments contradictoires qu’elles font naître. Sauf pour les quelques personnages officiels, présents malgré tout dans certaines rencontres et qui m’ont apporté des informations précises, je n’ai pas gardé les noms de celles et ceux qui furent mes guides et mes médiateurs. Dans un pays dont l’équilibre reste très fragile, on ne sait ce que sera demain, et il aurait pu être dangereux, pour certains, d’être reconnus un jour ou l’autre. Ceux-là ont cependant toute ma reconnaissance, et bien davantage.
1,99 euros ou 6.000 ariary ISBN 978-2-37363-082-4
Presse
C’est par tout ce qu’il ne dit pas que ce petit livre représente un témoignage exceptionnel : il ne parle pas de politique, ne livre aucune « clé » idéologique, n’évoque jamais nommément le génocide. Simplement, il parle de la vie, qui a triomphé sur la trame de la mort, et l’auteur conclut, à l’instar de bien des Rwandais : après cela, je ne serai plus jamais pareil. Colette Braeckman (Le Soir, 21 septembre 1996).
Les stigmates de la guerre et les travaux de reconstruction, les petits commerces de rue, les lieux de sorties nocturnes, l’orga­nisation familiale, les préparatifs d’un repas, d’un mariage… : c’est la vie au fil des jours qui surgit sous sa plume, non sous la forme d’une chronique, d’un récit de voyage pro­prement dit, mais dans la succession de brefs chapitres où les observations sont rapportées par thèmes. Ce petit livre (il fait moins de cent pages) se révèle attachant, précieux, par la modestie même de son propos et par la réserve de son écriture. Carmelo Virone (Le Carnet et les Instants, 15 novembre 1996 – 15 janvier 1997).

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