Salut à tous,
Du site Agence Science-Presse : Quand on parle de la mémoire
humaine, on a toujours l’impression, implicitement, que plus égalerait
mieux. Mais voilà que de plus en plus de neurobiologistes affirment le
contraire : oublier permet de nous rendre plus efficace ! Deux questions
importantes surgissent alors : 1) oublier quoi ? et 2) plus efficace
pour quoi ?
¨ En gros, tous les détails qui ne sont pas essentiels. Siegfried donne
l’exemple d’un chien qui vous aurait déjà attaqué dans un parc. Si votre
mémoire conserverait les moindres détails au sujet du chien (taille,
couleur, longueur du pelage, des pattes, etc.) et du parc (sur le
sentier de roche, près d’un banc, sous un grand arbre, etc.) il est
possible que vous ne généraliseriez pas à d’autres chiens et à d’autres
lieux une peur prudente qui vous évitera sans doute une seconde morsure.
Votre humble serviteur qui s’était déjà fait sauter dessus par un chien
alors qu’il était à la maternelle sait trop bien que c’est cette
généralisation par oubli des détails superflus qui s’effectue en nous et
permet, des décennies plus tard, d’entretenir spontanément une certaine
prudence envers les chiens. Une prudence des plus adaptatives quand on y
pense deux minutes.
Si vous n'êtes pas convaincu, changez le chien pour un lion et l’auteur
de ces lignes pour une gazelle. Vous comprendrez pourquoi l’évitement
d’un point d’eau par la gazelle lorsqu'elle perçoit le moindre signal de
félin pourra faire une différence entre la vie (et des descendants
ayant hérité de ces mécanismes d’oubli et de généralisation) et la mort
(des individus ayant une super mémoire des détails qui ne se sont pas
méfié de ces signaux car ils ne correspondaient pas exactement à ceux
qu'ils avaient mémorisés…).
Cela nous amène naturellement à répondre à la deuxième question : plus
efficace pour quoi ? Pour prédire le meilleur comportement à adopter
dans telle ou telle situation, tout simplement. Le neurobiologiste français Alain Berthoz disait déjà, il y a de nombreuses années :
<< La mémoire du passé n'est pas faite pour se souvenir du passé, elle
est faite pour prévenir le futur. La mémoire est un instrument de
prédiction>>.
Et j’ai parlé ici à plusieurs reprises, dont une juste avant les Fêtes, de toute cette mouvance en neurosciences où l’on considère le cerveau d’abord et avant tout comme une machine à faire constamment des prédictions.
Pour le dire comme la neuroscientifique Maria Wimber dans l’article de
Siegfried, le problème qui surgit lorsque l’on accumule les détails est
celui de « l’overfitting » qui est l’inverse d’un bon modèle assez
général pour être capable de s’accommoder de nombreuses situations
similaires.
Tranquillement donc, différentes pièces du puzzle commencent à
s’assembler pour laisser entrevoir une conception du cerveau qui
s’éloigne des mauvaises métaphores informatiques et s’enracine dans une perspective évolutive qui met l'accent sur l'importance de l'action.
Oublier les détails pour mieux généraliser et donc mieux agir permet, à
long terme et en moyenne (pour employer une précision chère à Friston
et Cie), de maintenir son organisme à l’intérieur des limites
physiologiques de la viabilité, bref de ne pas crever prématurément !
Un petit bémol en terminant à propos du schéma de l’article de Siegfried visant à illustrer comment les engrammes mnésiques se forment et peuvent disparaître. Je préfère de loin l’illustration d’un article de Rodrigo Quian Quiroga
où l’on évoque fort bien ce à quoi pourrait ressembler une assemblée de
neurones sélectionnées formant l’engramme d’un souvenir de Luke
Skywalker. Ou encore, la première illustration de l’article de 2015 de
Sheena A. Josselyn et Paul W. Frankland, Finding the engram (et dont une partie illustre ce billet), les deux neurobiologistes dont l’article de revue de 2018, Memory Allocation: Mechanisms and Function, est cité comme référence par Siegfried¨.
https://www.sciencepresse.qc.ca/blogue/cerveau-niveaux/2019/01/22/pourquoi-oubli-peut-sauver-vie
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