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Un procès se déroule en ce moment aux Etats-Unis à la demande d'Edwin Hardeman, un septuagénaire atteint d'un lymphome non hodgkinien (LNH), qui a utilisé pendant près de 30 ans l'herbicide Roundup pour désherber sa propriété de 22 hectares en Californie. C'est le deuxième procès aux Etats-Unis pour ce type de cancer, après celui du jardinier Dewayne Johnson en 2018, qui a débouché sur une mise en cause du Roundup. Il se déroule à l'échelle fédérale cette fois et non pas dans le seul Etat de Californie comme ce fut le cas pour Dewayne Johnson.
La procédure se déroule en deux phases. Au cours de la première, concernant les liens entre LNH et cancer, le jury a examiné les éléments scientifiques et médicaux à sa disposition, avant d'estimer à l'unanimité le 19 mars que le Roundup a été un " facteur subtantiel " dans l'apparition de la maladie de M. Hardeman.
Le groupe allemand Bayer, qui a acheté Monsanto l'an dernier, a aussitôt réagi en écrivant dans un communiqué : " Nous avons une grande sympathie pour M. Hardeman et sa famille, mais de nombreuses données scientifiques corroborent la conclusion selon laquelle le Roundup n'est pas la cause de son cancer ".
Science et opinion publique manipulées, selon l'avocat
La responsabilité du Roundup étant reconnue, le tribunal va entrer dans une deuxième phase, au cours de laquelle doit être déterminé si Monsanto a tenté de dissimuler les effets nocifs sur la santé de son herbicide. L'avocate du plaignant, Jennifer Moore, a déclaré que " les avocats chercheraient à prouver que Monsanto a manipulé l'opinion publique et la science pour minimiser les risques pour la santé du Roundup ", selon le New York Times. Ils s'appuieront notamment sur les " Monsanto papers ", des documents internes obtenus par la justice américaine, qui ont révélé des manoeuvres en ce sens. Ces documents suggèrent que Monsanto attribuait certaines de ses études à des universitaires renommés qu'il payait pour cela. D'autres indiquent qu'un haut responsable de l'agence sanitaire américaine E.P.A. (Environmental protection agency) a oeuvré pour faire annuler un examen du glyphosate au niveau fédéral, précise le New York Times. Ces documents ont encore révélé qu'il existait un certain désaccord au sein de l'E.P.A. sur l'évaluation des risques. Si l'EPA a finalement estimé que la matière active du Roundup, le glyphosate, n'est pas cancérigène, l'OMS en revanche l'a classé comme " cancérigène probable " en 2015. Et certains des autres composants du Roundup sont jusqu'à 1000 fois plus toxiques que le glyphosate selon une étude.
Dans la première phase du procès en cours, le jury a dû se prononcer sans examiner les " Monsanto papers ".
Plus de 11 000 procès en cours aux Etats-Unis contre Monsanto
Le verdict présent et celui qui sera rendu à l'issue de la deuxième phase dans l'affaire Hardeman, devraient influencer les futurs jugements estiment les avocats : Bayer a communiqué le chiffre de 11 200 procédures en cours aux Etats-Unis.
Le groupe allemand affirme cependant que cette nouvelle décision n'aura " aucun impact sur les affaires et les procès à venir, car chacun a ses propres circonstances factuelles et juridiques ". Pourtant, elle confirme le jugement prononcé en août dernier : Monsanto a été condamné à verser 289 millions de dollars de dommages et intérêts à Dewayne Johnson (ce montant a été réduit depuis à 80 millions de dollars par un juge), le Roundup a été jugé cause du LNH et la firme a été jugée coupable de ne pas avoir averti des risques encourus.
Depuis, l'état de Californie a déclaré le glyphosate comme produit chimique connu pour ses effets cancérigènes.
Le Roundup est utilisé à grande échelle dans de très nombreux pays, notamment sur les cultures OGM. Il assure des revenus par ses ventes mais surtout par la vente des semences génétiquement modifiées qui lui sont associées. Aussi, l'action Bayer-Monsanto a de nouveau été chahutée après le jugement tombé hier.
Anne-Françoise Roger