Il parle de Ronsard, des poèmes d’amour, et de Victor Hugo. Miguel Angel Sevilla est venu d’Argentine embrasser les pavés que Hugo a foulés. C’est son père qui le lui a conseillé. S’agissait de ne pas crever la dalle. S’agissait de ne pas crever. Il est venu avec son désir de philosophie et la dictature de son pays natal l’a poussé à l’exil. Mais il a gardé le tango et la voix de poètes comme celle de Juan Gelman. Et le souvenir d’un enfant endormi dans la rue : « Mets-le debout, enlève ton chapeau / Avec grâce devant lui, / Avec respect ».
Miguel Angel Sevilla dit être né poète et rend hommage, de poème en poème, à tous ceux, à toutes celles qu’il n’oublie pas : un oncle qui s’est jeté dans un puits, « un puits de Séville qui est au milieu d’une place », une petite fille qui vendait des fleurs rue Mouffetard, Malek Oussekine, une jeune femme qui dansait le tango, et même « l’arbre (qui) vole / Dans l’oiseau qui le quitte ».
C’est un homme de théâtre et sa présence s’impose devant nous avec une telle modestie qu’on a l’impression que c’est la poésie qui a pris la voie de sa bouche et qu’il s’est laissé habiter par elle, qu’il s’est voué à elle. Il écrit : « La voix me monte à la bouche baiser / Dans lequel je péris par le fait de dire ».
La poésie, la rue, l’exil, c’est la même chose pour lui, « le terrain de tous et de personne ».