On a senti François Fillon inquiet des comptes publics il y a quelques jours: "Je ne serai pas le premier ministre qui laisse aux générations futures la facture de nos imprévoyances et de nos lâchetés." Qu'avait-il besoin de rappeler cela à ses collègues de l'UMP réunis en Conseil National ? Serait-il inquiet de son propre Président ? Nicolas Sarkozy semble détourner le regard à l'approche du précipice.
L'immigration est une diversion
Utilisant les vieilles ruses de l'extrême droite française, Nicolas Sarkozy a usé et abusé de l'immigration depuis sa campagne électorale - victorieuse - de 2007. C'est une belle diversion. Elle permet de remuer les bonnes et mauvaises consciences et faire oublier le quotidien de ses erreurs.
Sous couvert de quelques nominations au gouvernement (Rachida Dati, Rama Yade et Fadela Amara), Sarkozy s'est permis ce que jamais la France n'a connu depuis la France de Vichy: création d'un ministère de l'Identité Nationale, regroupement familial durci jusqu'aux tests ADN, tests de Français, quotas ethniques par métier, rafles et traques jusque dans les écoles, industrialisation de la rétention, et ... tribunaux pour étrangers. Rachida Dati a même dû préparer une modification constitutionnelle, et créer une commission ad hoc, pour faire passer ce changement de régime.
Pourtant, cette politique est inefficace. La commission sur "le cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'immigration" présidée par Pîerre Mazeaud considère même les quotas migratoires contraignants mise en place par Nicolas Sarkozy et Brice Hortefeux "irréalisables ou sans intérêt." Et Brice Hortefeux n'a pas réussi à trouver ses 25 000 expulsés en 2007, malgré le concours de toutes les administrations de France et de Navarre. Depuis deux semaines, le débat s'est même porté au niveau européen.
La faillite de l'Etat est une possibilitéN'utilisons pas le terme "faillite" à la légère comme un actuel premier ministre en septembre dernier. L'Etat a des actifs, ses échéances ne sont pas menacées. Mais la politique actuelle, comme le tabac en son temps, "nuit gravement à sa santé." Alors que le débat budgétaire refait surface, à la veille de l'été, le gouvernement prépare l'opinion... et le Président. Eric Woerth rassure: "Je ne repousse rien, nous serons à l'équilibre des finances publiques en 2012, le président de la République nous l'a demandé et c'est ce que nous faisons." Xavier Darcos annonce déjà des réductions d'effectifs supplémentaires de son ministère. Elles seront de 30 000 sur l'ensemble des administrations. Le gouvernement serait-il inquiet ?
Sur le terrain économique, Nicolas Sarkozy a eu faux sur quasiment toute la ligne depuis 62 semaines. Il s'est placé, il nous a placé un peu plus au bord du précipice.
- Ses prévisions de croissance furent contestées dès l'été 2007 Qu'importe, Christine "Marie-Antoinette" Lagarde s'est obstinée. Le budget 2008 était fondé sur l'hypothèse d'une croissance comprise entre 2,0% et 2,5%. cette dernière est désormais prévue par le gouvernement entre 1,7 et 2,0%. On vous le disait depuis près d'un an ! Cette révision à la baisse représente une perte de recettes fiscales de l'Etat de l'ordre de 3 à 5 milliards d'euros.
- Le déficit public se maintient. Il serait de 2,5% du produit intérieur brut cette année (contre 2,3% initialement prévu), contre 2,7% en 2007. Déjà en 2007, l'effet conjugué des premières mesures de dédfiscalisations de Sarkozy et des erreurs de prévisions du gouvernement précédent (Jean-François Copé, où es-tu ?) l'avait fait déraper de 7,7 milliards d'euros par rapport à l'année passée (à 50,3 milliards).
- Le déficit commercial se creuse en France: 4,7 milliards d'euros en mai, soit un milliard d'euros de plus que le mois précédent. On peut accuser l'euro fort, mais nos voisins allemands affichent un excédent commercial! Visiblement, les 50 milliards de contrats "signés" par Nicolas Sarkozy, qui expliquent notamment l'explosion des dépenses de déplacements présidentiels en 2007, n'ont pas suffit à redresser la barre.
- Les défiscalisations d'heures supplémentaires ne servent à rien : le pouvoir d'achat général des Français baisse; le nombre d'heures supplémentaires n'augmente pas comme on nous le dit; ces exonérations creusent de 150 millions d'euros par mois les comptes sociaux, à cause du manque à gagner de cotisations.
- Le projet de loi sur la modernisation de l'économie arrive (enfin ?) au Parlement. Pourquoi tant de retards ? Parce que Nicolas Sarkozy a préféré attendre le résultat des travaux de la Commission Attali. Un candidat peaufine son projet présidentiel pendant 5 ans puis, une fois élu, demande à des experts bde lui donner des recettes. Etrange, non ? Sur le fonds, cette loi comporte 4 volets dont on perçoit pas nécessairement la cohérence : faciliter l'entreprenariat, renforcer la concurrence dans la distribution; favoriser le déploiement du haut-débit, et "mieux financer l'économie" (avec la libéralisation du Livret A). A la crise du pouvoir d'achat le gouvernement répond CDiscount et loi de la jungle !
Il y a deux explications possibles à ces incroyables erreurs : soit l'idéologie a pris le dessus sur la compétence; soit les désaccords entre Sarkozy et Fillon sont tels qu'ils empêchent toute cohérence depuis le premier jour. Rappelez vous ce que nous écrivions en septembre dernier:
"D'un côté, le Président s'obstine à prier la Confiance. Son cabinet phlétorique, Guéant et Guaino en tête ("les GG"), rectifie chaque déclaration jugée pessimiste d'un ministre. De l'autre, ceux qui sont aux affaires, à savoir François Fillon et son gouvernement, tentent de mettre en oeuvre une politique de rigueur."Sarkozy a beau lancé une nouvelle Web Tv pour défendre ses réformes, il n'est pas sûr que cela serve à grand chose.
Ami Sarkozyste, où es-tu ?