Partant de ce ressenti, Christophe Vaillant a choisi de bien vieillir. Véritable mentor du SuperHomard - doit-on rappeler aux néophytes que le nom est emprunté à la célèbre discothèque du Ne Nous Fâchons Pas de Lautner - il décide de ressortir les synthés analogiques et avec l'aide de son frère Olivier concocte un fantasme de pop acidulée puisant aussi bien dans l'univers des soundtracks élégants à la française que de Broadcast (particulièrement sur le single "Springtime") ou The High Llamas, autres esthètes britanniques.
Meadow Lane Park est le premier album de la "bande à Tonton" (NDA) qu'on entre temps ralliée des membres de la dernière mouture de Pony Taylor, Laurent Elfassy et Benoît Pithon. Exit les power chords de l'hymne mod "Married to Wigan", les refrains pop garage tels qu'ils étaient pratiqués depuis l'inaugural Strawberry Smell, Christophe choisit de s'en remettre à ses maîtres De Roubaix, Perrey ou Colombier qui avant lui ont ravi nos oreilles en maniant avec brio le Moog ou l'ARP Odyssey.
L'entreprise sera complétée par la blondeur de Julie qui n'a de Big que le nom ; en effet ses vocaux ici susurrés ne sont pas ceux d'une diva de 150 livres façon Aretha ; mais sont au contraire destinés à se fondre dans le mix des autres instruments et leur douceur murmurée faire fondre ce qui reste de Banquise.
Le parti-pris du chant anglais s'impose et ne choquera que ceux qui n'ont pas compris que dans le rock d'ici, tous les grands noms à de rares exceptions ont vocalisé dans la langue de Dickens, et que point n'est besoin de produire artificiellement du lyric français pour se conformer à telle norme, à tel quota. D'ailleurs maintes plages du disque sont instrumentales ("In the park", "Snowflakes"), et l'organe de Julie doit pratiquement être considéré comme un instrument à part entière dans l'atmosphère dreamy que distille Meadow Lane Park. Atmosphère renforcée par le remarquable travail de son effectué par Benoît Pithon.
Meadow Lane Park aura assez vite bénéficié d'un succès d'estime, puisque déjà adoubé en France et en Italie où il a été élu disque du mois dans les revues qui comptent. Jusqu'à, honneur suprême, être adoubé par le Modfather en personne (chassez le naturel...), Paul Weller qui revendique Le SuperHomard dans une de ses playlists.
Comment dès lors envisager l'avenir du groupe avignonnais, et quel peut-être éventuellement l'axe à travailler pour encore mieux s'exporter ? La réponse pourrait prendre les traits d'un tube, d'un single qui sur le modèle synth pop dansant des excellents Saint Etienne, pourrait devenir son "Sylvie". Enfoncer le clou avec une envolée du type "Split screen", vers laquelle le Superhomard se rapproche parfois avec des morceaux comme "Paper girl" ou Black diamond".
Alors Le SuperHomard la jouera-t-il funky lors de son prochain opus ? Il n'a en tout cas pas terminé sa mue ; et on prédit (et lui souhaite) une cuisson encore plus hot lors de sa prochaine ronde des plats.
En bref : d'Avignon nous parvient le premier long format lounge et rêveur du SuperHomard, nouvelle déclinaison d'un projet musical des frères Vaillant, qui a pris forme il y a déjà une vingtaine d'années. La pop garage laissant place ici au lounge mâtiné de soundtrack cosy.