"Le CErcle des amis des écrivains Noirs Engagés a pour buts la promotion et la défense des littératures produites par les écrivains africains et afrodescendants et mettant en exergue une cause humaine, sociétale, idéologique, politique, culturelle, économique de l’Afrique ou de sa diaspora.
Il s’agit aussi de donner un supplément de visibilité à des auteur-e-s noir-e-s vivant en Afrique ou dans sa Diaspora (Amériques, Europe, Caraïbes, Pacifique, etc.)."
La Cene Littéraire
Il y a quelques années j’ai été contacté par la Dame, que je ne connaissais ni des dents ni des lèvres (lol) et qui me sortait des élucubrations sur la création d’un prix littéraire blabla blabla ; Vu le nombre de sollicitations d’hurluberlus que j’avais alors – les PADA marchaient plutôt bien après des années de travail et je semblais attirer un intérêt qui m’agaçait -, mon premier réflexe fut le recul. Qui c’est celle-là ?!
J’ai évidemment fait appel à Google mon ami pour savoir à qui j’avais à faire, et ça ne m’a pas rassuré ; apparemment la Dame, avocate Suisse, sans aucun lien avec la littérature, ni auteur, ni critique, ni organisatrice de quoi que ce soit. Je me suis dit « voilà encore une qui se cherche une marotte ‘engagement ‘ sans rien connaitre de la difficulté de la chose et qui va me claquer entre les doigts dans 2 mois ». Une oligarque K-mère à la recherche d’une danseuse comme Roman Abramovitch. J’ai donc zappé.
Pire, j’ai fait mon moi, j’ai palabré assez férocement avec la Dame sur le titre donné à cette structure qui me donnait des boutons : « écrivain noir engagé » ?! Mais c’est quoi ça ?!
Déjà, « écrivain noir » ça m’énervait car, quid des métisses ? Ils ne sont pas noirs ou blancs, ils sont l’un et l’autre ; alors pourquoi accepter implicitement comme un fait la vision occidentale de pureté blanche.
Et puis, « écrivain engagé » … punaise… ça faisait déjà des années que l’on se fightait avec certains auteurs sur cette notion d’engagement, qu’en 2013 j’avais même organisé deux rencontres sur le thème, l’un avec Sami Tchak et l’autre avec Percival Everett. Donc, cette notion d’engagement des artistes était assez sensible pour moi.
Donc, j’ai zappé avec, je dois le dire, assez peu de classe ni de considération pour ce projet.
Un peu plus de deux an après mon ami Gangoueus – toujours dans les bons coups et visionnaire – me contacte en me demandant si je voulais faire partie d’un comité de pré-sélection pour un prix littéraire qui en était à sa seconde édition.
Oui, entre temps, en 2016, je me retrouve au Salon du Livre de Genève et j’assiste à la remise, par la Dame, du premier prix de la CENE littéraire à mon chouchou Hemley Boum. Déjà là, je me dis « Ok, mea maxima culpa, la Dame est toujours là et elle a réalisé ». Non seulement il y avait effectivement eu remis de prix mais en plus, la Dame s’était donné les moyens – financiers – de ses ambitions (3000 Francs Suisse c’était pas des LOL pour un prix africain) et surtout littéraire avec un Jury composé de Ambroise KOM ou Théo ANANISSOH entre autres star. La Dame s’était entourée pour crédibiliser son action.
Cependant, je suis un romantique mélancolique à la Mbarali mais aussi chercheur de poux à la Naulleau. Donc, pour bien m’assurer qu’il n’y avait pas là une énième opération de communication avec des amies qui se font des bisous et se donnent des prix dans un microcosme K-mère (oui, deux K-mères dans l’affaire c’était forcément louche…), j’ai intégré le comité de pré-sélection pour le cru 2017. Si je résistais encore à fermer ma gueule, là, je me suis infibulé les lèvres. Je sais, de très mauvais goût.
Douze livres à lire, 13 chroniqueurs au départ, 7 ou 8 en réalité. Et les discussions furent féroces. Vraiment. Pour défendre, ou descendre pour moi, ses livres coup de cœur, chacun s’est doté de griffe à la Freddie Gruegger pour taillader les opposants façon « massacre à la Serpe ». Les discussions ont été vives, les échanges, régulièrement par conf-call, ont frisé l’hystérie. Tout ça pour parler littérature. La Dame se jetais dans l’arène en mère-lionne lectrice sans jamais user de l’argument d’autorité suprême : c’est moi qui paie, c’est moi qui dit. Jamais. Même quand j’ai excessivement, et encore, je me suis retenu, montré ma réticence devant « Le Moabi Cinéma » qu’elle avait, elle, aimé. Échange épique. Encore plus épique quand le Dr Abdoulaye Imourou a analysé le « Afrotopia » qui avait mes faveurs. Même Icare n’a pas été dégommé aussi vite par les dieux olympiens.
Des Douze, par un système de point (qui a dû s’affiner avec le temps), cinq livres sont sortis du lot. Et, sans que l’on soit tous unanime sur chacun d’entre eux, cette sélection reflétait vraiment la crème de ce que j’avais lu cette année-là. Le Jury élira finalement « Le Messie du Darfour ». Mais là n’est pas l’essentiel.
L’essentiel est le prix de la CENE.
L’essentiel est la crédibilité.
Pas de copinage, pas de passe-droit, pas de magouillage.
Veni vidi sensi.
Depuis l’année dernière le prix est devenu « Prix Les Afriques ». Une foutrement bonne idée. Les intègre malheureusement toujours les écrivains US noirs (oui, j’aime pas !) mais hormis ça, c’est du presque parfait au présent. La dotation a doublé (6000 francs !!), la structure a créé une résidence littéraire (je me demande d’ailleurs si ce n’est pas la première en Afrique francophone, non financée par l’Europe) et a initié des rencontres littéraires. Le bateau avance, dégage les icebergs devant lui et ce fraie un chemin de gloire. C’est impressionnant le travail abattu. La Dame avance et le tourbillon qui l’accompagne vous intègre où vous dégage ; dans tous les cas, il avance.
Alors, vous qui avez eu la patience de lire jusqu’à maintenant.
Ne faites pas les cons.
Sautez dans l’œil du cyclone.
Entrez dans la danse pour espérer faire partie de l’histoire.
Parce que l’histoire de ce prix, à mon avis, n’est pas près de s’arrêter.
Entrez dans le rythme et aidez ce prix à gagner les vrais galons d’un prix littéraire : le lectorat !
Le Prix des Afriques est très bien doté. La Dame et tous ceux qui sont dans le mouvement bossent dans le sens de l’histoire mais, et c’est mon cheval de bataille, un prix littéraire n’a de valeur que s’il aide l’auteur, les auteurs à être lus, à vendre. Sans cela, c’est de la branlette entre littérateux. Brassens dirait, un prix littéraire sans lecteur, ce n’est qu’une sale manie.
Alors, il faut lire et faire lire les livres sélectionnés par ce prix Les Afriques car ce n’est que comme cela qu’il fera entrer des auteurs dans l’histoire (big up Sarko !).
Vous êtes lecteurs ? Achetez et lisez-les
Vous êtes chroniqueurs ? Lisez et critiquez ces livres, quitte à entrer dans le lard du comité de sélection.
Vous êtes libraires ? médias ? organisateur de rencontres ? Invitez les auteurs, donnez-leur de la visibilité, construisez leurs légendes parce que la littérature c’est aussi des histoires et des mythes.
Vous êtes marketeurs ? youtubeurs ? Faiseur de buzz africain ? Emparez-vous de cette liste et faites mousser ces auteurs.
Vous êtes, vous ? Vous n’aimez pas lire ? vous n’avez pas d’argent ? Partagez cette liste, re-twittez là, c’est gratuit, ça ne consomme pas plus de Mo.
Vous êtes coach ? Arnaqueur ? Marabout ? FeyMan ? Participez à l’effort de diffusion, un peu de lecture ne fera pas de mal à vos ouailles.
Vous êtes kémites ? Panafricanistes ? Muntu-iste ? Le Prix des Afriques est montée, organisée et financée par une africaine, avec un comité de pré-sélection africain (de naissance et d’adoption ), un jury africain. La success-story ne devra rien à personne et l’échec ne sera la faute d’aucun occidental. Même pas du Franc CFA, c’est dire !
Bref.
Faites pas les cons.
Lisez des livres.
Voir en ligne : PRIX LES AFRIQUES 2019