Les héros des JO de Paris 1924, Géo André ou la course folle du Bison

Publié le 26 décembre 2018 par Philostrate

Un siècle avant les JO de 2024, qui auront pour cadre la capitale française, Paris organisait les derniers Jeux en date sur les bords de  Seine. Celles et ceux qui ont alors fait l’actualité ont tous marqué de leur empreinte l’histoire de l’olympisme. Cette galerie de portraits vous invite à les découvrir au moment même où Paris s’invente un nouveau destin olympique…

Image : http://gallica.bnf.fr/

   De profil, avec son nez en forme de bec et ses longs segments, Géo André ressemble à un échassier. En plus véloce. Alors que Paris s’apprête à accueillir en 1924 les Jeux de la VIIIe Olympiade, «l’athlète complet» comme le surnomme la presse sportive de l’époque, affiche en effet un palmarès tout aussi éclectique qu’impressionnant. Hurdler, mais aussi adepte du saut en hauteur avec ou sans élan (si, si, ça existait !), le sociétaire du Racing club de France est déjà détenteur en 1922 de vingt titres de champion de France toutes disciplines confondues, d’une médaille d’argent aux Jeux olympiques de Londres en 1908 et d’une de bronze à ceux d’Anvers en 1920, ainsi que de sept sélections en équipe de France de rugby à XV, qu’il pratique aussi sous le maillot ciel et blanc (deux fois finaliste du championnat en 1912 et 1920, excusez du peu) ! Sans compter ses faits d’armes dans l’aviation pendant la Grande Guerre : blessé, fait prisonnier, il échoue dans cinq tentatives d’évasion avant de fausser compagnie à ses geôliers à la sixième, puis de s’illustrer dans l’escadrille des Cigognes au point de se voir décerner la médaille militaire. Bref, c’est un sacré client !

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   Quand Paris accueille les Jeux en 1924, il a beau avoir 35 ans et une cheville d’ancien combattant (fracassée par une balle teutonne pendant la Der des Ders…), le Bison – son surnom au Racing – court toujours. C’est donc sans surprise que le Comité olympique français décide d’en faire le porte drapeau de sa délégation. Lors de la cérémonie d’ouverture le 5 juillet au centre du stade de Colombes imaginé par Louis-Faure Dujarric, Géo André prononce le serment olympique devant un parterre de choix. Le prince de Galles y côtoie le ras Taffari, prince régent d’Ethiopie, le baron Pierre de Coubertin, les têtes couronnées de Roumanie ou de Suède : les « people » de l’époque quoi… Perché sur un podium frappé des anneaux olympiques, le tarin bravant le zéphyr et le bras tendu dans la solennité du serment, « l’athlète complet » est immortalisé par les photographes des agences de presse et les dessinateurs des gazettes. Une consécration en somme. Sur la piste,  le vétéran échoue au pied du podium, quatrième du 400m haies comme à Anvers quatre ans plus tôt. Ses plus belles années sportives sont désormais derrière lui.

Mais sa popularité, elle, ne faiblit pas. Le Bison a toujours la gnaque. Si bien que quand éclate la seconde guerre mondiale quinze ans plus tard, malgré ses cinquante piges, le Racingman est décidé à en découdre ! En juin 1940, le voilà qui traverse en loucedé la Méditerranée dans un avion piloté par son fils Jacques, futur as de l’escadrille Normandie-Niemen et héros de l'Union soviétique. En Afrique du Nord, devant le refus des autorités militaires de lui laisser reprendre du service dans l’aviation, le quinqua s’engage dans les corps francs. C’est là qu’il tombe, les armes à la main, le 4 mai 1943, trois jours avant la prise de Tunis par les alliés. De la cendrée de Colombes au sable des pistes africaines, Géo André n’aura décidément jamais rien lâché…