Comment peut-on réussir à se comprendre si on ne s'écoute pas?...
La non-communication et le manque d'écoute entre les adultes et les enfants ou les adolescents sont parmi les plus grands générateurs de violence. Le sentiment d'impuissance qui en découle peut atteindre des degrés tout à fait terrifiants, voire insupportables. Qu'elle soit verbale, physique ou psychologique, la violence apparaît alors comme l'unique moyen de faire baisser la pression créée par la détresse extrême de ne pas se sentir entendu.
Comme l'humain est un être de relation qui a besoin de communiquer, de se dire et d'être entendu, il est primordial, pour sortir de cette impasse, de créer, à l'école comme à la maison, un espace permettant l'écoute véritable.
Écouter pour de vrai
Toutes les formations, tous les enseignements, toutes les formes de communication reposent
avant tout sur la qualité de l'écoute. Pour être en mesure d'écouter réellement l'autre, il ne suffit pas d'entendre les paroles qu'il prononce et d'en saisir rapidement le sens. Il faut aller beaucoup plus loin en s'assurant que les mots utilisés ont la même signification pour celui qui les prononce que pour celui qui les entend, que l'aspect culturel ne vient pas colorer leur sens et que des charges affectives incontrôlables ne brouillent pas la qualité de l'écoute.
Sans oublier que nous avons souvent la malencontreuse habitude de préparer une réponse avant même que notre interlocuteur n'ait terminé de nous communiquer son message, rendant ainsi l'écoute quasi nulle. Les questions de l'enfant cachent souvent un point de vue, une inquiétude qui l'habite. Une réponse donnée trop rapidement les coupe de leur véritable questionnement, leur donnant la triste certitude qu'ils ne sont pas entendus.
Nous devons donc apprendre à aller au-delà du système "Questions-Réponses" pour offrir à l'enfant la possibilité de se dire et de s'entendre.
Écouter la réalité de l'autre
Si la personne qui écoute est trop préoccupée par sa réponse, si elle est envahie par ses émotions, ou encore si elle a d'autres soucis en tête, elle aura de la difficulté à être réellement à l'écoute. Faire attention à la réalité de l'autre, à l'environnement dans lequel il se trouve, c'est tenir compte de tout un ensemble de facteurs : les mots qu'il prononce, le ton qu'il utilise, l'attitude qu'il a vis-à-vis de nous, la posture de son corps...C'est comme si, l'instant que dure l'échange, nous nous "branchions" sur l'autre pour bien saisir l'essence de son message.
Écouter ce que cela réveille en nous
Cependant, écouter c'est aussi faire attention à notre propre réalité. Il ne suffit pas d'être branché uniquement sur notre interlocuteur. On doit aussi être à l'écoute de soi, de ce que ses propos réactivent dans notre histoire, de ce que cela fait remonter en nous. Lorsque l'autre nous parle c'est qu'il a, consciemment ou non, une intention à notre égard : il veut attirer notre attention, avoir notre adhésion, nous émouvoir ou tout simplement nous faire réagir.
Écouter l'autre, c'est apprendre à déceler cette intention et pour réussir, on doit être attentif à ce que ses paroles provoquent en nous. Et à ce chapitre, vous avez sûrement déjà remarqué que les enfants sont passés maîtres dans l'art de "peser sur le bon bouton" en réactivant I'ex-enfant qui vit en nous, en réveillant des émotions depuis longtemps endormies... En repérant ce qui se passe en nous permet de saisir leurs messages avec plus de justesse.
Se dire, ou ne pas se dire
Pour se dire ou ne pas se dire, l'enfant utilise plusieurs formes de langage. Cela suppose chez l'adulte une écoute polyvalente qui permet de l'"entendre" jusque dans son univers non-verbal. L'enfant nous parle par ses questions, ses somatisations, ses actes ou ses peurs. Nous devons donc nous mettre réellement à son écoute pour que se rétrécisse l'incroyable fossé qui existe parfois entre ce que dit l'enfant et ce que nous, adultes, entendons.
Lorsqu'un enfant vit des difficultés à l'école, que ce soit des troubles de comportement ou d'apprentissage, c'est qu'il tente à sa façon d'exprimer un mal-être, une incompréhension, un questionnement, une peur ou un conflit.
Le problème naît généralement du fait que ses tentatives d'expression n'ont pas été entendues dans le registre qu'il a utilisé pour les dire. Souvent, les adultes interprètent son message comme un dysfonctionnement, un symptôme gênant à réduire ou à supprimer, plutôt que comme un langage à comprendre.
Différencier le sujet de l'objet
Pour que l'échange soit fertile, il est important que nous centrions notre attention sur le sujet, soit celui qui parle, et non sur l'objet, ou de ce dont il parle. Par exemple, lorsqu'un enfant dit : "Je n'aime pas l'école", le je est le sujet et l'école est l'objet. Il ne faut pas confondre ces deux aspects. Plus nous saurons écouter l'enfant, le sujet, plus il pourra accéder à ce qui est touché en lui, et plus nous serons en mesure de l'aider à solutionner la cause de son problème.
Favoriser le passage
Accompagner un enfant, c'est cheminer avec lui. Une relation d'accompagnement dans le temps permet de passer à une forme d'écoute centrée sur l'enfant et non sur la difficulté. La relation d'accompagnement favorise le passage de l'écoute active qui permet à celui qui parle d'entendre ce qu'il dit, à uneécoute participative où l'enfant devient auteur de son propre changement en découvrant lui-même ses choix de vie et en en assumant les conséquences.C'est à travers le partage et les échanges avec l'autre que nous pourrons ensemble créer un environnement non violent où il fera bon vivre et où nous pourrons grandir mutuellement.
Janine Fortin
Formatrice en communication relationnelle, Québec