Claire, résidant habituellement en Suisse, passe l'été chez ses grand-parents à Tokyo, organisant pour eux un prochain voyage en Corée, leur pays natal qu'ils ont du quitter durant la guerre. La communication n'est pas aisée entre la jeune femme et ses grands-parents qui refusent d'utiliser une autre langue que le coréen. Pour lutter contre les heures qui s'étirent entre le jeu de Tétris et des repas tardifs, elle accepte de s'occuper durant cet été de Mieko, une petite japonaise à qui elle apprend le français. Elle fuit ainsi sa grand-mère à qui la mémoire fait défaut et son grand-père qui travaille toute la journée au salon de Pachinko, une salle de jeu mettant à l'honneur le Pachinko, entre le flipper et la machine à sous.
L'écriture dépouillée de l'auteure réussit admirablement à rendre l'atmosphère, la moiteur, l'ennui prégnant, les sons tonitruants. Les personnages semblent errer dans une journée sans fin, et même si les divertissements foisonnent, même s'ils passent une journée au pays d'Heidi, ou dans des parcs d'attraction, une langueur persistante s'empare des âmes et des corps. Leur identité reste vague, à l'image de cette lassitude, mouvante, comme si chacun cherchait à se trouver. Les solitudes se frôlent dans la grande mégalopole, sans se connaitre, sans se parler, les histoires individuelles se brouil lent devant la grande histoire. Les grands-parents ont dû choisir entre le nord et le sud de la Corée, et pour eux, c'est comme si leur pays n'existait plus, ne leur reste que la langue, à laquelle ils se raccrochent désespérément, quitte à creuser l'écart entre eux et leur petite-fille... L'arrière grand mère elle-même en arrivant au Japon , s'était coupée la langue , refusant de parler le Japonais obligatoire.
Un roman délicat qui confirme, après le talent d'Elisa Shua Dusapin.