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Fils d'un avocat international et d'une actrice autrichienne, Mariette Thal (spécialiste de déclamation de poésie lugubre car elle aimait les vers de crise, Thal), Henry Chapier naît à Bucarest en 1933, en attendant que la roue tourne mais sans savoir où la roue mène. En 1947, en pleine adolescence, il doit suivre sa famille sur les chemins de l’exil car le régime roumain pond un méchant décret d’expulsion frappant les Français.
Henry se retrouve à Paris et à la Sorbonne. Il aime les langues et décroche un diplôme de lettres et d’interprétariat ! Entre deux langues de bœufs, finement assaisonnés, il en parle d’autres : anglais, italien et roumain. Il évite, cependant, la langue de bois pour collaborer à l'hebdomadaire Arts avec François Truffaut et Jean d'Ormesson. Il est alors critique cinématographique et le 7ème art ne le lâchera plus ! On le voit publier piges dans L'Express ! Ce ne sont pas des piges à macérer (des pyjamas serrés ?) dans un bocal de l’oubli ! Ces petits écrits font mouche à tel point que le rédacteur remporte le prix du meilleur journaliste débutant en 1959.
Il entre à Combats, journal sans compromission, sans cons mais avec des pros en mission. Une mission de revendications à des heures où le vieux général commence à parler un langage inaudible pour la jeunesse. Et c’est naturellement qu’on le retrouve aux côtés de Daniel Cohn-Bendit en 1968 pour empêcher l'étatisation de la Cinémathèque française.
Deux ans plus tard, en 1970, Sex Power, son premier film, obtient la Coquille d'argent au festival San Sebastian. Ce long métrage, de 81 mn, réunit Jane Birkin et Bernadette Laffont. C’est un film sur l’amour, l’imaginaire, en pleine période hippie voire hippique tant ça crins !
Rédacteur en chef du Quotidien de Paris, il s’installe à FR3 comme éditorialiste culturel. Il s’impose comme le "Monsieur Cinéma" de la chaîne et dit ce qu’il pense des nanars anars, des navets sans niveaux, des westerns spaghettis qui plaisent, quel bol, aux niaises. Peut-être s’est il épanché lamentablement sur « le divan » une œuvre de Rémo qui sentait fort l’anis (1982) ?
Ce serait bien car la transition serait toute faite !
Effectivement, entre 1987 et 1995, près de 300 invités s’allongent sur le Divan d’Henry Chapier pour répondre à ses questions. Le divan, divin, ventilé de vents devins, commençait toujours par la même question : «Quel(le) genre d’enfant étiez-vous à 7 ans ?». Car sur un divan tout humain sept ans et se laisse aller dans ses réminiscences en imaginant les sous venir. Il a ainsi disséqué Juliette Gréco, Jean-Claude Brialy, Helmut Newton, Serge Gainsbourg, Jacques Toubon, Hitler, heu, non, pas Hitler. Les cobayes semblaient toujours heureux de se livrer à cet exercice hautement autocentré, préambule d’une future société narcissique exacerbée par l’émergence d’internet et des réseaux sociaux.
En 1996, Henry est membre du jury au Festival de Cannes, présidé cette année-là par Francis Ford Coppola et décernant la palme d’or à « Secrets et Mensonges » de Mike Leigh. Henry pense alors à l’émission qu’il vient de quitter et aux petits mystères inavoués de ces peoples qu’il a invités sur son divan.
Animateur sur Radio Nova, il reprend du service pour l'été 2006 sur la chaîne Pink, une chaîne qui lui redonne foi car si rose ! On le retrouve avec cette voix inimitable ! Il reste égal à lui-même, observant le décorum très kitch de son émission et appréciant de revoir des célébrités s'asseoir sur son célèbre divan-danger qui dit vendanger les raisins à pépins et autres contrariétés de la vie.
En 2015, il passe le flan beau à Marc-Olivier Fogiel en disant :
- C’est une crème d’émission, vraiment du gâteau. Je vous la lègue au mieux car je ne voudrais pas que vous en pâtissiez ! - Le temps d’être élevé au grade commandeur de la légion d’honneur (le 1/1/2017) et le voilà parti pour des divans, des vins divins car la vigne du Seigneur lui est grand ouverte. Le maître des lieux, le voyant arriver, ne manquera pas de dire : Hé, Chapier, quel genre d’enfant étiez-vous à 7 ans ?
Il nous laisse des archives que l’INA dépoussière et nous propose sur la toile.
Salut Henry !