Le nouvel an chinois change chaque année car basé sur le calendrier lunaire mais les russes ont un deuxième nouvel an le 13 janvier dans le calendrier Julien. Le même vieux calendrier qui place la révolution du 7 novembre 1917 en Octobre. En 1582 Grégoire a ajouter 10 jours pour remettre les saisons en place. Au XXième et XXIième siècle on ajoute 13 jours, ensuite ce sera 14... et Vialatte en a parlé en 1962 dans une chronique.
Et le 13, ce sera le premier de l’an. Le premier de l’an russe, qui est fixé par le calendrier julien. Cinquante mille Russes fêteront ce jour à Paris en mangeant le bortsch, les zakouski, l’azou, le wzwar et le koulibiak, et en chantant d’une voix caverneuse. Des chants plaintifs. Par pure gaieté. « Je suis gai, disait Raspoutine, chante-moi quelque chose de bien triste. » Tel est le mystère de l’âme slave. Sa grande plaine lui donne le vertige. Le Russe aime le mêler à tout. Et en même temps il mange de petits oignons craquants avec le riz arrosé de citron et la longue brochette de mouton que le garçon brandit comme une épée. Dans un décor, autant que possible, de colonnes bariolées comme un manège forain. Ces choses lui rappellent son pays. J’ai demandé à un vieux chauffeur s’il s’en souvenait ; c’était si loin ; dans l’espace et dans le temps.
— Ah ! oui, monsieur, me dit-il, c’est vieux, c’était l’époque des tsars. En ce temps-là on avait le droit de grève...
La Montagne, 2 janvier 1962.