Fils d'un chef d'orchestre, Raymond Legrand, Michel naît le 24 février 1932 dans le quartier de Ménilmontant où tous les gars sont remontants en gardant l’esprit chevalier. Michel voit ses parents divorcés et poursuit une enfance qu’il qualifiera de difficile. Mais sa résilience lui fait étudier les gammes au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris. Il commence à labourer son destin en partie sillons…
Dès 19 ans, il commence une carrière d’accompagnateur et d’arrangeur pour Catherine Sauvage ou encore Henri Salvador qui lui précise que le travail c’est la santé. Michel ne le sait que trop ! Le talent ne respire pas si l’effort n’est pas au rendez-vous. Mais le tournant de sa vie prend ses racines dans les années 60 : celle de la libération du cinéma, l’émergence de la nouvelle vague !
Une voie lui est toute ouverte pour la composition de musiques de film ! Il travaille pour Agnès Varda (Cléo de 5 à 7- 1962), avec Jean-Luc Godard (Une femme et une femme – 1961, Vivre sa vie – 1962, Bande à part – 1964). Le vrai coup de foudre de sa vie est alors la rencontre avec Jacques Demy, qu’il considèrera toujours comme un frère jumeau.
Avec Jacques la collaboration commence par Lola, en 1961. Puis viennent les parapluies de Cherbourg (1964), une œuvre cinématographique inclassable, entièrement chantée ! Viendront les célèbres Demoiselles de Rochefort (1967) nées sous le signe des gémeaux, Mi fa sol l’âme irait, ré mi fa sol sol sol, raies d’eau, et Peau d’âne (1970) !
D’autres metteurs en scène le sollicitent et il devient mondialement connu. Il reçoit deux oscars, l'un en 1968 pour 'L'Affaire Thomas Crown' de Norman Jewison ; l'autre en 1971 pour 'Un été 42' de Robert Mulligan. Le film de Norman Jewison lance à tout jamais la très belle chanson « les moulins de mon cœur ».
Aux Etats-Unis comme en France, son univers musical, imprégné de jazz, dégage une certaine forme d’élégance nappée de simplicité.
En 2014, Michel Legrand se marie avec Macha Meril, l'actrice d'Une femme mariée de Jean-Luc Godard, qu'il avait rencontré pour la première fois en 1964 à Rio de Janeiro. Il est élevé au grade de commandeur de la légion d'honneur le 1er janvier 2016.
Il vient de nous quitter, ce 26 janvier, à l’âge de 86 ans. Il nous laisse des œuvres musicales incomparables, hétéroclites, valsant entre jazz et plénitude symphonique.
Un génie s’en est allé…
Tournent les parapluies du Cherbourg diluvien Et les Rochefortaises dans l’amour qui revient Les mariés de l’an II pris dans le vent chouan Les souliers de Lola dans le Nantes d’antan
Pleurent la douce Yentl dans la nuit constellée L’été quarante-deux qu’une guerre a brisé Vibre le cœur battant sous le gris de peau d’âne Comme vie de château, normande et paysanne
Jouent les mains du pianiste sur les touches sacrées Où s’immisce le jazz entre deux mélopées Féérie de musique, en frissons de splendeur
Michel au panthéon des rêves symphoniques Aux croisées d’horizons d’élégance lyrique Fais tourner de ton nom les moulins de mon cœur.