Plus ne voy rien qui resconfort me donne ;
Plus dure un jour que ne souloient cent ;
Plus n'est saison qu'a nul bien m'abandonne ;
Plus voy plaisir, et moins mon cueur s'en sent ;
Plus oncques mais mon vouloir bas descent ;
Plus me souvient de vous, et plus m'empire ;
Plus quier esbas, c'est lors que plus souspire ;
Plus faict beau temps, et plus me vient d'ennuis ;
Plus ne m'attends fors tousjours d'avoir pire,
Puis que de vous approucher je ne puis.
Plus vivre ainsi ne m'est pas chose bonne ;
Plus veuil mourir, et Raison n'y consent ;
Plus qu'a nully Amours de maulx m'ordonne ;
Plus n'a ma voix bon accort ni accent ;
Plus faict on jeulx, mieulx desire estre absent ;
Plus force n'ay d'endurer tel martire ;
Plus n'est vivant homme qui tel mal tire ;
Plus ne connoys bonnement ou je suis ;
Plus ne say, bref, que penser, faire ou dire,
Puis que de vous approucher je ne puis.
Plus suis dolent que nulle aultre personne
Plus n'ay espoir d'aulcun alegement ;
Plus ay desir, crainte d'aultre part sonne ;
Plus cuide aler vers vous, moins say comment ;
Plus suis espris, et plus ay de tourment ;
Plus pleure et plains, et plus pleurer desire ;
Plus chose n'est qui me puisse souffire ;
Plus n'ay repos : je hay les jours et nuits ;
Plus que jamais a Douleur me fault duire,
Puisque de vous approucher je ne puis.
Plus n'ay mestier de jouer ne de rire,
Plus n'est le temps si non du tout despire* ;
Plus cuide avoir de doulceur les appuis,
Plus suis adonc desplaisant et plein d'ire,
Puis que de vous approucher je ne puis.
(*) de mépriser tout
Jean Meschinot
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