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Nos vies limpides, de Valérie Gilliard

Publié le 24 janvier 2019 par Francisrichard @francisrichard
Nos vies limpides, de Valérie Gilliard

Elles. Elles sont dix.

Leurs prénoms commencent tous par un E, comme Elles: Edwige, Eli(sabeth), Elsuinde, Eden, Elke, Eulalie, Elphie, Emérence, Estée, Edge (Elaine et Emerine sont des intruses qui n'ont pas leur nouvelle).

Ces prénoms existent, ou pas, dans le livre des prénoms. Mais, quand ils sont imaginaires, ils sont évocateurs de celles qui les portent, comme peut l'être une onomatopée ou une allitération.

Elles sont de tous les âges et ont tous les physiques. Si leurs prénoms sont parfois improbables, elles, elles ne le sont pas. Car, qui n'a pas rencontré l'une d'entre elles ou l'une de leurs semblables?

Elles se retrouvent en effet qui à la piscine, qui sur Internet, qui sur le quai d'une gare, qui dans un bus, qui dans la rue, qui chez elles: il n'est donc pas impossible d'avoir eu affaire à elles.

Elles ont leurs habitudes: l'une nage son kilomètre, l'autre aime tout ce qui est bon (c'est-à-dire ce qui est très mauvais, dirait Gérard Oury), une autre encore fait un périple quotidien dans Yverdon.

Elles ont des regrets, des angoisses, des fantasmes, des obsessions ou des manies. Elles disputent leur enfant. Elles se rebellent contre leur mère. Elles écoutent sans écouter. Elles se tourmentent...

Elles sont ordinaires, en apparence. Mais il faut croire que, même chez des êtres ordinaires, il y a toujours des singularités à découvrir, qui les distinguent des autres: il suffit d'observer.

Ce qui n'est pas ordinaire, c'est justement la façon de les dire, avec des mots simples, mais qui, mis bout à bout, dessinent leurs figures, attachantes ou irritantes, risibles ou pas, en tout cas authentiques.

Car Valérie Gilliard observe avec acuité et tendresse Nos vies limpides, c'est-à-dire celles de son genre féminin. Si ses histoires sont parfois drôles, parfois grinçantes, elles sont surtout vraies, humaines en somme.

Et, quand elle ne parle pas d'elles, elle tourne autour d'elles avec des feuilles volantes, qu'elle intercale avec bonheur entre les nouvelles de ce recueil, comme celle qui se termine par ce distique:

Diagnostic: sur-adhérence psychologique.

Traitement: détachant.

Francis Richard

Nos vies limpides, Valérie Gilliard, 172 pages, Éditions de l'Aire


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