Le talent et le savoir-faire certes ; mais cela n'explique pas tout;
Emanation de deux paires de binômes, à ma gauche Noah Lennox et Josh Dibb, respectivement Panda Bear et Deakin ; à ma droite David Portner et Brian Weitz, plus connus sous leurs avatars de Avey Tare et Geologist. Animal Collective est le reflet de la vivace et passionnante scène new yorkaise apparue au début des années 00. Car bien qu'originaires du Maryland, c'est effectivement la Grosse Pomme qui à l'instar de TV On The Radio, Liars, Fiery Furnaces,Vampire Weekend et autres Grizzly Bear, va révéler le quatuor.
Jusque là, les quatre musiciens vivotent ensemble ou séparément, partagent des disques en duo ou en trios sous leurs pseudos et dans des disques plus tard rebaptisés et réédités sous le nom d'Animal Collective.
A partir de Here Comes The Indian (2003), les tentatives parfois....difficiles du groupe prennent un tour plus pop, s'affranchissent peu à peu des mornes obsessions kraut, électrocoustiques ou de la fixette accordés aux films expérimentaux et horrifiques, aussi dignes d'intérêt soient-ils (Can, Ligeti, Carpenter). Sung Tong (2004) et Feels (2005) notamment enfonceront le clou en offrant au quatuor une ouverture bienvenue et mainstream, terme très relatif pour AC - disons qu'ils passent davantagn en radio. Le dernier album donnant à entendre à la manière d'un Grizzly Bear, une pop dépouillée limite folk des plus tordues mais du plus bel effet.
Merriweather Post Pavilion et sa pochette en trompe-l'oeil d'obédience japonaise lance tôt les hostilités, dès le 12 janvier ; et une bombe electro est lancée sur les dancefloors et dans les charts au mois de mars : "My girls" est de ces singles miraculeux et parfaits qui lance la nouvelle donne de Panda Bear et des siens. Une pop aérienne et électronique qui n'oublie pas la mélodie à tomber, l'esprit "chanson" qui même si minimaliste, n'oublie pas les structures plus traditionnelles d'intro chant/couplet.
Même si ici ou là des mantras ("Taste", "Brother sport)", très organiques et percussifs, s'avèrent irrésistibles.
L'élégiaque et très rêveuse "In the flowers" qui ouvre Merryweather... est portée par des claviers enchanteurs, des pianos qui sonnent comme des dulcimers, et s'achève dans un ressac synthétique. A partir de "My girls" qui lui succède, le doute n'est pus permis : les Animal Collective sont les Beach Boys du 21ème siècle, mais des Beach Boys qui auraient avec leurs boucles accortes organisé une partouze en apesanteur sur la Lune. A cet égard, un titre comme "Bluish", ses bandes inversées, ses changements harmoniques sur le refrain sont particulièrement parlantes de l'unisson, lde a cohérence vocale et presque liturgique de l'ensemble.
Le clavier, instrument phare de l'album, loin de scléroser la dynamique de la bande des quatre ou de le figer dans ses nappes savantes, insuffle au contraire une vitalité, un feeling assez contagieux à cette musique. Il n'y a qu'à écouter les batteries de Panda Bear en concert pour s'en convaincre ; un titre échevelé comme "Summertime clothes" donnant à lui seul le vertige.
En dépit de grandes et belles choses à suivre, l'album Strawberry Jam entre autres, des singles ici ou là, il apparaitrait rapidement qu'à défaut d'avoir tout donné et/ou d'avoir essoré ses forces créatrices, Animal Collective ne referait plus d'oeuvres plus abouties ou à défaut d'un niveau au moins égal.
Qu'importe, Panda Bear et les siens avaient d'ores et déjà obtenu un statut rare : celui d'artistes ayant apposé un son, une signature esthétique qui jusque dans l'avant-garde avait gagné ses lettres de noblesse pour les anthologies et encyclopédies musicales futures. Rien que ça.
En bref : le quatuor indé de Baltimore atteint avec cet album et sa pochette mouvante le statut d'icônes indés. Largement justifié au vu de le l'excellence de leurs symphonies pop lunaires.