J’avais envie de frissons et de suspens, c’est donc tout naturellement que j’ai choisi de lire un thriller, chose que je n’avais pas faite depuis longtemps. Je vais donc vous parler aujourd’hui de La fille d’avant de JP Delaney.
Comme Emma avant elle, Jane a vécu un épisode traumatisant. C’est avec des souvenirs douloureux qu’elle emménage dans sa nouvelle demeure : une maison d’architecte épurée et technologique dont le bail comporte des règles et des clauses étranges. Ne pas laisser traîner d’affaires, pas de livres, pas d’animaux, pas d’enfants, pas de rideaux… En échange de toutes ces règles, Jane peut vivre dans cette immense maison minimaliste et hyper-connectée pour une bouchée de pain. Mais petit à petit, elle s’interroge sur le passé de cette maison, un passé trouble : l’ancienne locataire, Emma, y aurait trouvé une fin tragique. Que dire également de l’architecte de la maison, Edward, avec qui elle a vite un lien particulier, aussi minimaliste que cette maison ?
Tout est étrange. Des questionnaires répétées et intrusifs auxquels elle doit se plier si elle veut prendre une douche, un système d’ouverture électronique sans clé… Plus que la maison, ce sont les gens, les personnages qui m’ont troublée. Le roman oscille de chapitre en chapitre entre le avant d’Emma et le maintenant de Jane. Et on découvre dans ce va-et-vient que tout n’est pas si clair. Jane veut en savoir plus mais son chemin est pavé de zones d’ombre. On s’écarte de la maison, vivant avec ces jeunes femmes leurs vies et leurs problèmes, mais c’est pour mieux revenir à cette étrange habitation. J’ai beaucoup aimé l’alternance du passé et du présent qui nous permet de suivre deux histoires en parallèle, de voir leurs similitudes troublantes. Les personnages prennent de plus en plus épaisseur et cela s’accompagne finalement d’un rythme assez lent – pour un thriller je veux dire. On suit Emma et Jane, on enquête à leurs côtés, on témoigne ou on interroge, on recherche : je ne m’attendais pas à cette facette des personnages, ce ne sont pas que des victimes, des êtres passifs à qui il arrive quelque chose, mais au contraire ce sont elles qui découvrent, font avancer le récit.
L’auteur a beaucoup de talent pour la narration assez classique et la construction de ses personnages. J’ai adoré également le choix de cette maison, de l’intrigue autour de cette merveille de l’architecture minimaliste : je m’y suis cru et j’ignore si j’aurais adoré ou redouté y vivre. Le personnage d’Edward, sorte de Steve Jobs, est génial ! Mais là où j’ai été le plus étonnée, c’est sur la tournure que prend le roman dans la deuxième moitié. Je ne m’étais pas attendue que les personnages prennent autant de place et j’imaginais plus un drame technologique dans la maison. Mais les passions humaines sont toujours les plus fortes.
La fin, je m’en doutais un peu et malheureusement elle tombe vraiment à plat. C’est le premier thriller de l’auteur, et il faut dire que ça manque de rythme et de tension. Très clairement, même si on veut connaître la fin, on ne vibre pas autant qu’avec un vrai page-turner. Petite déception donc en ce qui concerne le côté thriller psychologique, mais cela reste un très bon livre, avec une intrigue originale, une narration très bien construite et des personnages qui valent le détour.
JP Delaney, La fille d’avant, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jean Esch, aux éditions Mazarine, 21€90.