Magazine Culture
Si la musique de Dominique A a su garder un degré de qualité assez rare au fil des années, j'avoue n'éprouver plus la même curiosité à son écoute. La preuve, je ne ressens plus d'impatience particulière quand sort un nouveau disque et maintenant un nouveau livre. "Ma vie en morceaux", paru l'an dernier en même temps que les disques "Toute lattitude" et "La fragilité" est une nouvelle fois autobiographique, après "Y Revenir" et "Regarder l'océan". Il raconte comme son nom l'indique, la vie du chanteur à travers quelques unes de ses chansons - 26 en tout - les plus emblématiques : "le courage des oiseaux", "le twenty-two bar", "immortels", "rendez-nous la lumière", etc. On y apprend le contexte de leurs créations et c'est toujours intéressant, permettant d'en réécouter certaines avec des oreilles "neuves". "Hasta que el cuerpo aguante", par exemple, pour laquelle il raconte sa propension aux excès liés à ce métier de constantes représentations.
"Comme disait David Lynch, les gens veulent des explications à tout, mais acceptent très bien que leur vie ressemble à n'importe quoi".
Pour "Manset", il explique évidemment son admiration pour le "voyageur en solitaire", racontant l'anecdote de leur rencontre lors de laquelle il s'était senti comme un petit enfant, accentué par le fait que Manset fut fidèle à sa réputation de perfectionniste moralisateur. Ce livre, comme sa musique récente, participe de cette ouverture au monde extérieur entreprise depuis plusieurs années par Dominique A. L'homme se raconte de manière beaucoup plus affirmée et directe, tout en gardant la distance nécessaire. Il ne cache plus ses compagnes, Françoise puis Laetitia, ses fils Youri et Orson, mais reste "en surface" quand il s'agit d'eux, moins quand c'est lui qui est directement visé. Est-ce la maturité qui lui fait prendre conscience de devoir davantage partager ? La peur de partir avant de s'être expliqué ? On pourra regretter des textes moins sujets à interprétations, moins de mystères (comme sur le récent "se décentrer"). On pourra aussi apprécier de gagner à travers son œuvre un "ami" dont on se sent proche. Comme si l'artiste devenait plus humain au fur à mesure que sa musique descendait de son piédestal. Dans les deux cas, il continue à nous suivre. Bien joué, l'ami !