Il y a quelques-temps, j'étais invité à une conférence. On y donnait un exemple d'un changement visant à libérer une entreprise. Enfin ?
Le problème initial : Société d'une centaine de personnes, croissant vite ; ses dirigeants sont des techniciens, non des managers ; comment gérer un personnel de plus en plus nombreux ? On leur conseille d'embaucher un directeur général. Mais, leur DRH, qui vient de lire les oeuvres de Frédéric Lalou, les pousse à libérer leur entreprise. On appelle un consultant.
La méthode : une expérimentation, portant sur une partie de l'effectif, mène à la constitution de quatre pôles d'activité, quasi autonomes, dont les membres se sont choisis. Alors à quoi cela-ressemble-t-il, une entreprise libérée ? On aboutit à une division en "business units", que d'aucuns qualifieraient de "silos"…
Qu'a-t-on gagné ? Meilleures conditions de travail pour les commerciaux. Mais on a réduit leurs objectifs de 15%, pour leur permettre de participer à l'opération, et le directeur commercial part (était-il inutile ?). On ne fait pas de changement sans casser des oeufs, sans pertes financières, dit, en substance, le consultant. Les bénéfices se verront à long terme.
Surtout, surprise, on apprend que les dirigeants ont vendu l’entreprise ! Donc, la réelle solution à la question qu'ils se posaient, gérer ses ressources humaines, c’est l’acquéreur, pas l’entreprise libérée. On entend aussi que les personnels, apparemment mécontents de la vente, partent.
Décidément, "l'entreprise libérée" est une mode de management, ont dû penser les participants. Mais ce témoignage contredit-il les travaux d'Isaac Getz ? Pour qu'il y ait entreprise libérée, il faut un leader libérateur. Ici, il y a des dirigeants qui veulent se débarrasser de leurs responsabilités. Ils sont libérateurs par abus de langage. Le sens des responsabilités, et d'appartenance à une communauté, est la caractéristique première d'un leader libérateur ?